Marseille : Emmanuel Macron a à peine tourné les talons que cela chauffe déjà à Frais-Vallon…
Frais-Vallon. On dirait un rosé du terroir que l’on boit, les soirs d'été, sous la treille. Ce quartier du 13e arrondissement de Marseille doit son nom, dit-on, aux demoiselles Vallon qui vivaient là, jadis, et au mistral qui y souffle souvent. Un nom qui respire la quiétude. Ou l'humour noir.
Les pieds-noirs auxquels Gaston Defferre, dans les années 60, avait destiné ces cités sont partis depuis longtemps.
Dans la nuit du 6 au 7 juillet, au pied d’un immeuble, un homme y était abattu par un tir en pleine tête. Énième règlement de comptes.
Aujourd’hui, des policiers ont été attaqués et frappés alors qu’ils procédaient à une arrestation. Une dizaine d’individus ont ainsi permis à un dealer qui venait d'être menotté de s’enfuir.
Un camouflet qui sonne comme une provocation alors qu’Emmanuel Macron vient à peine de tourner les talons. Loin de leur avoir fait peur, on pourrait croire qu’il les a galvanisés. Il y a moins de quatre jours, le Président affirmait que « les quartiers nord de Marseille étaient une chance ». Pas faux. Le dealer a en effet une sacrée veine d'être doté de tels copains. Une belle preuve d'amitié. Ou d’intérêts juteux communs.
« Il n'y a pas de zone de non-droit dans notre pays, il y a des endroits difficiles », affirmait, le 19 août, sur BFM TV, Gérald Darmanin qui a dû voir, dans sa jeunesse, Le Père Noël est une ordure : « Thérèse n’est pas moche, elle n’a pas un physique facile. »
« Il n’y a pas de zone de non-droit à Marseille », répétait, en écho, Frédérique Camilleri, la préfète de police des Bouches-du-Rhône, sur la même chaîne, le 24 août.
« Il n’y a pas de zone de non-droit », avait déjà assené, en février 2015, le ci-devant Premier ministre Manuel Valls, en visite à Marseille quelques heures après les tirs de kalachnikov survenus dans la cité de la Castellane, dite « la cité interdite ». Sans doute y trouve-t-on, comme à la cité des Rosiers, de ces fameux check-points qui ont tant fait couler d'encre, ces jours derniers. Sur Europe 1, un habitant témoigne : « Il y a des guetteurs en permanence, qui regardent qui entre et sort. C’est une frontière, un pays dans le pays. » Des trafiquants intelligents et prudents qui donnent, en somme, des leçons de souveraineté au président de la République : garder la maîtrise d’un territoire, c’est garder ses frontières.
Mais les zones de non-droit, à Marseille, sont un peu comme le physique ingrat de Thérèse : les réfuter, c’est déjà, en creux, les reconnaître.
L’expression « C’est le Bronx » est passée dans le langage courant. Dira-t-on, bientôt, sur le même ton, « c’est Marseille » ? Dans certaines parties du monde, c’est peut-être imminent.
Le site Marsactu.fr rapporte que Viktor Orbán, venu à Marseille en 2011 à l’occasion du XXe congrès du Parti populaire européen, a eu l’occasion, durant quatre jours, de visiter la ville. Mais pas avec les lunettes roses d’Emmanuel Macron. De ce séjour édifiant, il se sert désormais de contre-exemple - c’est Alain Finkielkraut qui l’a raconté en premier - et d’argument de campagne : « Imaginons qu’un parti de gauche ait mis en place un gouvernement en 2014, en un ou deux ans on ne reconnaîtrait plus notre patrie […], on ne reconnaîtrait plus la Hongrie, on serait comme un grand camp de réfugiés, une sorte de Marseille d’Europe centrale. »
Pas sûr que la visite triomphale d'Emmanuel Macron, dont la postface sonne comme une humiliation, soit de nature à le faire changer d'avis sur la question.
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