Le premier Noël : une naissance si discrète sous le règne d’Hérode (1/8)

The_Nativity_Robert_Campin

Ce premier Noël se déroule bien loin de la Gaule romaine, dans une province éloignée de l’empire qui résume alors le monde connu. Mais l’onde de choc qui prend ici sa source va marquer la Gaule, puis la France, plus que tout autre événement.

Le royaume de Judée est en ébullition, cette nuit de la première année de notre ère. Mystérieusement, sans que personne ne puisse l’expliquer, le monde entier semble s’être donné rendez-vous à Bethléem, à quelques lieues des murailles de Jérusalem. Si le recensement voulu par l’empereur Tibère plonge régulièrement les cités juives dans une effervescence inhabituelle, cela n’est pas comparable à ce qui se déroule dans la ville de David.

Marchands et bergers se bousculent tandis que d’étranges rumeurs rendent les sentinelles romaines et juives particulièrement attentives. Certains arrivent depuis la campagne en affirmant suivre une mystérieuse étoile, mais nombreux sont ceux qui scrutent le ciel sans rien apercevoir. Il se murmure même que des mages venus d’Arabie, de Perse et de la lointaine Inde arrivent en caravane à la recherche d’un roi. Cette étoile a fait naître bien des conjonctures : une « triple conjonction » de Jupiter et de Saturne en 7 ? Une conjonction impliquant une série de planètes et l'étoile Régulus ? Un lever héliaque de Jupiter et son occultation par la Lune ou encore une conjonction de Saturne et Vénus ? Aucune théorie n’est convaincante, tous s’accordent en tout cas à dire qu’un événement a déchiré le ciel ce jour-là…

Il se murmure aussi qu’Hérode en son palais active ses serviteurs pour les accueillir dignement. Paradoxalement, peu croient au fond de leur cœur que le roi recherché est cet Hérode. L’agitation et les questionnements sont tels que nul ne fait attention à ce couple arrivé nuitamment de Nazareth pour se faire recenser. Le charpentier traîne un âne portant son épouse visiblement enceinte. Il se rend d’auberge en auberge sans succès, les rares établissements de la ville étant bondés. Personne non plus ne voit le couple s’éloigner et sortir de la ville pour se diriger vers les grottes creusées à flanc de colline abritant les bêtes de somme et de labour. Il était temps, la femme entrait dans les douleurs de l’accouchement. On écrivit plus tard que personne n’entendit le premier cri de l’enfant mais que le monde entier le ressentit. En tout cas, l’étoile brilla plus intensément et les bergers menèrent leurs troupeaux vers la grotte qui a vu naître l’enfant. On raconta même que les rois d’Orient fouettèrent leurs montures pour arriver plus vite. Contemplant les étoiles, ces mages avaient lu dans le cosmos qu’un événement d’importance se préparait. Ils ne connaissaient pas ces paroles du prophète Isaïe, prononcées 700 ou 800 ans auparavant. « Un rameau sortira de la souche de Jessé, père de David, un rejeton jaillira de ses racines. Sur lui reposera l’Esprit du Seigneur : esprit de sagesse et de discernement. Il ne jugera pas sur l’apparence ; il jugera les petits avec justice. Sa parole, comme un bâton frappera le pays ; il fera mourir le méchant. Le loup habitera avec l’agneau ; le veau et le lionceau mangeront ensemble, un petit garçon les conduira… Le bébé jouera avec un serpent. […] Ce jour-là, la racine de Jessé, père de David, sera dressée comme un étendard pour les peuples, les nations la chercheront et la gloire sera sa demeure. »

La naissance de cet enfant provoqua un vent de panique chez les autorités de Judée, à tel point que le palais du roi Hérode trembla sur ses fondations. La naissance de ce Jésus est lié à un horrible massacre perpétré par ce roi cruel qui fit mettre à mort tous les enfants de moins de deux ans, tremblant que, parmi eux, se tienne celui qui le détrônera. Pauvre Hérode qui se croyait encore roi alors qu’il n’était qu’un pantin des Romains. Pauvre Hérode accroché à son fauteuil de Judée alors que naissait celui dont les actes et les paroles allaient révolutionner le monde. Et marquer de leur emprunte l’Europe chrétienne et singulièrement la Gaule, ses églises, sa culture, son art, sa musique. La Gaule qui deviendra, avec Clovis, le pays des Francs, la France.

Marc Eynaud
Marc Eynaud
Journaliste à BV

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