Pourquoi, dans notre société, se croit-on tout permis ?
Pourquoi se croit-on tout permis ?
J'entends, sur France Info, la députée LREM Élise Fajgeles, qui est le rapporteur du projet de loi pour une immigration maîtrisée et un droit d'asile effectif. Elle explique lumineusement la distinction nécessaire à opérer entre l'immigration légale et la clandestine. Celle qui a un titre à demeurer en France et celle qui n'en a pas. Elle a droit au questionnement du journaliste qui ne manque pas d'insinuer qu'il y a donc des "bons" et des "mauvais" migrants.
Évidemment, aurait-elle dû répliquer vertement. La loi consacre les bons et cible les mauvais. Ce n'est pas vouloir l'effacement des seconds mais seulement rappeler qu'un État est dans son rôle quand il corsète et adapte l'humanité et la générosité abstraites au regard de ce qui est possible pour un pays.
Pourquoi se croit-on tout permis ?
Parce qu'à force de moquer les propriétaires campés sur leurs biens et accusés d'y tenir, on a peu à peu légitimé toutes les atteintes, même les plus intolérables, au droit d'être tranquillement chez soi et de s'y croire en sûreté.
Faut-il rappeler l'augmentation des occupations illégales de logements et des loyers impayés qui, pour le meilleur, occasionne "un long contentieux devant les tribunaux" et, pour le pire, des situations scandaleuses, offensant le bon sens, favorisées par une législation ubuesque qui n'a pas pour vocation le triomphe rapide du droit et de la justice mais le culte d'une absurdité où l'État de droit non seulement ne protège pas mais nourrit la transgression.
Par exemple, quand les occupants légitimes aspirent à rentrer dans leur appartement ou leur maison passés sous la mainmise de squatteurs, ceux-ci pourraient les poursuivre pour violation de domicile au cas où ils n'auraient pas eu la précaution de faire appel à la police. Ainsi le mal non seulement ne serait pas sanctionné mais se verrait octroyé des pouvoirs pour combattre ses victimes! [...]
Cela va plus vite quand ces propriétaires ou locataires font appel à des jeunes du quartier pour déloger les Roms.
L'épopée burlesque et tragi-comique d'un ancien chirurgien propriétaire d'une villa envahie après effraction par une famille "ayant pris ses aises, redécoré et installé une piscine" est à retenir. Ces péripéties ont duré dix-sept mois et, apparemment, le film avec Christian Clavier À bras ouverts n'était rien à côté d'elles.
Il est facile de se gausser de ces mésaventures, de les tourner en dérision. On est toujours miséricordieux quand il s'agit d'autres que nous. Chez les autres, nous sommes prêts à accueillir une multitude de migrants et d'occupants sans titre.
Pourquoi, dans notre société, se croit-on tout permis ?
Parce que la justice est lente, longue et hésitante et qu'on sait parfaitement qu'entre la transgression et l'illicéité que l'urgence favorise et l'enlisement dans une interminable temporalité qui épuise le plaignant plus qu'elle ne l'assure de recouvrer ses droits et l'état de ses biens, la lutte est inégale. L'honnêteté perd à tout coup. Encore heureux que la victime ne soit pas stigmatisée parce qu'elle a la faiblesse d'attendre de l'autorité publique, quand cette dernière est violée, un secours, un recours, une restauration.
Pourquoi se croit-on tout permis ?
Parce que les frontières ont disparu à peu près partout et que celui qui invoque son droit doit aujourd'hui se justifier, son apparente présomption de force étant battue en brèche par la présomption de faiblesse et son infinie puissance émotionnelle. Qui ne fait plus pleurer a perdu.
Parce qu'il est plus facile de laisser tout aller, de faire un salmigondis de bien et de mal et de s'épargner les dures contraintes de la rigueur et de l'ordre que de muscler la démocratie et d'assurer à chacun la sécurité.
Et d'aider ceux à qui, avec impudence, on criera "Poussez-vous de chez vous que je m'y mette" à répondre doucement mais fermement : "Je suis chez moi, dans mon appartement, dans ma vie, dans mon pays."
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