Omar Sy en Arsène Lupin : plus cambrioleur que gentleman ?

Ça y est, la bande-annonce est désormais en ligne et Omar Sy sera donc le prochain Arsène Lupin, dans une série française de cinq épisodes destinée à être diffusée, l’année prochaine, sur Netflix. Enfin… Sy dans le rôle de Lupin, le compte n’y est pas tout à fait, puisqu’il y incarne seulement un personnage du nom d’Assane Diop qui, pour venger son père, retrouvé mort après un crime dont il était innocent, va s’inspirer des méthodes du héros de Maurice Leblanc pour laver l’honneur de sa famille.

Pourquoi pas, après tout : Arsène Lupin est tombé dans le domaine public depuis 2012. Il est, depuis, un héros de mangas, devenu véritable icône populaire au Japon, après avoir été incarné à de multiples reprises, souvent de manière inattendue, au théâtre comme au cinéma : en Angleterre, il a droit à un film, en 1916, puis un deuxième en Hongrie, en 1921, et un autre au Japon, deux ans plus tard. Et ça ne s’est pas arrêté depuis. Personnage éminemment franco-français, le gentleman-cambrioleur est donc devenu, depuis belle lurette, figure universelle. Alors, Omar Sy, pourquoi pas, encore une fois ?

Seulement voilà, il n’est pas besoin d’être grand clerc pour y voir clair, sachant que c’est le même brouet antiraciste qu’on nous ressort déjà. D’où la polémique qui n’en finit plus de déchaîner les réseaux sociaux. En juin 2020, citée par France 3 Normandie, une certaine Barbara78 tweete : « Omar Sy débarque à Étretat pour le tournage de la série Arsène Lupin ! Admirable courage que d’affronter ce pays raciste qui ne lui a donné aucune chance ! » C’est probablement la raison pour laquelle ce « pays raciste » en a fait l’un des Français les plus populaires du pays. Assez logiquement, bazinjulien3 rétorque : « Arsène Lupin interprété par Omar Sy… à quand Mohamed Ali interprété par Jean-Paul Rouve ? » Non sans humour, Eden rétorque, de son côté : « Arsène Lupin le plus grand des voleurs ok mais… Arsène Lupin voleur noir ça ne devient pas raciste comme cliché quand il est joué par Omar Sy ? »

Comme pour James Bond, les belles âmes affirmeront qu’il faut bien que les mentalités évoluent. À celles-là, on fera remarquer qu’en son temps, Louis Malle et son film, La Petite, en 1978, sut lui aussi "faire évoluer" d’autres mentalités, relatives au placement des fillettes de douze ans dans les bordels. À croire que la vérité médiatique d’un jour n’est pas celle de toujours et que le buzz progressiste provoqué par ce casting destiné à épater un bourgeois que plus rien ni personne ne sauraient épater pourrait bien faire flop demain.

D’ailleurs, si les Français ont fait un triomphe à Intouchables, où Omar Sy partageait le haut de l’affiche avec François Cluzet, ils ont boudé un peu plus tard sa relecture du Knock de Jules Romains. Les Français étaient-ils devenus racistes entre-temps ou le film était-il simplement mauvais ? Comme quoi l’antiracisme à front de gnou ne saurait tout expliquer.

Pour en revenir à ce nouvel Arsène Lupin, pourquoi ne pas laisser sa chance au produit, tel que prétendu dans La vérité si je mens ? Vous savez, cette trilogie dans laquelle un acteur juif, Richard Anconina, interprétait un goy, tandis que d’autres acteurs goys, Gilbert Melki, Bruno Solo et Vincent Elbaz, campaient des personnages juifs sans que personne ne piaille pour autant à l’antisémitisme ou la réappropriation culturelle.

Pour se rincer la cervelle, il n’est donc pas interdit de réécouter Jacques Dutronc tout en pensant à Georges Descrières qui, pour passablement replet qu’il fut, faisait, lui, plus gentleman que cambrioleur, au contraire de son actuel successeur.

Nicolas Gauthier
Nicolas Gauthier
Journaliste à BV, écrivain

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