Référendum d’initiative partagée : le référendum anti-Macron à la maison

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C’est parti depuis jeudi : les Français peuvent « déposer un soutien à la proposition de loi visant à affirmer le caractère de service public national de l’exploitation des aérodromes de Paris ». La formulation n’est pas simple pour qui n’est pas coutumier du vocabulaire législatif, alors nous allons essayer de l'être. Cette proposition de loi (donc un texte à l’initiative de parlementaires) a pour objectif final d’empêcher que le gouvernement ne privatise - d’aucuns diront ne brade - Aéroports de Paris (ADP), qu’ils considèrent comme un bijou de famille. Un remake de la privatisation des autoroutes imaginé par Emmanuel Macron et le gouvernement, histoire d’apporter leur contribution à la démolition – on dit déconstruction, aujourd’hui - de la France gaullo-pompidolienne !

L’affaire remonte au 10 avril dernier lorsque 218 parlementaires (il n’en fallait que 180) des deux chambres, issus de toutes les oppositions (de La France insoumise au Rassemblement national en passant par les socialistes et de nombreux LR) votèrent en faveur du lancement d’une procédure de référendum d’initiative partagée (RIP). Le RIP, un machin inventé par Nicolas Sarkozy, qui espérait sans doute que cela ne servirait jamais. Comme quoi… Le gouvernement s’était alors étranglé de concert, parlant de « drôle d’attelage » ou d’« équipage de circonstance ». Rassembler des gens issus de tous les bords politiques (sauf du RN, ça va sans dire) autour de la belle personne d’Emmanuel Macron : BIEN ! Dixit Marlène Schiappa, féministe, écrivaine, penseuse et femme politique du début du XXIe siècle. En revanche, que des gens issus de tous les bords politiques - y compris du RN, car s’il n’a pas été associé à la conjuration, le parti de Marine Le Pen adhère très volontiers à la démarche, invitant ses militants et électeurs à rejoindre le mouvement – s’unissent pour contrer la politique d’Emmanuel Macron : PAS BIEN. Un catéchisme se doit d’être simple, même si la pensée du gourou peut être complexe.

Or, donc, nous y sommes. Depuis jeudi, les Français inscrits sur les listes électorales peuvent signer ce qu’on pourrait appeler une pétition. Durant la journée de jeudi, on a beaucoup lu que c’était la galère, que ça buggait, pédalait, que c’était décourageant. Eh bien, je dis non. Il m’a fallu cinq minutes, moi qui ne suis pas un druide en la matière, pour remplir le formulaire. Un détail qui a son importance : on doit reporter à l'identique sur le formulaire ad hoc les renseignements inscrits sur la carte électorale. Ainsi, si vous avez plusieurs prénoms, il faut les mentionner tous. Sinon, votre démarche sera rejetée sans qu’on vous dise pourquoi. Voilà pour le côté pratique.

Sur le fond, maintenant. Cette première dans notre histoire politique a-t-elle une chance d’aboutir ? 4,7 millions électeurs, soit 10 % du corps électoral, doivent signer pour que la procédure se poursuive. C’est pas gagné, diront certains. Qu’en sait-on, compte tenu de la force des réseaux sociaux aujourd’hui ? Cette pétition est ouverte pour six mois, soit 17.000 signatures à collecter quotidiennement. C’est peu, au regard des pétitions que l’on voit fleurir pour un oui ou pour un non. Tout dépendra donc de la capacité des oppositions à mobiliser leur électorat. Rappelons-le tout de même, nous vivons actuellement sous un effet d’optique extraordinaire, quasi magique : La République en marche serait quasiment sortie victorieuse du scrutin des élections européennes car n'étant qu’à 0,92 point derrière la liste du Rassemblement national : comme ça aurait pu être pire, c’est donc mieux ! La réalité est plus cruelle pour le pouvoir : le complément de 22,42 (pourcentage obtenu par la liste Loiseau, soit 10,73 % du corps électoral), c’est 77,58. 77,58 % des électeurs qui se sont déplacés n’ont pas voté pour Emmanuel Macron. Un score de république bananière à l’envers.

Et si, le dimanche matin, on préfère désormais rester sous la couette plutôt que d’aller voter, si l’on a renoncé à aller investir les ronds-points, si l’on ne veut plus prendre le risque de se prendre une rasade lacrymogène en descendant dans la rue, quoi de mieux qu’un petit clic, tranquille, en nuisette ou caleçon (c'est selon), derrière son ordinateur. Un mouvement des gilets jaunes et/ou une manif pour tous numériques, en quelque sorte ?

Georges Michel
Georges Michel
Editorialiste à BV, colonel (ER)

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