La ville de la Bonne Mère, il la connaît par cœur. Arrivé à l’âge de sept ans sur la Canebière, le futur archevêque de Marseille y a passé son enfance et a grandi dans un quartier populaire : « Nous habitions les quartiers nord, à Saint-Barthélemy, dans une cité HLM pour agents de la SNCF », écrit-il, dans une lettre, la veille de l’arrivée d’Emmanuel Macron. « Les cités avoisinantes avaient des noms poétiques : Font-Vert, La Busserine, La Marine bleue et La Marine blanche, Les Rosiers et les Marronniers. » Mais ça, c’était avant. Aujourd’hui, le charme s’est évanoui et le drame y a pris toute la place. Mgr Aveline décrit l’oisiveté et l'agressivité, la laideur et la peur : « Mafias meurtrières et sans scrupule [qui] transforment la jeunesse des quartiers pauvres en chair à canon pour trafics en tous genres : armes, drogues, prostitution, etc. »

Alors, tandis que caméras et micros sont tournés vers la cité phocéenne, il lance un appel pressant : « Marseille reste fière mais elle est meurtrie : d’un côté, elle continue de sourire pour charmer les touristes et se distraire au stade ; de l’autre, elle s’enfonce dans la violence et pleure sa jeunesse. À quand un réveil des consciences ? » De même que se tiendra, du 3 au 11 septembre, le Congrès mondial de la nature à Marseille, il répond aux personnes soucieuses de la biodiversité : « Rien ne sert de s’émerveiller devant la beauté de la nature si l’on ne sait pas s’indigner quand une vie humaine est bafouée. »

« L'espérance est invincible »

Si l’archevêque dénonce les ghettos, la criminalité et l’ensanglantement des quartiers, il veut porter également un « message où la détresse se mêle à l’espérance ». Il connaît les dangers mais aussi la pluralité culturelle et religieuse de Marseille. Mgr Aveline, natif de Sidi Bel Abbès, en Algérie, sait parfaitement que, dans cette ville cosmopolite où la présence de l’islam rigoriste est grandissante, dans « cette petite Église atypique qui ressemble à celle du Maghreb » telle qu’il la qualifie lui-même, le dialogue interreligieux est indispensable. Alors l’Église maintient sa présence par des communautés ou des associations telles que le Rocher. « Il faut être là. Il faut partager les difficultés liées au transport, à l’éducation, à l’habitat. L’Église n’est pas là pour donner des leçons, elle est là pour partager la vie », explique-t-il, dans La Croix.

La mort du père Maire nous a rappelé cet enseignement exigeant, parfois difficile à comprendre : le devoir du politique est de protéger le citoyen, celui de l'Église de s'occuper des pauvres. Au politique, donc, de traiter les questions d’insécurité, de délinquance et d’immigration, à l’évêque de répondre que « l’espérance est invincible, quand elle est portée par des hommes et des femmes de bonne volonté, quelles que soient leurs religions ou leurs convictions ».

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02 septembre 2021 à 15:00

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