« Covid : l’Allemagne annule la fête de Pâques », tweetait, mardi, le journaliste de France Télévisions François Beaudonnet. Carrément. Rien que ça. On ne va pas revenir sur l’hubris démiurge de l’Allemagne, mais ce pays ne doute décidément de rien. Angela Merkel a osé « faire une croix » sur Pâques, remarquait finement, sur le même réseau social, le père Jean-Baptiste Nadler. « La cancel culture, ça va trop loin », ironisait la chroniqueuse et essayiste Anne-Sophie Chazaud.

Que l’on se rassure : non seulement l’omnipotente chancelière, dont Emmanuel Macron boit les propos comme paroles d’Évangile, ne peut pas « annuler » - Dieu merci, si j'ose dire - la Passion et la Résurrection du Christ mais, en sus, les célébrations religieuses publiques dont elle avait annoncé l'interdiction seront sans doute finalement permises : reconnaissant une « erreur » et « demandant pardon », elle renonce au confinement dur pour Pâques (AFP).

Emmanuel Macron, si prompt à emboîter le pas à son alter ego allemand, n’avait pas suspendu les offices de Pâques comme AstraZeneca : « Pas question » pour Jean Castex, rapportait Le Parisien, « de braquer les représentants du culte », - même s’il serait plus juste, en l’occurrence, de parler des fidèles descendus dans la rue -, « encore moins le Conseil d’État qui avait retoqué, fin novembre, la première préconisation gouvernementale. » On notera une fois de plus, comme on l’a vu pour les divers commerces, que montrer les crocs en corps constitué est payant. Le gouvernement fermant tout ce qui n'est pas « essentiel » - notion subjective s'il en est -, charge aux intéressés, par leur motivation, de démontrer le contraire.

Qu’à cela ne tienne, le gouvernement se rattrapera sur le reste des festivités.

Si Emmanuel Macron prétendait être le maître des horloges, Jean Castex est celui des effusions. Quand il s’est réjoui par avance (16 mars), avec émotion, du jour où il pourrait autoriser les Français à s’embrasser, chacun a compris, en creux, qu’il le leur avait interdit. Je connais, moi, beaucoup de mères qui continuent à serrer leurs enfants dans leurs bras, j'ose le dire, j'en fais moi-même partie. Il faut décidément peu de chose aujourd'hui pour sombrer dans la dissidence…

Il leur a également déconseillé, le 18 mars, les « barbecues entre amis » - n’a pas donné son avis sur la plancha ni la salade niçoise… Un autre gouvernement s’est-il déjà auparavant immiscé avec un tel luxe de détails dans l’intimité des braves gens ? - et Gabriel Attal a confirmé que même la fameuse « règle des six » était abrogée. N’invitez personne chez vous, un point c’est tout. Ce pourrait être un slogan de la nouvelle campagne gouvernementale, qui donne dans le genre poétique, avec rime et hémistiche : « Dedans avec les miens, dehors en citoyen ». Surréalistes et irrationnels, les poètes semblent, il est vrai, être légion, comme on l’a vu avec les attestations, dans les administrations. les Français tendraient, d’ailleurs, à les prendre parfois pour un autre genre d’artistes : mais qui sont ces peintres ?

« Pas de repas de famille », a précisé Jean Castex. Il n’y aura pas de mesure d’exception pour Pâques comme il y en a eu à Noël… qui pourtant ne s’est pas soldé par l’apocalypse sanitaire prophétisée avec des accents sépulcraux par tous les Philippulus de plateau télé. Les Français se sont montrés responsables et se sont bien comportés de façon à protéger leurs aînés. En guise de bon point, on leur sucre donc le traditionnel gigot : tolérés à la cuisine, pour les agapes du 25 décembre, les grands-parents sont exclus pour les festivités du 4 avril. Le mur virtuel des dix kilomètres empêchera les regroupements familiaux, et Jean Castex, tel un Hugo Clément en chocolat, s’élève même contre la chasse… aux œufs. La seule cloche tolérée sera donc celle sous laquelle on gardera les Français. Et puis le bourdon, bien sûr. Car pour filer le cafard, ils sont champions.

Pour une fois, Emmanuel Macron devrait pourtant imiter son mentor teuton préféré qui, avec humilité, consciente d'avoir poussé le bouchon un peu loin, a présenté ses excuses. Car c'est bien les Français excédés qui risquent de lui sonner les cloches - à toute volée - aux prochaines élections.

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24 mars 2021 à 20:48

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