Marianne et Némésis : convergence d’un contre-féminisme ?

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De façon fortuite mais emblématique, on a assisté, dimanche, à l’émergence, sur deux fronts différents - la bioéthique et l’islamisme -, d’un contre-féminisme porté par de très jeunes femmes.

Les premières sont les Mariannes de la manifestation Marchons enfants ! contre le projet de loi dit « bioéthique » : toutes de noir vêtues, ceintes d'une écharpe tricolore et coiffées du bonnet phrygien, elles poussaient un Caddie™ rempli de poupées, brandissaient des billets de banque. Elles dénonçaient la marchandisation du corps de la femme. Mon corps, leur fric.

Les deuxièmes appartiennent au mouvement Némésis : couvertes d’une burqa, elles sont venues place du Trocadéro dérouler une large banderole au slogan explicite : « Les Françaises dans 50 ans ? »

Rien de concerté, d’un côté des milieux dits conservateurs, de l’autre une mouvance identitaire, mais il y a une nette convergence dans la dénonciation commune : celle d’un féminisme institutionnel et idéologique qui a abandonné depuis longtemps la femme en rase-campagne.

Des happenings féministes elles ont compris les codes, mais leur action est aujourd'hui infiniment plus transgressive que celle des Femen, dont l’exhibition du corps masque le conformisme de la pensée.

On pourrait écrire une encyclopédie en dix volumes des démissions féministes, de leurs lâchetés schizophrènes, de leurs incohérences décomplexées. N’en citons que trois, d’actualité.

Quelle officine féministe ayant pignon sur rue pour protéger les femmes quand elles doivent, au péril de leur vie, louer leur utérus comme Fantine vendait ses cheveux, s'y laissant implanter un embryon fécondé avec l’ovocyte d’une autre afin que, troublées par cette fragmentation de la maternité, elles fassent taire dans leur cœur, durant leur grossesse, toute velléité de garder le bébé ? Et qu’ainsi leur exigeant client - souvent un mâle bourgeois blanc, mais là, on ne le soulignera pas - ne soit pas inquiété.

Quelle féministe reconnue pour les défendre dans le sport quand, à peine arrivé à la Maison-Blanche, Joe Biden a signé un décret appelant les écoles à inclure les transgenres dans l'équipe sportive de leur choix ? Rien n'empêche plus un transgenre de se mesurer au 100 mètres avec une femme. Et l’on sait tout le poids de ces disciplines dans les écoles américaines : pour décrocher une bourse, intégrer une bonne université…

Mais la faction politique à laquelle le féminisme agréé est inféodé ne s'attaquera jamais aux revendications LGBT+. La femme peut crever.

Qui pour s’inquiéter de la montée de l’islamisme, de celle de la polygamie, montrée en exemple par Assa Traoré, implicitement dédramatisée par Camélia Jordana qui assure tranquillement, sur le plateau de Laurent Ruquier, que la rivalité entre femmes a été inventée par l’Occident ? Pourquoi se gêner !

Sans doute ne lit-elle pas ? Même pas le dernier Goncourt des lycéens qui est donc à la portée, pourtant, d’un adolescent de 15 ans : dans Les Impatientes, la Camerounaise Djaïli Amadou Amal décrit un univers de violence, de désespoir et de rancœur… « Nos rivalités de coépouses non seulement ne connaissent jamais de fin, mais même une trêve est impossible car chaque rivale attend impatiemment la faille pour déstabiliser son ennemie », écrit l’une des héroïnes. Son mari l’admoneste : « Serais-tu plus sage que le Tout-Puissant qui a autorisé les hommes à avoir jusqu’à quatre épouses ? Es-tu plus importante que les épouses du prophète qui ont accepté dignement cette polygamie ? »

Mais la faction politique qui tient le féminisme sous tutelle ne dénoncera rien qui puisse, de près ou de loin, froisser son électorat des banlieues. La femme peut continuer à baisser la tête et pleurer de rage.

Marianne ou Némésis, ces jeunes filles sont seulettes, conspuées sur les réseaux sociaux. Mais bien déterminées. La prise de conscience de l’imposture féministe aurait-elle symboliquement commencé ?

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Gabrielle Cluzel
Directrice de la rédaction de BV, éditorialiste

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