À chacun ses passions. Celle d'Élisabeth Revol, c'est l'alpinisme. Mais attention, pas n'importe lequel : celui de l'extrême, et dans des conditions extrêmes. Le Nanga Parbat, par exemple, à 8.126 mètres, en plein hiver, sans corde fixe, sans sherpa, sans oxygène. Son coéquipier n'en a pas réchappé, elle a été sauvée. Et elle est très "en colère".

Résumé des faits. Le 25 janvier, à 7.450 mètres d'altitude, Élisabeth et Tomasz Mackiewicz se trouvent en très grande difficulté. Tomek, le surnom du Polonais, est tombé dans une crevasse et les conditions météo sont devenues épouvantables : moins 30 °C et des rafales à 95 km/heure. Engelures, cécité des neiges pour cause de non-port de lunettes, les alpinistes envoient un premier message de détresse. Branle-bas de combat sur les réseaux sociaux et GoFundMe, en quelques heures, récolte une cagnotte de 75.000 euros "pour décider les autorités pakistanaises à envoyer des hélicoptères", rapporte Marianne.

Le mauvais temps n'aidant pas, les secours demandent à Élisabeth d'essayer de descendre, seule, à 6.000 mètres, où elle sera trouvée par quatre alpinistes polonais qui effectueront 1.000 mètres d'ascension, en pleine nuit, sans corde fixe, en un temps record. Dès lors, il faut se rendre à l'évidence : en raison d'une proche tempête de neige, les chances, plus tard, de retrouver Tomek vivant s'avèrent nulles.

"On se découvre dans la souffrance", se raconte la prof de gym drômoise. C'est chose faite : des doigts gelés et le risque d'amputation d'un pied, Élisabeth a voulu, elle n'a pas pu, elle a perdu. Mais elle est en vie. Et "en colère", donc.

En colère à cause "des mensonges", de la "lenteur des secours pakistanais", de leur surenchère de "cash" pour mettre en route le sauvetage, parce qu'en ne jouant pas "contre la montre", ils n'ont pas tenu compte du temps si "précieux" en montagne. En gros, Élisabeth Revol accuse les Pakistanais de mauvaise volonté. Probable, mais, en même temps, c'est le Pakistan. L'un des pays les plus corrompus du monde. En conséquence de quoi, la moindre démarche effectuée dans ces contrées prend un temps fou. Et elle n'y aurait pas pensé ?

Ils sont souvent ainsi, les sportifs de l'extrême. Prêts à tout pour vivre leur passion. Prêts à en démultiplier les écueils afin d'augmenter leur taux d'adrénaline, leur source de plaisir, leur soif inextinguible de reconnaissance. Le dérangeant, quand on écoute l'alpiniste sauvée par les pilotes pakistanais et les alpinistes polonais ? La mise en avant de la responsabilité collective et non de sa responsabilité individuelle.

Car, enfin, elle n'est pas novice ! Depuis le temps qu'elle s'embarque dans ces aventures de l'extrême, elle les connaît bien, les risques ! Le surnom du Nanga Parbat ? "Montagne tueuse" ! Une montagne qui a déjà eu la peau de plusieurs dizaines d'alpinistes, en plus ! Mais non, tout se passe comme s'il y avait refus, voire impossibilité d'assumer ses responsabilités personnelles. Ni même d'en prévoir les conséquences.

Ils sont souvent comme ça, ces sportifs qui ne conçoivent pas leur passion autrement qu'en tutoyant la mort : d'un égoïsme forcené, bouffis de suffisance et d'orgueil à vouloir, par tous les moyens, se démarquer du commun des mortels, dotés d'une mentalité à faire payer la collectivité en cas de pépin avéré. Sans aucun scrupule à mettre dans l'embarras, pire, à faire prendre des risques à leurs sauveteurs. Prêts à remuer la Terre entière pour leur petite personne. Parce qu'elle le vaut bien. La preuve : avec un précédent coéquipier mort lors de leur ascension de l'Anapurna, pas encore guérie, elle envisage... de repartir.

Alors, l'indécente colère d'Élisabeth Revol... on s'en passerait bien !

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11 février 2018 à 14:36

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