Ce qu’il y a de bien, avec la polémique Obono-Valeurs actuelles, c’est d’abord que ça nous sort du débat sur les masques. Ensuite, que cela offre des polémiques dans la polémique. Un peu comme dans une guerre de position où chacun campe sur les siennes : de temps en temps, ici ou là, une petite escarmouche sans conséquence majeure pour la suite du conflit vient animer le paysage. Des polémiques minuscules voient ainsi le jour, remettant une pièce dans le nourrain.

Un exemple. Jordan Bardella, vice-président du Rassemblement national, déclare, lundi, sur LCI : « Les dessins sont de mauvais goût, mais je ne participerai pas au concert de pleureuses organisé par LFI. Danièle Obono est une militante indigéniste, obsédée de la race. Un jour elle a “mal à sa France”, un autre elle signe une pétition “nique la France”. » Propos que le député européen reprend sur son compte Twitter.

Jean-Luc Mélenchon – ou l’un de ses assistants détenteurs du feu nucléaire de poche de l’Insoumis en chef – réagit aussi sec : « Pourquoi monsieur Bardella met-il “pleureurs” au féminin pour dénoncer ceux qui soutiennent Danièle Obono ? Le féminin est un mode plus dépréciant ? Sexisme et racisme sont cousins germains, monsieur Bardella. » C’est vrai, ça, pourquoi ? Il y a bien des saules pleureurs ! Jordan Bardella aurait peut-être dû écrire ça en écriture inclusive. Cela aurait donné, sauf erreur de notre part, « le concert de pleureurs-euses » et basta ! tout le monde était content. Le féminin, « un mode plus dépréciant », demande Mélenchon ? Que dire, alors, du soldat ou du garde républicain veillant en sentinelle au fin fond du Sahel ou devant le palais de l’Élysée ? Se sentent-ils dépréciés parce que sentinelle est féminin ? Faut reconnaître que rechercher la polémique à la fourchette à escargot est un vrai métier.

Jean-Luc Mélenchon, qui se targue d’être un Méditerranéen, devrait pourtant savoir que le métier qui consiste à pleurer pour accompagner un convoi funèbre est quasiment réservé, depuis des millénaires, aux femmes. Je sais, Wikipédia n’est pas synonyme d’infaillibilité, mais que lit-on sur ce sujet crucial ? « Une pleureuse ou, plus rarement, un pleureur est une personne engagée pour feindre le chagrin lors de funérailles, afin de faire paraître plus important l’hommage au défunt. » Mon vieux Larousse de la fin du XIXe siècle m’explique, d’ailleurs, que cette tradition des pleureuses à gages remonte à la plus haute antiquité : Égypte, Grèce, Rome. Tradition que l’on retrouvait en Sicile, en Corse et qui perdure encore aujourd’hui en Afrique. Jean-Luc Mélenchon, féministe à ses heures perdues, devrait aller expliquer la parité aux pleureuses de Côte d’Ivoire, une tradition transmise de mère en fille.

La question, maintenant, est de savoir si les pleureuses et pleureurs du moment feignent ou pas le chagrin et s'ils et elles iront jusqu'à s'arracher les cheveux, comme le veut la coutume.

Cet article a été mis à jour pour la dernière fois le 07/11/2023 à 11:02.

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01 septembre 2020 à 16:53

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