Mannequins empalés, effigies brûlées… : une longue tradition de la gauche

Capture d’écran (1822)

En dégainant le 49.3 pour imposer sa réforme des retraites, le gouvernement a sciemment mis le feu aux poudres. La mèche peut être longue à se consumer avant l’explosion, mais on sent bien que le feu couve. Les gueux sont de sortie et se donnent rendez-vous chaque soir pour le charivari.

Dans une rodomontade inepte destinée à justifier le passage en force, Mme Borne, notre Premier ministre, s’en est prise aux élus. Ceux de la NUPES, et particulièrement de La France insoumise, qui ont transformé l’Assemblée en écurie, et ceux du RN, accusés d’être trop sages, trop polis et trop bien habillés. Un comble.

Alors, ça dégénère, forcément, et l’on s’inquiète en haut lieu de voir la France des mécontents se retrouver chaque soir pour protester contre le roi du mépris Macron II. La peur gagne les élites qui voient leurs effigies incendiées sur les places.

Ainsi à Paris, vendredi dernier, où un Macron de carton a brûlé dans un grand feu de joie, place de la Concorde. À Dijon, le même soir, des pantins à l’effigie du Président Macron et de ses ministres Borne, Véran et Dussopt ont été brûlés. La mise en scène filmée par le quotidien local Le Bien public montre les représentations arrosées d’essence puis enflammées sous les vivats des manifestants de FO et de la CGT. De même à Foix, dans l’Ariège, où l’on a brûlé une effigie de Macron et Borne.

Le ministre de l’Intérieur a vivement réagi. « Les places des églises et des villages, ne sont pas des ZAD », a-t-il lancé sur RTL. Il a assuré que le gouvernement « ne laissera[it] pas faire [...] des manifestations spontanées et le n'importe quoi à tout moment ». Allusion au « Paillassou », figure niçoise issue du Carnaval, cette année à l’effigie d’Éric Ciotti, balancée devant sa permanence pour dénoncer la collusion des LR et du gouvernement. En conséquence de quoi, Aurore Bergé, patronne du groupe Renaissance à l’Assemblée, a demandé à Gérald Darmanin de « mobiliser les services de l'État pour la protection des parlementaires ».

Tout cela n’est jamais que la réponse du berger à la bergère. Comme l’a résumé de façon imagée Marine Le Pen, sur RTL, lundi matin, « le gouvernement joue avec des allumettes dans une station-service ». Et ça flambe de plus en plus souvent.

On l’a oublié parce que le Covid est passé par là, mais après un 1er mai émaillé de violences se tenait, le 5 mai 2018, « La Fête à Macron ». C’était place de la Concorde, sur une idée de François Ruffin. Dans une mise en scène sans ambiguïté, des Insoumis promenaient l’effigie du Président. Un mois plus tôt, le 7 avril 2018 à Nantes, des manifestants cheminots et des étudiants pendaient l’effigie du chef de l'État à une potence avant de le frapper et d'y mettre le feu. Le 19 avril, au Havre cette fois, c’était le Premier ministre Édouard Philippe et le PDG de la SNCF Guillaume Pepy qui voyaient leurs représentations brûler en place publique. Manuel Valls avait vu brûler la sienne en 2016, lors des protestions contre la loi Travail…

On n’avait pas vu cela depuis la pendaison d’un mannequin de Pompidou en mai 1968. Sauf…

Sauf en 1990 où, par une manipulation inique du gouvernement socialiste, son ministre de l’Intérieur, Pierre Joxe, va imputer la responsabilité des profanations du cimetière de Carpentras au Front national. Le 14 mai, une manifestation monstre sera organisée à Paris, rassemblant tous les partis politiques de droite et de gauche, les « autorités morales », le clergé, les enseignants, les étudiants, les enfants des écoles amenés en rang par deux, le show-biz et l’Université, les médecins et les magistrats, tous défilant derrière l’effigie de Jean-Marie Le Pen empalé sur une pique. Assurément, il y avait, ce jour-là, dans les rangs des manifestants, les Macron, Borne, Ciotti, Véran, Dussopt et tant d’autres… Le temps rejoue la pièce, mais les acteurs ont changé de rôle.

Marie Delarue
Marie Delarue
Journaliste à BV, artiste

Vos commentaires

5 commentaires

  1. Mais le plus grave, ce n’est pas la retraite à 64 ans car aujourd’hui la grande majorité des retraites sont prises vers 63 ans et demi. Non le plus grave, c’est que dans un pays majoritairement de droite, la population réponde favorablement aux mots d’ordre des syndicats de gauche voire d’extrême gauche, en particulier la CGT, et descende dans la rue derriere eux, jusqu’où ? Ainsi Macron l’irresponsable et sa clique de nantis « croqueurs de diamants » ont réussi ce tour de force de redonner vie à la gauche moribonde et de faire renaître un PS totalement discrédité.

  2. Ça fait 40 ans que le gouvernement dis « qu’il ne laissera pas faire ». Et puis on a eu Stiven, ND des Landes, Nice, le Bataclan, les Gilets Jaunes, le Stade de France… et le gouvernement continue à « ne pas vouloir laisser faire ». Il veut tellement ne pas « vouloir laisser faire » qu’il provoque les incidents au lieu de calmer le jeu… On le voit aujourd’hui avec les retraites. Et notre brillant ministre de la Justice tonne : « Le gouvernement ne laissera pas faire »… Dupont-Moretti n’avait-il pas déclarer en riant à une journaliste il y a 2 ans :  » moi, ministre de la justice ? CE SERAIT LE BORDEL !  » … Et c’est justement cet homme là que Macron a choisi… parce que Macron lui, il « laisse faire »… il va en boîte à Kinshasa…

  3. Les mêmes qui mettent aujourd’hui le feu aux mannequins de la macronie n’avaient qu’une hâte, l’an dernier, celle de mettre un bulletin Macron dans l’urne. Pitoyable …

  4. qui se souvient de cette manipulation de 1990, qui précède les cortèges « spontanés » de 2002, alors que le spectre de l’extrème droite n’était… qu’un spectre, justement (dixit Jospin), et qui en a tenu rigueur au PS ?

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