Le mouvement des gilets jaunes était porté, au moins en son début, par les classes moyennes : elles se plaignent de leur paupérisation croissante et de leurs conditions de vie qui se dégradent. Le rapport publié, le 20 avril, par le Centre pour la recherche économique et ses applications (CEPREMAP) apporte un nouvel éclairage sur la crise qui s’abat sur cette catégorie de Français.

La définition des classes moyennes est floue et beaucoup de critères différents sont employés pour les recenser. Selon le plus communément utilisé, on appartient à la classe moyenne si ses revenus sont 30 % plus élevés que le seuil de pauvreté (fixé à 50 % du revenu médian) et s’ils se situent en dessous des 20 % des classes les plus riches (le seuil de richesse est le double du revenu médian). Donc, avec les chiffres de 2016, une personne appartient à la classe moyenne si ses revenus sont compris entre 1.265 € et 2.275 €, un couple sans enfants entre 2.468 € et 4.423 €, et un couple avec deux enfants entre 3.302 € et 5.743 €. Les chiffres ont peu varié pour 2019. Néanmoins, le revenu disponible de cette partie de la population après les dépenses obligatoires (impôts, nourriture, déplacements) est en net recul depuis quinze ans, même si, du fait même de sa définition, ses revenus de départ restent fixes.

66 % des Français appartiendraient à la classe moyenne (contre 50 % seulement aux USA), mais ce nombre est en diminution, si on en croit le rapport du CEPREMAP. Entre 1994 et 2014 (dernière année disponible), on estime que le nombre de smicards a augmenté de 3,5 %, celui des ouvriers non spécialisés a diminué de 4,14 %, celui des ouvriers qualifiés de 3,32 %, les employés de bureau de 4,05 %, tandis que le management (classes supérieures) progressait de 2,74 % et les ingénieurs de 5,76 %.

Le nombre de personnes dépendant des classes intermédiaires a donc fortement diminué en vingt ans, au profit des smicards et des classes supérieures, et leurs revenus ont baissé du fait de la montée des impôts. Il n’est pas étonnant qu’elles ressentent un sentiment de déclassement et qu’elles aient violemment réagi.

Cette diminution va s’accentuer à court terme. Mais à moyen et à long terme, ce sont les classes supérieures qui vont être impactées. En effet, la montée en puissance des programmes experts servis par des intelligences artificielles de plus en plus performantes va rendre inutiles nombre d’emplois d’ingénieurs ou de cadres. Des robots ont parfois un bien meilleur diagnostic que les médecins les plus médiocres dans la détection de maladies. À l’avenir, des infirmières pourront donc remplacer nombre de docteurs. En Estonie, une intelligence artificielle va rendre des jugements en matière civile pour désengorger les tribunaux. Pourquoi, alors, recruter des juges ?

Nous risquons d’assister, alors, à un double mouvement : les classes moyennes rejoindront les smicards et les classes supérieures diminueront en nombre et en revenus. Il est donc urgent, dans la formation, de développer le codage et l’informatique, car un système expert aura toujours besoin d’un humain pour le programmer et le surveiller. Nous avons là la seule source future d’emplois. Heureusement, l’unique avancée de la controversée réforme du bac de M. Blanquer est d’avoir introduit l’informatique comme spécialité en première.

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25 avril 2019 à 8:20

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