Le 23 juin dernier, Le Figaro publiait un entretien passionnant entre le philosophe – et père de famille nombreuse – Fabrice Hadjadj et l’essayiste Antoine Buéno. Ce dernier n’a pas hésité à ressortir les plus vieilles ficelles du discours écolo en adoptant un discours catastrophiste, violent et anxiogène : il y explique par un grossier sophisme qu’avoir une famille nombreuse « doit être considéré comme un comportement d’indifférence ou d’inconscience écologique ». Il établit ensuite une subtile distinction : il y a les bonnes familles nombreuses et les mauvaises familles nombreuses : « La naissance de neuf frères et sœurs en Suisse est une bien plus mauvaise nouvelle pour la planète que celle de neuf frères et sœurs au Burundi. En revanche, demain, ce sont bien les neuf frères et sœurs burundais qui subiront de plein fouet les effets du réchauffement climatique. » Ou quand, une fois encore, le discours moralisateur se pare de toutes les nuances de vert pour mieux faire avancer un projet politique. En effet, au problème du vieillissement de la population qui s’accompagne d’une chute de la natalité des pays occidentaux, et qui fait se poser, à - déjà ! - court terme, la question du financement des retraites et, plus largement, celle du bouleversement de l’écosystème politique, économique et social d’un pays, il propose des solutions… couleur pastèque : « Immigration, augmentation du taux d’emploi, partage du travail, mécanisation des tâches. »

Sa vision hors-sol, « mondialiste et fonctionnaliste » du lien entre démographie et écologie, se décline en une succession de perles : « Le taux de fécondité est inversement proportionnel au niveau d’instruction » (un grand classique malthusien) ou encore « On peut vivre sans retraite, pas sans écosystème ». À cela, le philosophe Fabrice Hadjadj répond avec une tranquille sérénité et lui révèle non sans humour quelques secrets bien gardés de la vraie vie des familles nombreuses : « Une famille nombreuse, même en Europe, ne consomme pas comme une addition de célibataires : elle n’en a pas les moyens, et la vitalité de son anarchie permanente la garde de recourir à la multiplication des divertissements. Son mode de vie est plutôt sobre et sédentaire. »

Ce qui retient particulièrement l’attention, ici comme ailleurs dans la pensée écologiste, c’est cet axiome selon lequel l’accroissement « catastrophique » de la population mondiale serait la cause principale du dérèglement climatique. Le bilan carbone des familles nombreuses serait quasiment un crime contre la nature, il conviendrait pour y remédier de réduire drastiquement les naissances.

Rien n’est plus faux dans ce « principe » qui a pourtant suffisamment la vie dure pour conduire certains écologistes à ne pas vouloir d’enfants.

Selon les projections démographiques, et notamment celles de l’ONU, la population mondiale va atteindre un plateau aux alentours de 2060, puis elle commencera à décroître. Emmanuel Pont, ingénieur et essayiste, auteur de l’essai Faut-il arrêter de faire des enfants pour sauver la planète ?, explique que l’hypothèse – Dieu merci, c’est une utopie ! – d’établir la politique de l’enfant unique en Europe ferait baisser de 19 % l’émission de gaz à effet de serre (GES), l’interdiction d’avoir plus de deux enfants 5 %, la suppression des allocations au-dessus de deux enfants 2 %. Mais fermer les centrales à charbon – oui, celles-là mêmes que nous sommes en train de rouvrir un peu partout en Europe - permettrait de réduire les émissions de GES de 18 %.

Et si l’on reste dans le pur domaine des chiffres, sans évoquer l’aspect totalitaire, monstrueux et profondément anti-naturel de cette culpabilisation des familles, nombreuses ou pas d’ailleurs, on peut évoquer Rémy Verlyck qui, dans une tribune intitulée « Pour sauver la planète, faites des enfants ! », explique que selon une étude financée par la Bill & Melinda Gates Foundation et publiée dans The Lancet en juillet 2020, lorsque nous aurons atteint ce plateau démographique avant d’entamer la descente vers la nuit démographique, « le vieillissement et la réduction de la population en âge de travailler entraveront la croissance économique mondiale et, par conséquent, les capacités de financement de l'innovation nécessaire à la transition écologique et solidaire. Plus surprenant encore, les taux de fertilité ne seront plus suffisants au renouvellement des générations dans 183 pays sur 195. »

À Antoine Buéno, pourtant surdiplômé, on peut donc répondre que les chiffres, eux, ne mentent pas !

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29 juin 2022 à 20:40

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35 commentaires

  1. Si cela pousse « certains écologistes à ne pas vouloir d’enfants », réjouissons-nous !
    Il y aura moins d’hurluberlus écolos parmi les prochaines générations.
    Ces écolos qui préfèrent les centrales à charbon, aux centrales atomiques, comme en Allemagne, le plus gros pollueur en Europe.
    Moins de Sandrine Rousseau pour nous pourrir la vie, même si quelque fois sa bêtise arrive à nous faire rire !

  2. Bonjour
    J’avoue avoir du mal à comprendre les chiffres qui nous sont fournis et qui tendraient à prouver que réduire la population serait inutile.
    Deux fois plus de population, c’est deux fois plus d’habitations à construire, à chauffer, deux fois plus de nourriture à produire, plus de déforestation, deux fois plus de transports, deux fois plus de déchets.
    Par ailleurs, éduquer correctement tous les enfants d’une famille nombreuse ne semble pas à la portée de tout le monde.

    1. Une seule chose vraie dans ce que vous dites : avoir une famille nombreuse n’est plus à la portée de tout le monde. Pour le reste, tout est une question de mesure et il n’y a rien de commun entre une population qui construit et une population qui détruit. C’est une question de civilisation de vie ou de civilisation de mort. Bien sur, si on considère que l’apparition de l’homme a été une catastrophe pour la planète, ce n’est même plus la peine de discuter.

      1. sans être une catastrophe, nier que sa mutation du règne animal au règne « humain », ainsi que sa prolifération anarchique, n’a aucune influence sur la survie de la planète me paraît utopique, une croissance infinie de l’humain ne pouvant s’opérer qu’au détriment d’autres composants de la vie terrestre et donc de la destruction de son équilibre naturel.

  3. Bon, il y a quand même une bonne nouvelle: si les écolos ne veulent plus faire d’enfants, on diminue le risque qu’ils se multiplient à moyen terme, et on aura la paix!

  4. Le manque de bon sens de tous ces écolos, aussi bien que certains « philosophes », est inquiétant! Soyons simples et admettons que le renouvellement d’une population puisse etre établi avec 3 naissances par couple. 2, serons le remplacement du couple à sa disparition et le troisième sera le remplacement des célibataires, religieux, couples non désireux d’enfants etc. Ainsi, pas de dépeuplement, la vie économique se maintient, les cotisations de retraites sont assurées…

  5. Le but essentiel : décourager les familles de race blanche de procréer pour les empêcher de transmettre . Encourager les nouveaux venus à faire ventres pleins pour opérer l’accélération de la destruction programmée de notre civilisation, le tout orchestré par le grand capital apatride.

  6.  » l’essayiste Antoine Buéno  » !! Essayiste en quoi ? En démagogie surement. Il pose le problème à l’envers dans le sens où il devrait prôner la limitation des naissances justement en Afrique et non sur le vieux continent qui, se meure à cause du manque de naissances, étouffé, bientôt, par l’immigration galopante de l’Europe.

  7. Discours aberrants et dangereux .Tout cela est faux .Lisez Gervais et Gérondeau .

  8. Certains écologistes ne veulent pas d’enfants ? Tant mieux ! Ils sont tellement c… qu’il vaut mieux qu’ils ne se reproduisent pas.

  9. Les familles nombreuses en France consomment peu dans un premier temps. Mais les enfants finissent par se disperser. Donc chacun leur logement, leur voiture. Bitumisation et réduction des sols…
    Finalement elles ont bien évidemment plus d’impact sur la planète que les autres ! C’est vrai aussi en Afrique….la pauvreté n’est pas synonyme d’absence de pollution.

  10. De toutes façons il faudra bien que la natalité diminue un jour. La France et les Français vivaient très bien lorsque sa population était de 50 millions ! Le repère : chaque pays doit être à même de nourrir sa population. Si tel n’est pas le cas, c’est qu’il y a sur-population.

  11. Notre planète n’ est pas extensible. On ne peut pas continuer dans drame indéfiniment une croissance de la population. On le voit bien a l’échelle de l Afrique. Il faut pour le moment freiner les naissances des familles nombreuses ( comme l’on fait les chinois), en commençant par les zones surpeuplées. Traiter le problème a la racine, et non pas traiter le problème en déversant les humains des zones surpeuplées dans d’autres zones moins surpeuplées, ce qui ne peut réduire le « réchauffement « .

    1. C’est pourtant un concept assez simple, et vous avez raison. On trouve ici beaucoup de gens qui n’ont aucune idée de ce qu’est une croissance exponentielle dans un monde fini. Ca va à la cata. Mais si on le dit on se fait allumer par tout un tas de gens qui pensent qu’on peut très bien vivre avec 10, 20 ou 30 milliards d’êtres humains sur Terre. La Nature ne leur donnera pas raison. Ceci étant, il faut réduire notre population et la première manière est de stopper l’immigration.

  12. Je ne sais dans quelles épluchures M.Pont a trouvé ses chiffres mais il lui faut savoir que – sans enfants- il n’est nulle croissance et que ce nos petits qui paieront à terme sa retraite. Qu’il aille chanter sa chansonnette en Afrique ! La Chine s’est essayée à l’enfant unique et a vu sa population se multiplier pourtant. Elle vit du CO2 d’anthracite au lieu de tirer son énergie des transformations atomiques, celles qui ont signé les 30 Glorieuses en France .

  13. On peut aussi répondre à monsieur Buéno, mis à part le fait que physiquement le CO2 n’est pas un gaz à effet de serre contrairement à la vapeur d’eau, mais qu’en plus l’accroissement du CO2 est un bienfait pour la nature et en particulier pour les plantes nutritives, ce monsieur ferait bien de réviser ses cours de biologie végétale.

  14. Que ce monsieur ne s’inquiète pas, d’autres populations ne s’embarrasseront pas des problèmes de la planète !
    Quant à la politique de l’enfant unique ou de la limitation des naissances comme en Chine , l’Inde, on en voit les résultats catastrophiques aujourd’hui, d’autant que dans ces pays, la fille considérée comme une bouche inutile était éliminée , sont en manque de femmes !
    Ces mâles en manque de femmes sont un danger pour nos filles !

  15. Écologiquement, je ne sais pas!
    Mais quand on sait qui sont les familles nombreuses actuellement, on ne peut que constater leur poids (mort) sur notre économie!

    1. Pour certains oui,comme le lapin de bobigny qui a 4 femmes et 47 gosses et surement 48 depuis le temps

    2. Oui. Il faut arrêter de subventionner les familles nombreuses en France, et commencer par ne pas subventionner celles des non français. C’est un minimum.
      Arrêtons d’avoir pour objectif la croissance démographique et économique. Arrêtons de chercher le »toujours plus » et passons au mieux.

      1. Raison pour laquelle le principe d’une fin de vie humainement décente doit être étudié en dehors de tout système financier. Vaste chantier qui nécessite l’implication de tous.

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