Soljenitsyne, relève-toi, ils sont devenus fous !

Plusieurs syndicats d’enseignants exigent le changement de nom du collège Alexandre-Soljenitsyne d’Aizenay en Vendée au profit de celui de Vsevolod Mikhaïlovitch Eichenbaum, dit Voline, un poète ukrainien plus conforme, sans doute, à leur idéologie « progressiste ».

Rédacteurs d’une pétition soutenue par SUD Éducations, le SGEN-CFDT, la CGT et ATTAC, ces syndicats de gauche osent mentir effrontément pour justifier le Grand Remplacement d’un symbole de la résistance au communisme en alléguant que Soljenitsyne, mort en 2008, aurait approuvé l’invasion russe en Ukraine en 2022. Pas moins ! La Russophobie atteint des sommets de bêtise, de sectarisme et d’ignorance crasse.

Ces falsificateurs de l’Histoire osent écrire : « Soljenitsyne partageait avec [Poutine] sa vision de l’unité de la Russie (donc l’annexion de l’Ukraine), un patriotisme aveugle et une fascination pour les régimes autoritaires. » Et de citer, de façon hallucinante : Soljenitsyne et Poutine partageraient une fascination pour les régimes autoritaires de Franco et Pinochet.

Négationnisme historique… Soljenitsyne n’avait strictement aucune « fascination pour les régimes autoritaires » et n’a jamais prêché quelque « patriotisme aveugle ». Au contraire, il était partisan de « la démocratie des petits espaces », du zemstvo, ou auto-administration locale, de la décroissance et de « l’autosuffisance radieuse » qui vont à l’encontre du gigantisme politique, de la toute-puissance de l’État comme de celle du marché. Et si Soljenitsyne constatait que l’Ukraine faisait bien partie, historiquement, de la Russie, il considérait que c’était, en dernier ressort, au peuple ukrainien constitué depuis alors en État indépendant – à tort ou à raison - de choisir lui-même son destin. Dans L’Archipel du goulag, qu’il rédige dans les années 60, il écrit avec raison, mais aussi avec ses tripes : « J’ai du mal à parler de ces choses : Ukrainien et Russe s’unissent en moi dans le sang, dans le cœur, dans les pensées. Mais la grande expérience que j’ai eue dans les camps de contacts amicaux avec les Ukrainiens m’a révélé à quel point leur cœur est devenu gros. Notre génération n’échappera pas à la nécessité de payer les fautes des siècles précédents. Taper du pied et crier : “Ceci est à moi !” est le chemin le plus simple. Incommensurablement plus difficile est de dire : “Vous voulez vivre à votre idée ? Faites-le !” […] Que nous soyons une grande nation, nous devons le démontrer non par l’énormité de notre territoire ou le nombre de peuples soumis à notre tutelle, mais par la grandeur de nos actes. Et par la profondeur à laquelle nous labourerons ce qui nous restera comme terres, défalcation faite de celles qui auront refusé de vivre avec nous. » Cela paraît assez clair…

Alors, d’où provient l’amalgame : Soljenitsyne-Poutine, même combat ! De leur rencontre en septembre 2000 où les deux hommes partageaient certaines conceptions communes sur le sort d’une Russie devant renouer avec son génie spirituel et traditionnel face à un Occident pourri par l’individualisme consumériste et le matérialisme américanoïde – même s’il faut bien le reconnaître, vingt ans après, Poutine n’a pas non plus enjambé le mur de l’argent facile et de la ploutocratie corruptrice. Il est vrai, aussi, que Moscou ne s‘est pas fait en un jour… Ni le communisme complètement défait après 70 ans de règne.

Il est non moins vrai que Poutine a affirmé à plusieurs reprises que la Russie n’envahirait pas l’Ukraine, même encore quinze jours avant l’agression. Il estimait que c’était aux Ukrainiens de se déterminer démocratiquement. Poutine marche alors sur les pas de Soljenitsyne… Et puis, nous connaissons la suite.

L’universitaire Hubert Heckmann remet les pendules à l’heure lorsqu’il constate, contre toutes les idées reçues : « Débaptiser le collège Soljenitsyne d’Aizenay, ce n’est donc pas rendre hommage au peuple ukrainien, bien au contraire : c’est occulter une part de sa mémoire » (Le Figaro, 23/3/2022). Rappelons, tout de même, aux syndicats précédemment cités - proches du Parti communiste et de La France insoumise -, à ces pétitionnaires professionnels, à ces éradicateurs et rééducateurs de la pensée, que ce sont eux les totalitaires. Ils transforment les faits, les paroles, les contextes pour mieux jeter l’anathème sur Poutine en l’amalgamant avec Soljenitsyne qui, lui, fut un prophète de l’identité des peuples et de la liberté individuelle. Qu’ils se retournent face à un miroir : ils y verront un Staline décati.

Arnaud Guyot-Jeannin
Arnaud Guyot-Jeannin
Journaliste et essayiste

Vos commentaires

29 commentaires

  1. et dire que c’est ces gens qui instruisent nos enfants, censé les rendre plus intelligent. Coluche dirait « ils nous vendent de l’intelligence, ils en ont pas un échantillon sur eux « . au passage j’aime bien l’allusion a la chanson de Sardou.

  2. Encore l’image de la médiocrité et de l’impartialité de nos biens pensants, biens pensants qui malheureusement ont le pouvoir de diffuser leurs idées dans nos médiaux impartiaux ! Comment peut-on salir, interdire cette merveilleuse culture russe et en même temps être fier, même accepter, de participer à la coupe du monde de foot au Qatar, sachant que la construction du stade a entraîné la mort de milliers d’esclaves et que les droits de l’homme y sont bafoués en permanence ! Le en même temps ?

  3. C’est nous en France qui devenons fous ..haineux et remplis d’agressivité ..courage les russe et vive la Russie .

  4. Ils feraient bien – et nos dirigeants également – de relire le discours de Harvard.
    Ce sont ces vérités que l’on n’a pas pardonnées à Soljenitsyne

  5. Le révisionnisme n’est autorisé et encouragé que s’il participe à la marche bien-pensante vers l’avenir radieux de l’Humanité.

  6. Encore, peut-être, une génération et si la France est encore la France, les syndicats rouges et verts de « l’éducation nationale » auront pris un pouvoir totalitaire par l’endoctrinement des jeunes cerveaux, d’autant que celui qui s’en va et « revient » pour 5 ans fait tout pour la destruction du pays.

  7. Il maque 2 choses à cet très bel article : 1/ donner les noms des responsables syndicalistes qui se cachent sous leurs sigles 2/ Que le département fasse inscrire sous le nom du Lycée :  » Ukrainien et Russe s’unissent en moi dans le sang, dans le cœur, dans les pensées. Mais la grande expérience que j’ai eue dans les camps de contacts amicaux avec les Ukrainiens m’a révélé à quel point leur cœur est devenu gros. »

  8. Vous trouvez le Communisme défait ? Moi je le vois florissant chez nous.
    L’Ukraine a été colonie de tant de pays avant de revenir dans le giron russe que l’Historien s’y perd aisément .

  9. La peste rouge à l’oeuvre et dire que l’Education Nationale regorge de ces dangereux manipulateurs.

  10. Autant dire la vérité : Soljenytsine est devenu un auteur maudit à cause de son ouvrage « Deux Siècles ensemble ». Je ne vais pas developper plus, mais ceux qui l’ont lu savent parfaitement de quoi je parle. Il y a des sujets qui sont devenus tabou pendant ces 3 dernières décennies.

  11. Quelle tristesse de la part d’enseignants qui devraient au contraire rappeler, sans les déformer, les propos de ce courageux écrivain que fut Alexandre Soljenitsyne. Honte à ces idéologues qui au lieu d’enseigner et de chercher à éveiller nos enfants ne font que les manipuler et les empêchent de réfléchir. Un grand coup de balai s’impose là aussi.

    • Ils en parlent mais l’ont-ils au moins lu ? Et si oui compris ? Je doute fortement de chacune de ces interrogations…

      • pas sûr, vous avez raison, ils ont peut être simplement entendu une émission sur Soljenitsine en écoutant France Inter, France Culture… les radios favorites, avec France Musique, des intellos ??

      • La réponse est dans votre question il y belle lurette que nos enfants n’ont plus la possibilité de se cultiver en classe ni même d’apprendre le B A Ba de la vie.

    • ça vous étonne ?? certains enseignants se considèrent comme des élites intellectuelles dont la parole ne PEUT et ne DOIT pas être mise en doute….

  12. Comme ex-enseignant je sais hélas à quoi m’en tenir sur les syndicats cités, mais je reste quand même stupéfait devant un tel degré de bêtise, d’ignorance et de sectarisme. Ces individus ne se sont même pas encore aperçus que gauchisme et progressisme macronien marchent main dans la main dans la même direction et qu’ils sont les idiots utiles du système.

  13. Il s’agit surtout pour eux de faire disparaître une des principales références dans la description des systèmes totalitaires communistes. Les rouges savent parfaitement réécrire l’histoire.

    • Ceux qui réécrivent l’histoire, déboulonnent les statues et détruisent les églises sont les mêmes depuis la Terreur, Bolchéviques, islamistes et maintenant, beaucoup plus insidieusement, wokistes…

  14. Tous ces gauchistes ne se rendent pas compte qu’ils font le jeu du libéralisme et du capitalisme le plus débridé. Ils sont restés figés dans leur idéologie et ne comprennent plus rien au réel. Respect à Soljenitsyne qui a fait plusieurs années de goulag sans se renier. Tous ceux qui le conspuent aujourd’hui ne lui arrive pas à la cheville et paradent là où il n’y a aucun danger.

    • Il faut comprendre que le « libéralisme le plus débridé » est l’inverse du libéralisme « canal historique » ( qui prône l’autonomie et la subsidiarité) et puise ses racines dans l’extrême gauche marxiste et trotskiste. Cette inversion du vocabulaire en trompe plus d’un.
      On a en quelque sorte une alliance entre les totalitaires d’en haut et ceux d’en bas.

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