Primaire LR : que vont faire Pécresse, Wauquiez et Larcher contre Xavier Bertrand et Christian Jacob ?

Dimanche 28 juin, LR était sur un petit nuage. Enfin une élection gagnée ! Le parti conservait ses régions et ses départements grâce à une abstention record. Mais la victoire avait plusieurs visages, ceux des présidents de région réélus : Wauquiez, Bertrand, Pécresse. C'était, évidemment, le casting de la prochaine série sanglante qui nous attend pour la présidentielle 2022. D'autant plus qu'il faut y ajouter Michel Barnier, qui a déposé ses petits cailloux très tôt. Voire Bruno Retailleau et David Lisnard. Sans compter Éric Zemmour, que certains LR seraient prêts à soutenir.

D'où le recours angoissé à la primaire, censée départager les candidats et choisir le meilleur, éviter une multiplication des candidatures. D'où un Monsieur Primaire. Cette fois, c'est Jean Leonetti, maire d'Antibes, une sorte de vieux sage, père des lois de Bioéthique dont on sait ce qu'elles sont devenues. La dernière fois, c'était un certain Thierry Solère, un Monsieur Loyal aujourd'hui conseiller d'Emmanuel Macron. Le bon docteur a donc été obligé de garder ce qui avait fait le succès de l'opération : une primaire ouverte à tous les sympathisants de la droite et du centre, comme il le dit ce dimanche au JDD.

Mais la question, d'abord, pour LR, c'est justement la primaire, car rien n'est acquis, tous n'y sont pas favorables. Au premier chef Christian Jacob lui-même, président du parti, qui veut ménager une porte d'entrée à… François Baroin (tiens, on l'avait oublié, celui-là…). Quant à Xavier Bertrand, il s'est depuis longtemps émancipé du parti et a toujours dit qu'il ne passerait pas par cette case.

Donc, c'est mardi, lors d'un bureau politique, que le parti devra se mettre d'accord sur cette primaire ou pas. Encore une grande journée, peut-être moins drôle que lors du psychodrame Muselier, mais sait-on jamais ! Preuve de l'importance de l'enjeu, Laurent Wauquiez, selon le JDD, « fera le déplacement » pour exiger ce vote. Le même JDD constate qu'« il comptera de nombreux alliés autour de la table et à l'extérieur. Il a échangé cette semaine avec Valérie Pécresse, également partisane d'une primaire. Outre Bruno Retailleau, le système de départage bénéficie d'un autre puissant parrain : le président du Sénat, Gérard Larcher ; 91 sénateurs LR ont d'ailleurs adressé aux membres du BP un texte réclamant une accélération de la désignation du futur candidat. "L'élan de juin ne doit pas s'enliser pendant l'été", y écrivent-ils. »

Voilà les forces (est-ce le mot ?) en présence. Pour le moment, tout ce beau monde reste policé et appelle les autres à se rallier à sa candidature. Et puis, il faut faire bonne figure depuis que quelques projecteurs s'intéressent de nouveau à vous. Car tout le monde voit bien que ces victoires aux régionales, avec seulement 35 % de participation, sont tout de même à relativiser. D'ailleurs, personne n'a encore relevé un chiffre éloquent : en 2016, à la primaire de la droite et du centre, 4,4 millions d'électeurs, sympathisants LR, s'étaient déplacés. Exactement le score obtenu par les listes de droite au premier tour des régionales. LR sait qu'il peut compter sur ce matelas. Mais au-delà ? Et d'ailleurs, pas sûr que la future primaire (si elle a lieu) mobilise autant de monde. Souvenez-vous : concouraient alors un ancien Président et deux anciens Premiers ministres. Aujourd'hui, LR n'alignerait en tête de gondole que des présidents de région… Le grand déclassement.

Mais l'événement de mardi est important car on pressent que l'heure du grand éclatement approche. Les risques d'explosion interne, avec les rivalités d'ego, sont nombreuses. Et puis, il y a les snipers externes : un Xavier Bertrand côté centre mou et un Éric Zemmour côté droite dure. Si on ajoute à cela la poutre qui bouge encore depuis l'Élysée (coucou, Renaud Muselier, Christian Estrosi et Édouard Philippe !), tout est prêt pour ouvrir une page importante de la recomposition politique qui, malgré les apparences des régionales, ne s'est que provisoirement arrêtée dimanche dernier. Une présidentielle, ce n'est ni une élection régionale ni la primaire incertaine d'un parti qui ne sait plus où il habite.

Frédéric Sirgant
Frédéric Sirgant
Chroniqueur à BV, professeur d'Histoire

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