Le baccalauréat bat son plein avec, mercredi, l'épreuve de philosophie et, ce jeudi, l'épreuve écrite anticipée de français. Suivront, dans quelques jours, l'oral de français pour les élèves de première et le grand oral pour les élèves de terminale. Après des sessions perturbées par la crise sanitaire, le baccalauréat semble revenir à la normale. Mais ce diplôme a-t-il encore quelque valeur ?

On est bien loin de l'examen en deux temps que les plus anciens de nos lecteurs ont connu : le baccalauréat passé en première, qui conditionnait l'entrée en terminale, et le baccalauréat passé en terminale, qui filtrait l'entrée dans l'enseignement supérieur. Aujourd'hui, il ne fait plus que confirmer l'affectation préalablement proposée par Parcoursup, en fonction de barèmes fondés sur les notes et appréciations de l'élève, voire sur des critères sociaux. Ce n'est plus qu'un ticket d'entrée formel, un passeport gratuit pour la poursuite d'études.

Ce passeport atteste-t-il au moins l'acquisition de savoirs et de méthodes solides ? On peut en douter. Près de 94 % des 732.800 candidats ont été reçus en 2021, en légère baisse par rapport à 2020, selon le ministère de l'Éducation nationale. On peut feindre de s'en réjouir, mais les cours de soutien, de grammaire et d'orthographe qu'on est obligé d'organiser dans les universités, les échecs massifs en première année ramènent à la réalité : le baccalauréat pour tous, ou presque, est un passeport pour nulle part. C'est un miroir aux alouettes qui ne signifie plus rien.

Le plus grave, c'est que nos dirigeants le savent, mais continuent d'entretenir le mythe. Pour beaucoup de familles, le bac a encore du prestige et il ne faut pas les décevoir. Ils espèrent aussi en tirer un bénéfice politique : le nombre de reçus n'est-il pas la preuve de l'efficacité du système éducatif ? Ils confondent délibérément l'inflation de ce diplôme avec la démocratisation de l'enseignement. Ils ne croient pas à sa valeur – et en tirent les conséquences pour leurs propres enfants, qu'ils mettent à l'abri –, mais le peuple y croit, il faut donc entretenir l'illusion.

Avec le contrôle continu, où des pressions locales peuvent s’exercer, des épreuves parfois difficiles, mais toujours complaisamment notées – on a récemment vu des notes rehaussées sans même consulter les correcteurs –, le bac se dévalorise de plus en plus. Il y aurait pourtant bien des raisons de lui redonner du sens, encore faudrait-il en avoir la volonté politique. Au lieu de remplacer l'égalitarisme niveleur par une réelle méritocratie et une sélection fondée sur le talent et le mérite, au lieu de réformer le système vers plus d'exigence, on ne ne fait que bercer le peuple d'illusions.

Cet article a été mis à jour pour la dernière fois le 19/06/2022 à 14:34.

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17 juin 2022 à 17:10

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34 commentaires

  1. Le « Certif » d’antan, dans des Ecoles, encore Républicaines et laïques, assuraient un minimum solide que l’on gardait sa vie entière. Quelques « échappés » allaient au Bac, voire plus haut. Le Mérite existait encore, le Talent faisait le reste.
    Maintenant que le Bac est distribué, comme la Nationalité, à qui le demande, c’est l’Université qui en fait les frais. C’est Elle et les Prépas qui font le tri !
    Mais après ?

  2. J’ai eu la mention « Très-Bien » au Bac Math-Elem en 1956. La voie royale pour être admis dans les prépas aux grandes-écoles ! J’ai aussi passé le Bac Philo en septembre avec un « Bien ». Je vis aujourd’hui en Finlande, ou je vois que les jeunes bacheliers sont soumis à une sélection féroce pour l’accès aux grandes universités technologiques ou médicales.

  3. Collège et lycée des années 70 : un milieu carcéral, avec ses murs et ses surveillants, et de longues heures à recopier un cours dicté par un prof. Mais aussi une prof de maths qui m’a fait aimer les probabilités, une prof de français qui m’a appris à faire un résumé. Sur le fond, je suis d’accord avec Gustave Le Bon, « Psychologie de l’éducation » : dans cette école basée sur les idées de Condorcet, les jeunes y perdent leurs meilleures années, et tout est à refaire.

  4. Heureusement que macron a réfléchis au problème et décidé de créer « France travail ».
    LE, nouvel outils à distribuer des allocs aux refoulés de l’emploi pour cause de niveau trop bas.
    Si bas d’ailleurs, que c’en est à peine croyable. A l’épreuve de Français du bac pro, près de la moitié des copies rendues blanches, car les élèves ne connaissaient pas l’adjectif « ludique ».

  5. vu le niveau de « certains enseignants » je me demande ce qu’ils peuvent apprendre au élèves ( sans compter le changement de population exotique)

  6. Quel Ministre de l’Education Nationale aura le courage de donner une fois un problème de règle de trois et une dictée de Certificat d’Etudes de l’année 1900 et de la noter avec les critères de l’époque? Aucun, car on comprendrait vite qu’aucun bachelier actuel ne serait reçu, que les licenciés en sciences seraient recus à 10 %, et même les docteurs lauréats de nouvelles thèse, échoueraient partiellement. Quel succès pour des gens qui prétendent prévoir le climat et gouverner la planète !

    1. Après 1968 l’université de Nanterre délivrait déjà des diplômes de complaisance, Internet n’existait pas, mais les documents et les tampons officiels étaient entre les mains de syndicalistes dévoués à la cause.

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