[Tribune] Ils ont eu la peau de Matthieu Valet

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L’emblématique porte-parole du Syndicat indépendant des commissaires de police (SIPN) Matthieu Valet vient, à l’occasion d’une réunion de son bureau national, d’être débarqué de son poste.

En réalité, pour qui connaît le fonctionnement du syndicalisme policier et la façon dont les enjeux de pouvoir se négocient au sein de ces instances, tout cela n’a rien de vraiment surprenant. On ne peut même que s’interroger sur les raisons pour lesquelles Matthieu Valet n’a pas été mis plus tôt à l’écart.

Porte-parole de tous les policiers

Pour rappel, le SICP est né, en 2006, d’une « divergence de point de vue » sur la manière dont le syndicat majoritaire des commissaires de police de l’époque, devenu depuis le Syndicat des commissaires de la police nationale (SCPN), avait soutenu la politique de sécurité de Nicolas Sarkozy, ministre de l’Intérieur, puis président de la République. Cette réforme, dans son volet essentiellement statutaire, avait conduit un certain nombre de commissaires de police à créer ce nouveau syndicat, le SICP, lequel avait fait un résultat plus que satisfaisant aux élections professionnelles de novembre 2006 (35,79 %).

Lors des dernières élections statutaires de 2022, l’avance du SCPN sur le SICP dans le corps de conception et de direction de la police nationale est resté conséquent (59,43 %, contre 40,57 %), tout en se resserrant néanmoins de manière significative. En effet, sur les 33 points d’avance de 2018, élections précédentes, il n’en restait plus que 19 !

Il faut bien reconnaître que l’arrivée de Matthieu Valet comme porte-parole du syndicat « minoritaire » a considérablement changé le rapport de force entre les deux instances représentatives des commissaires de police. Si l’on excepte son talent oratoire qui est bien réel, Matthieu Valet, par son parcours professionnel, a rapidement su s’attirer la sympathie de très nombreux policiers, au-delà des commissaires de police. Ayant commencé sa carrière comme gardien de la paix, et après être passé par le corps des officiers de police, Matthieu Valet a intégré le corps des commissaires de police avec la 75e promotion. L’expérience vécue de l’intérieur faisait de lui un fin connaisseur des problématiques de sécurité, mais également du fonctionnement de l’institution policière. Ainsi, sa crédibilité professionnelle, son talent de communicant, mais peut-être surtout son franc-parler au sein d’une « maison » qui n’aime guère les oreilles qui dépassent, n’ont pas manqué d’en faire un assidu des plateaux de télévision.

Prises de position courageuses

Et c’est vraisemblablement à ce niveau que le sort de Matthieu s’est joué. Reconnu comme étant devenu le porte-parole de tous les policiers et non plus exclusivement des commissaires de police, ce statut ne pouvait, à la longue, que déplaire à beaucoup de monde. Au sein d’une institution encore fortement hiérarchisée (pour son plus grand malheur !), une telle reconnaissance et une telle audience ne pouvaient que déplaire.

En vérité, après ses prises de position courageuses, toutes consacrées à la défense de la police en général et de tous les policiers en particulier, après ses passes d’armes avec le monde politique et l’extrême gauche mélenchoniste notamment, après quelques critiques bien senties sur certains aspects de la politique sécuritaire du gouvernement, le sort de Matthieu Valet était scellé. Restait à trouver le prétexte. De prétendus contacts avec Jordan Bardella en vue d’une possible place sur la liste du Rassemblement national pour les prochaines élections européennes ont suffi à porter l’estocade finale à celui qui devenait réellement dérangeant, voire dangereux, pour un système qui ne tient plus que par le copinage et les petits arrangements entre amis.

Tout va donc pouvoir rentrer dans l’ordre au sein de la maison police. Et en particulier chez les commissaires. Celui qui était, par son passé professionnel, sa rigueur, son dévouement, pour une institution qui visiblement ne le mérite pas, d’une totale crédibilité est désormais écarté et mis hors d’état de nuire. Ceux qui sont derrière tout cela n’ont vraiment pas de quoi être fiers !

Olivier Damien
Olivier Damien
Conseiller régional de Bourgogne-Franche-Comté, Commissaire divisionnaire honoraire

Vos commentaires

54 commentaires

  1. J’ai souvent regardé les interventions de Monsieur le commissaire Mathieu Valet en temps que porte parole d’un syndicat des commissaires de police, ses propos étaient toujours justes au regard de la situation du moment. C’est sur que cela ne plaisait pas à tout le monde, surtout et y compris à son ministre de tutelle, ainsi qu’à la haute hiérarchie de la police nationale, où, comme partout ailleurs, certains ne sont là que pour « faire carrière », et ainsi plaire au pouvoir en place. Monsieur le commissaire merci pour votre franchise, votre action ne restera pas sans réponse, et je suis sur que vous continuerez dans cette optique sous d’autre forme, et, ainsi être au service de votre profession pour le plus grand bien des citoyens et de leur sécurité..

  2. En apparence il a perdu, mais en réalité il a gagné. Il va rebondir bientôt du syndicalisme à la politique et nous pouvons lui faire confiance sur sa capacité à mettre à profit son talent oratoire, sa passion pour son métier et pour les hommes qui l’exercent et sa flamme pour un ordre et une justice authentiques.

  3. En règle générale les instances syndicales de la police doivent plus leur avancement de carrière à leur dévouement envers le pouvoir en place plutôt qu’à leurs états de service sur le terrain.

  4. Assez d’accord avec le lecteur qui se demande si à présent qu’il est libéré du carcan imposé par son syndicat,
    M. Vallet ne retrouvera pas sa liberté de parole sous une forme ou une
    autre ?
    Toute mon empathie pour les moments difficiles qu’il a dû vivre mais je suis certaine qu’il ne s’arrêtera pas là… Bon vent à lui !

    • Les policiers sont le seul rempart de notre démocratie on leur demande même de protéger des personnes qui manifestent dans des manifestations interdites les mêmes qui disent que la police tue . Il faut une bonne dose de compassion et d’abnégation pour pouvoir continuer dans ce métier honneur à vous Monsieur de les avoir défendu les Français l’ont bien compris

  5. Nous allons le regretter en tant que porte-parole du Syndicat indépendant des commissaires de police (SIPN), mais peut-être pourrions nous l’apprecier de nouveau s’il se lance en politique ? Neanmoins, le Bureau du SIPN ne s’en sort pas grandi

  6. Il a dit la vérité, il doit avoir la tête coupée. Rien ne change en ce bas monde. Nous regretterons cet homme si sympathique;

  7. De ce que vous décrivez ,il semblerait que ceux qui l’ont évincé auront plus à craindre après sa « démission » qu’avant…

  8. En France, malheur à celui qui vent d’en bas. Malheur à celui qui risque de permettre aux élites hors sol de ne plus l’être.

  9. La hiérarchie policière n’en sort pas grandie. Celle qui se cache derrière les hommes de terrain pour s’en servir comme des paratonerres de la societé. Pendant que ces gradés bénéficieront des avancements de carrière pour service rendu au système politique en place.

  10. Petits arrangements entre personnes du meme monde. Mr. VALET n en fait pas partie un gueux qui s’est élevé tout seul à force de travail et qui a eu l’outrecuidance de dire la vérité. Vous connaissez la chanson, le premier qui dit la vérité, il doit être exécuté… C’est fait, dommage…

  11. Encore un qui connait le métier du bas jusqu’en haut mais que l’on a fait taire à jamais car « il dérange », j’ai connu cela aussi dans ma vie personelle. Bravo à vous Monsieur Matthieu VALLET encore un grand MERCI pour vos paroles qui sont criantes de vérité et c’est pourquoi « on » veut vous faire taire, « ça dérange, il dérange »…….Courage pour votre avenir au service des Français pas toujours reconnaissant pour le travail des services de Police et de Gendarmerie !
    Le policier a dit la vérité ! il doit être……

  12. Etre évincé du syndicalisme policier est aujourd’hui un véritable titre de gloire. Quelle autre meilleure reconnaissance de son intégrité et de son sens de l’intérêt général aurait-il pu espérer ?

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