Loi sur l’antifascisme : le paravent de l’incapacité du gouvernement italien
À l'instar de l'Empire byzantin qui, voyant sa fin approcher avec l'avancée des Ottomans, se perdait en discussions sur le sexe des anges, les dirigeants d'une Europe occidentale en pleine crise économique, en proie à une immigration de substitution et un terrorisme endémique, se focalisent sur des règles ne concernant qu'une poignée de personnes : les lois sociétales et mémorielles. Celles-ci leur permettent non seulement de détourner l'attention des électeurs sur leur incapacité à trouver des solutions aux problèmes ci-dessus énoncés, mais aussi d'entretenir le clivage gauche/droite, dont l'obsolescence est devenue évidente avec l'attrait grandissant pour les partis dits « populistes ». En outre, elles ne coûtent rien.
C'est ce qu'il se passe en Italie, où le projet d'une nouvelle loi sur l'antifascisme (il y en a déjà deux) a saturé l'espace audiovisuel des dernières semaines. Jusqu'à présent, seul le fait de vouloir reformer le Parti Fasciste, ou d'en faire la propagande à des fins subversives et antidémocratiques, était sanctionné.
Le nouveau texte, promu par le député Emanuele Fiano (proche de Matteo Renzi), prévoit des peines allant de six mois à deux ans de prison pour "quiconque diffuse les images ou les contenus propres au parti fasciste ou au parti national-socialiste allemand", les peines devant être augmentées d'un tiers en cas de publications sur le dernier espace de liberté : Internet. Outre les gadgets à l'effigie du Duce, ce sont les actes et les idées individuels qui sont interdits.
Si cette disposition devenait effective (elle doit encore être votée au Sénat), elle mettrait à mal la liberté d'opinion pourtant garantie par l'article 21 de la Constitution italienne "Tout individu a le droit de manifester librement sa pensée par la parole, par l’écrit et par tout autre moyen de diffusion" et l'article 19 de la Déclaration des droits de l'homme "Tout individu a droit à la liberté d'opinion et d'expression, ce qui implique le droit de ne pas être inquiété pour ses opinions". Cela n'a pas échappé aux députés du Mouvement 5 étoiles, de la Ligue du Nord et de Forza Italia, qui ont voté contre.
Elle présenterait, de plus, un autre avantage pour son auteur, à savoir censurer ses opposants, puisqu'elle arrive à un moment où le mouvement CasaPound, héritier décomplexé de la politique sociale et héroïque du fascisme, est en passe d'augmenter son score aux prochaines élections.
Si, de l'étranger, la tentative de réhabilitation d'un idéal politique tant diabolisé semble ardue, il faut rappeler au lecteur français que le fascisme italien, trop facilement associé au national-socialisme allemand, a une tout autre signification dans son pays d'origine, où il n'est pas un synonyme réducteur de totalitarisme. Son corpus idéologique - organiciste, anticapitaliste, corporatiste -, comme ses réalisations - instauration de la Sécurité sociale (assurance retraite, chômage, protection des invalides, abaissement du temps de travail hebdomadaire à 40 h...), lutte contre l'analphabétisme, éradication de la mafia, réforme bancaire - jouissent encore d'un écho favorable dans une large frange de la population. Et le principal reproche qui lui est fait, la promulgation des lois raciales de 1938, est tempéré par la présence de Juifs parmi les fondateurs et hauts dignitaires du fascisme[ref]En 1921, 9 députés juifs fascistes sont élus dont Aldo Finzi. Ettore Ovazza, banquier et homme d’affaires, membre du Parti national fasciste, anime le journal La Nostra Bandiera (« Notre drapeau »), dans lequel est affirmé le soutien des Juifs italiens au nouveau régime.[/ref].
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