Non, Jean-Pierre Denis, Macron n’est pas « le moindre mal » pour un chrétien !
La lecture de l’éditorial de Jean-Pierre Denis, directeur de La Vie, daté du 23 avril, m’a plongé dans la perplexité. Il appelle clairement à voter Macron avec des arguments que je trouve inconsistants et contradictoires. Je cite : "Il sera temps, le scrutin passé, de résister aux possibles mauvais génies du macronisme, et notamment à ce libéralisme sociétal qui promet et promeut trop d’inquiétantes merveilles. […] Même si le projet d’Emmanuel Macron peut soulever de fortes interrogations sur sa gauche comme sur sa droite, celui de Marine Le Pen entraînerait la France dans le déclin et le chaos. Même si ce que représente Emmanuel Macron peut laisser les chrétiens dubitatifs, ce que porte Marine Le Pen s’oppose fortement à ce que nous comprenons de l’Évangile." Que d’allusions et de non-dits en si peu de mots !
Il nomme le danger intrinsèque que représente le libéralisme sociétal de Macron, dans la stricte continuité de la politique Hollande/Taubira. La physionomie intellectuelle et morale des mentors de Macron - Attali, Minc et Bergé en tête - révèle que cette dimension n’est pas anecdotique dans sa vision de l’homme et de la société.
Mais tout cela est balayé avec confiance, et naïveté, parce que Macron représenterait un moindre mal face à Le Pen qui mènerait la France au "déclin et au chaos". Est-ce une allusion à sa politique économique et européenne ? Ou au "repli" identitaire et xénophobe qu’elle serait censée incarner ? Nous ne le saurons pas, mais nous sommes avertis que Macron et Le Pen ne sont pas des dangers comparables. L’une s’oppose à l’Évangile, l’autre ne laisse que "dubitatif". Jean-Pierre Denis pourrait-il citer une seule mesure du programme présidentiel de Le Pen qui soit contraire à la Doctrine sociale de l’Église ? Sauf à considérer que l’Évangile se résume à de vagues valeurs républicaines, l’Église a toujours considéré que l’activité politique doit être déterminée par la vertu de prudence et mesurée par la conscience droite du bien humain dans sa dimension personnelle et communautaire. Jean-Pierre Denis raisonne selon le logiciel des années 1990, ce qui l’empêche de voir que le libéralisme sociétal est l’enjeu fondamental des décennies à venir. Or, cet enjeu de civilisation, même s’il ne s’y réduit pas, a une dimension politique essentielle. En appelant à faire barrage à Le Pen, il est l’idiot utile du pire libéralisme, qu’il critique par ailleurs. Les deux versants du libéralisme, sociétal et économique, sont indissociables et incarnent une même logique d’illimitation mortifère.
Il est étonnant qu’un catholique honnête et intelligent comme Jean-Pierre Denis ne perçoive pas que l’extension de la PMA à toutes les femmes qui le veulent et les ambiguïtés sur la GPA sont des mesures que la conscience chrétienne ne peut en aucun cas favoriser par son vote, comme l’a rappelé le cardinal Ratzinger dans une Note doctrinale sur l’engagement des chrétiens dans la vie politique (2002). Utiliser l’argument du soi-disant moindre mal que serait Macron est une manière de se défausser de toute responsabilité face à des choix de civilisation libérale libertaire dont ce candidat hors-sol est porteur. Quand Jean-Pierre Denis viendra se plaindre de telle ou telle mesure "sociétale" ou sociale, il sera trop tard.
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