L'Union européenne, toujours généreuse avec l'argent des autres, a annoncé, mardi, par la voix d'Ursula von der Leyen, un plan d'aide à l'Afghanistan. Un soutien théoriquement destiné au peuple afghan et aux voisins du pays : pas question d'aider le régime taliban, tant qu'il ne respectera pas les droits de l'homme ! Mais les nouveaux dirigeants exercent déjà un chantage, brandissant la menace d'une « migration économique ».

Selon son habitude, l'Union européenne nage dans l'hypocrisie. Ce programme d'aide d'environ un milliard d'euros doit aller à la population afghane « afin d’éviter une catastrophe humanitaire sans légitimer le gouvernement intérimaire des talibans ». Le financement européen sera acheminé vers les organisations internationales sur le terrain, avec la bénédiction des talibans, sans doute, bien contents de trouver de bons samaritains pour subvenir aux besoins de la population. Ainsi les prétendus libérateurs pourront-ils tranquillement continuer d'étendre leur emprise sur les Afghans sans s'occuper des problèmes d'intendance.

L'aide au développement global restera cependant gelée, assure la Commission européenne, qui veut garder les mains propres, tant que le nouveau régime ne répondra pas aux critères qu'elle a édictés : les talibans devront, notamment, respecter les droits de l'homme fondamentaux, en particulier les droits des femmes ; son gouvernement devra être « inclusif » et permettre l’accès à l’aide humanitaire. Il faut être d'une grande naïveté ou d'une grande bêtise – à moins qu'il ne s'agisse de duplicité – pour croire que les talibans adopteront des principes qui leur sont totalement étrangers.

Le gouvernement taliban a donc beau jeu d'exercer son chantage à la migration, à l'instar du président turc Erdoğan. Le ministre des Affaires étrangères afghan n'y va pas par quatre chemins : « Nous demandons instamment aux pays du monde de mettre fin aux sanctions et de laisser les banques fonctionner normalement afin que les organisations caritatives et le gouvernement puissent payer les salaires de leur personnel avec leurs propres réserves et l’aide internationale. » Autrement dit, les talibans veulent le beurre et l'argent du beurre.

Pourquoi se gêner, puisque les puissances occidentales ne condamnent ce régime qu'en paroles mais le laissent, dans la pratique, s'installer durablement. Alors que la présidente de la Commission européenne annonçait cette aide, des responsables de l’Union européenne et des États-Unis se réunissaient au Qatar avec des dirigeants talibans. Les islamistes au pouvoir poursuivent leurs efforts diplomatiques pour obtenir un soutien international en jouant à la fois sur la peur d'une immigration massive et sur les sentiments humanitaires des Occidentaux.

Sachant que l'Europe est plus encline à montrer ses muscles qu'à les combattre et que les États-Unis se sont retirés, les talibans n'ont pas trop à s'inquiéter. Ils sont gagnants sur tous les tableaux : ils obtiennent des financements à l'intérieur et ils savent que les migrants seront bien accueillis à l'extérieur. Ils pourront même y infiltrer quelques agents dormants. Comme le titre Le Monde : « Les talibans veulent de l’aide, mais sans conditions. » Pleins de leur certitude d'avoir raison, ils n'ont pour leurs interlocuteurs que du mépris. Leur force procède surtout de la faiblesse de l'Occident.

 

 

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15 octobre 2021 à 11:45

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