Macron reçoit Rihanna plutôt que les travailleurs de l’ombre que sont les policiers

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Alors que la guerre fait rage à l'Assemblée nationale à l'occasion de la discussion du projet de loi sur la moralisation de la vie politique, Jupiter, dans son firmament élyséen, reçoit des stars du show-biz. C'est ainsi que Bono, le mythique leader du groupe U2, et Rihanna, dont les lecteurs du magazine Lui ont découvert, il y a peu, les charmes, ont eu l'occasion, dans le cadre de leurs fondations respectives en faveur de l'éducation, de rencontrer le chef de l’État.

Le choix de ces deux personnalités n'est cependant pas sans poser certaines questions. Tout d'abord, pourquoi eux ? N'existe-t-il pas des milliers de personnes, certes moins connues, mais tout aussi méritantes, qui se dévouent au quotidien au sein d'associations ou de fondations, œuvrant pour les mêmes causes ? Ensuite, cette surexposition médiatique de notre Président ne viendrait-elle pas tenter de redonner quelques couleurs à une image fortement ternie après l'épisode de Villiers ? Enfin, sa baisse brutale dans les sondage (moins dix points en seulement deux mois) n'a-t-elle pas poussé ses spécialistes de la communication à faire diversion en cette période de chaleur estivale ?

Qu'elles qu'en soient les raisons, cette démarche politicienne et mercantiliste n'a pas échappé à un syndicat de police qui, las de ne pas être entendu par le Président, a fait passer une annonce afin de demander le soutien d'une star afin de porter le message revendicatif des policiers. En effet, ces derniers, qui voient eux aussi leur budget menacé - une coupe de 500 millions d'euros étant annoncée pour le ministère de l'Intérieur -, auraient voulu entendre de la bouche même de celui qui ne tarissait pas d'éloges en faveur des militaires et des policiers lors de sa campagne électorale à quelle sauce ils allaient être mangés.

Pour l'heure, aucune star ne s'est manifestée. Il est vrai que peu d'entre elles sont susceptibles de porter le message des forces de l'ordre, ce type de démarche n'étant pas vraiment dans leur ADN. Passe de voir gendarmes et policiers en parade lors du festival de Cannes, mais de là à les soutenir, fût-ce du bout des lèvres, il ne faut pas en demander trop.

Policiers et militaires devront donc se résigner. Ils auront à subir sans sourciller le sort que "le chef" leur a réservé, et se contenter, pour les années à venir, d'un menu budgétaire plus proche du brouet que du menu de fête pourtant annoncé. Ainsi, le budget des armées à 2 % du PIB est-il repoussé aux calendes grecques. Quant au plan d'urgence pour la police décidé par le précédent gouvernement, sans doute sera-t-il, selon une expression chère à ceux qui nous gouvernent, sérieusement raboté.

Mais, au fait, que sont venus chercher Bono et Rihanna à l’Élysée ? L'admiration de notre jeune Président, ils l'avaient vraisemblablement déjà. Une publicité avantageuse, ils n'en n'avaient pas besoin. Alors, quelques subsides pour leurs activités caritatives ? L'avenir nous le dira peut-être.

Il n'en demeure pas moins que la morale de cette histoire nous révèle qu'il est plus facile d'avoir l'oreille des puissants lorsque l'on brille soi-même de mille feux. Et qu'à cet égard, les travailleurs de l'ombre que sont les militaires et les policiers ne remplissent pas les conditions nécessaires pour que leurs messages soient entendus. À eux la précarité des casernements et la vétusté des matériels qui restent, faute d'argent, dans les garages ou cloués au sol. À eux, aussi, les horaires et les missions qui s'ajoutent jusqu'à l'épuisement, les honneurs ne leur étant réservés qu'à l'occasion de cérémonies funèbres. Mais tout cela ne vaut pas une réception à l’Élysée !

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Olivier Damien
Conseiller régional de Bourgogne-Franche-Comté, Commissaire divisionnaire honoraire

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