La Pologne pourrait mettre fin aux avortements eugéniques
La Diète polonaise examinait, mercredi, deux projets de loi citoyens, c’est-à-dire deux textes proposés par des initiatives citoyennes. L’un voudrait libéraliser l’avortement sur le modèle de l’Europe occidentale, l’autre voudrait au contraire mettre fin aux avortements eugéniques (appelés IMG, en langage administratif, ou « avortements thérapeutiques » en novlangue). Ces avortements représentent plus de 90 % des 1.000 à 2.000 avortements réalisés chaque année dans les hôpitaux polonais.
Les auteurs de l’initiative citoyenne au titre trompeur de "Sauvez les femmes" (trompeur, car la moitié environ des bébés avortés sont de sexe féminin, et même la totalité pour les enfants atteints du syndrome de Turner, l’un des motifs d’avortement eugénique) ont recueilli quelque 200.000 signatures. Les auteurs de l’initiative "Arrêtez l’avortement" revendiquent 830.000 signatures. Il en faut 100.000 pour obliger le Parlement polonais à examiner un projet de loi.
Seule l’initiative visant à mettre fin aux avortements eugéniques a passé l’étape du vote en première lecture mercredi, le projet en faveur d’une libéralisation de l’avortement ayant été rejeté. Même une partie des députés libéraux ont voté contre l’initiative pro-avortement ou ont refusé de prendre part au vote.
L’explication de la députée d’un des deux partis libéraux, .Nowoczesna (".Moderne"), encore plus libertaire que le parti PO ("Plate-forme civique") des amis de Donald Tusk, montre à quel point les Polonais sont, dans leur ensemble, plus sensibles que les Français au droit à la vie de chaque être humain, et plus éclairés sur la question de la vie prénatale. Sur la chaîne de télévision libérale-libertaire Polsat News, une députée de .Nowoczesna qui a refusé de prendre part au vote mercredi, alors qu’elle se dit favorable à une libéralisation de l’avortement en Pologne, a expliqué sa décision par les mots prononcés par celle qui défendait à la tribune le projet de loi citoyen "Sauvons les femmes" : "Un gland n’est pas un chêne, un œuf n’est pas une poule, et un fœtus ou un embryon, un zygote ou un amas de cellules n’est pas un enfant."
"Je n’accepterai jamais l’idée qu’un fœtus de trois mois n’est pas un enfant, car je viens de donner naissance à un enfant. Qu’on ne me dise pas que c’est un simple amas de cellules", a expliqué la députée, qui a ajouté que plusieurs membres de son parti se sont levés et ont quitté l’Hémicycle à ce moment-là.
Dès le mois d’octobre, le président Andrzej Duda avait annoncé son intention de ratifier, si elle est adoptée par le Parlement, la loi interdisant les avortements eugéniques, en justifiant sa décision par le fait que les premières victimes de la loi actuelle sont les enfants porteurs de la trisomie 21. Il avait notamment déclaré : "Ces enfants, s’ils arrivent à survivre et que leurs parents ne choisissent pas, comme cela est malheureusement proposé aujourd’hui, l’avortement, sont très heureux. Il est inacceptable qu’il soit aujourd’hui possible, en Pologne, de les tuer. Ce sont des gens merveilleux, qui peuvent faire beaucoup de bien grâce à leur vie. Je signerai la loi interdisant l’avortement eugénique avant tout pour supprimer le droit de tuer les enfants avec le syndrome de Down."
La Conférence épiscopale de Pologne a, elle aussi, appelé les députés chrétiens à adopter le projet de loi "Arrêtez l’avortement", en rappelant que "nous avons tous vocation à aimer et accueillir les plus faibles, et pas à les tuer », et « il ne peut être question de tuer autrui, et en particulier les enfants handicapés ou malades !"
"Je suis persuadé que ce projet de loi sera adopté", m’a dit, vendredi, Wojciech Murdzek, député d’un parti allié au PiS au sein de la Droite unie (Zjednoczona Prawica).
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