Quoi ! la police se mêle enfin de ce qui la regarde !

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Rien de plus faux que de croire que l'affaire (euphémisme !) de Villeneuve-la-Garenne, suivie par d'autres désordres, violences, dégradations et incendies ailleurs, soit la conséquence d'un confinement qu'on dit à peu près respecté. Tout de même, des consignes ont été données aux forces de l'ordre pour qu'elles ne fassent pas de zèle dans le contrôle des attestations. Ce qui a signifié encore davantage de faiblesse de l'État et accentué le sentiment de la police de n'être pas soutenue dans sa mission mais abandonnée.

Le saisissement médiatique et politique face à ces violences urbaines est ridicule car elles ne sont que la continuation d'affrontements et de troubles qui gangrènent régulièrement la vie collective de ces cités : le trafic de quelques-uns et leur haine des « flics » au détriment d'une majorité qui n'aspire qu'à de la tranquillité.

Ce qui s'est déroulé à Villeneuve-la-Garenne est une caricature tristement exemplaire de cette manie de l'information de n'appréhender les événements susceptibles de mettre la police en cause qu'avec une vision de l'aval sans éclairer l'amont : le comportement fautif, délictuel de la personne qui a rendu obligatoire le contrôle créé l'incident et, d'une certaine manière, sa blessure.

Celle-ci, en l'occurrence, a la bagatelle de quatorze mentions à son casier judiciaire et l'ironie suprême est qu'elle se pose en pacificateur.

Face à cette ritournelle monotone - toujours le même registre peu ou prou hostile à la police et compassionnel pour ces cités -, rappelons quelques évidences dont l'impact devrait être d'autant plus convaincant que la politique largement sociologique a montré ses limites ; on pourrait maintenant mettre en œuvre une répression cohérente de bas en haut, des forces de l'ordre au quotidien au pouvoir politique de droite ou de gauche.

La police a le droit et le devoir d'exercer sa mission partout. Pas une parcelle de notre territoire ne doit échapper à l'ordre républicain et à la vigilance pénale. Certaines cités se sont tellement habituées à transgresser en autarcie que tout retour de l'autorité est perçu comme un scandale. Quoi ! la police se mêle enfin de ce qui la regarde !

La police ne doit jamais oublier que, dans ces quartiers comme ailleurs, une relation d'urbanité démocratique est souhaitable, en tout cas tant qu'elle est permise par ceux qui y vivent et ne la rendent pas impossible par une agressivité qui a besoin de se manifester à tout instant contre n'importe quelle incarnation de l'État et des services publics.

Dans ces multiples conflits parfois dramatiques, face à ces affrontements réguliers, la police n'a pas à être présumée coupable, les ministres se doivent de la défendre tant qu'aucune faute ne peut lui être imputée. Elle a le monopole de la force et lui opposer systématiquement de la violence est une dérive aux effets à chaque fois redoutables.

L'État n'a pas à se laver les mains lâchement des inévitables polémiques suscitées par les interventions d'une police pourtant parfaitement républicaine. Son arbitrage unilatéral par démagogie aggrave le délitement de la société et amplifie le discrédit à l'égard d'un corps à soutenir plus que tout autre.

Une certaine magistrature ne doit pas donner l'impression, dans sa pratique, qu'elle déteste plus la police que ceux qui l'agressent.

Pour appréhender ce phénomène, il faut abandonner radicalement l'approche mécaniquement sociologique, systématiquement compassionnelle - les pauvres, il faut leur pardonner, ils ne savent pas ce qu'ils font et la société est coupable à leur égard ! -, pour changer de registre : ceux qui font le déshonneur de ces cités sont libres, responsables, le jouet d'aucune influence qui leur serait extérieure, il convient de ne pas avoir peur de leur appliquer les règles d'une justice sévère quand ils le méritent - avec des peines exécutées ! - ou modérée quand l'équité le commande. De chasser toute mauvaise conscience. En agissant comme il est urgent de le faire, on ne stigmatise pas la majorité honorable, au contraire, on la sauve.

Ce n'est pas la France éternelle, qui se trouve offensée dans ces émeutes, ce feu et ces violences. C'est la France d'aujourd'hui, avec un pouvoir politique frileux, sans courage, une police sans instructions claires, une délinquance flattée parce qu'elle serait malheureuse alors qu'elle est seulement persuadée qu'elle a le champ libre - et c'est vrai -, des médias complaisants, des citoyens indignés mais qui n'en peuvent mais, une démocratie invoquée autant verbalement qu'à proportion de son impuissance concrète.

Ne rassurons pas nos médiocres : non, rien n'est fatal dans ce qui, ainsi, affaiblit et ridiculise la République !

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Philippe Bilger
Magistrat honoraire - Magistrat honoraire et président de l'Institut de la parole

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