Lecture de confinement : Rhapsodie italienne, de Jean-Pierre Cabanes

CABANES

En 1915, l’Italie, qui s’était tenue à l’écart jusque-là, a la funeste idée de déclarer la guerre à l’Allemagne et à l’Autriche-Hongrie. À celle-ci, surtout, pour reconquérir les « terre irredenti ».

Deux hommes vont s’y lier d’une amitié intangible. Lorenzo Mori, officier de carrière, part parce que c’est son métier. Il vient de tuer un rival en duel et aime passionnément Julia qui en fut l’enjeu. C’est un grand bourgeois de Vérone. L’autre est son opposé, Gino, un modeste paysan sicilien qui se moque bien des « terre irredenti ». Lui aussi vient de tuer un homme : un mafieux, l’assassin de son père. Il l’a vengé. Un crime d’honneur, comme on dit là-bas. La police le recherche, il s’engage. Et lui aussi laisse une femme derrière lui, Carmela.

Gino et Lorenzo vont faire la guerre ensemble chez les Arditi, les troupes de choc qui fonctionnent en tandem : deux hommes font équipe, ils tuent ou meurent ensemble. Cela crée des liens qui ne s’effacent jamais et, des années après, ils sauront s’en souvenir.

Ils ont portant choisi des voies bien différentes : Cosa Nostra pour le Sicilien, le fascisme pour le Véronais. Ils sont revenus diminués de la guerre : manchot pour l’un, défiguré pour l’autre. Cela renforcera la détermination implacable de leurs engagements respectifs.

Tout au long de 720 pages haletantes, le lecteur suit ces deux personnages et leurs femmes jusqu’en 1945. Ils n’arriveront pas tous à une vieillesse heureuse : l’époque est violente et l’auteur la restitue superbement.

Jean-Pierre Cabanes est un auteur prolixe mais discret, malgré un prix de littérature policière. Avec Rhapsodie italienne, il devrait accéder à une notoriété méritée. Cette fresque aux références historiques impeccables possède en effet le souffle des grands romans. Parfois dur, souvent sensuel, il nous entraîne en Espagne, en Éthiopie, en Grèce, à Stalingrad et, bien sûr, en Sicile, à Vérone et dans le dernier réduit du lac de Garde, sans jamais perdre son souffle.

Mais il n’y a pas que la guerre, le crime et la politique. Les femmes ont un rôle déterminant et impriment leurs personnalités dans cette histoire si riche, parfois trop romanesque, mais si bien racontée.

Un roman épique qui fera date.

Le blog d'Antoine de Lacoste.

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Antoine de Lacoste
Conférencier spécialiste du Moyen-Orient

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