Laurent Wauquiez, la surprise du chef

Ceux dont on n’attend plus rien ont un avantage : ils ne peuvent pas décevoir. Ils peuvent même, s’ils sont malins, créer la surprise.
 
Enlisé dans les tranchées d’une ligne Maginot dépassée, contourné par la blitzkrieg d’un jeune loup sorti du bois socialiste avec assez d’appétit pour avaler la droite, le parti gaulliste a mis du temps à se remettre. Après s’être lancé les gamelles à la figure, et une fois délestés des collabos tentés de rejoindre le vainqueur, Les Républicains se sont enfin choisi à leur tour leur Napoléon.

Élu à la tête du parti Les Républicains en décembre, invité de "L'Émission politique" de France 2 le 18 janvier, il est en quelque sorte la "surprise du chef" !

Largement ignoré jusqu’ici des Français, Laurent Timothée Marie Wauquiez peut pourtant cocher toutes les cases d’un parcours politique d’excellence. Ce jeune Rastignac lyonnais monte à Paris y suivre les meilleures écoles, du lycée Henri-IV à l’ENA, en passant par Normale Sup et Sciences Po, avec en prime un diplôme de droit de l’université et une agrégation d’histoire. Sa famille, paternelle comme maternelle, s’est illustrée jusqu'ici plus dans l’industrie que dans la fonction publique. D’où, sans doute, sa prédilection pour les sujets de société liés à l’économie comme le chômage, l’apprentissage, la formation en alternance des étudiants. Repéré par un Jacques Barrot toujours en quête de jeunes diplômés aptes à la carrière politique, il accédera dans son sillage à une implantation locale prometteuse dans une région très industrielle dont il a depuis conquis la présidence : Rhône-Alpes. Maire du Puy-en-Velay, point de départ du chemin de Compostelle, il ne fait pas mystère de son catholicisme, mais ne suit pas la papauté dans son désir d’accueillir tous les migrants. C’est comme si, a-t-il dit dans "L'Émission politique" en évoquant Calais, tous les pèlerins en marche vers Compostelle avaient vocation à s’installer au Puy !

C'est de sa province, revendiquée haut et fort, qu’il livrera bataille. Pour lui, Macron est parisien et Le Touquet, c’est moins la province que « Paris Plages ».

Soucieux de défendre l’intérêt de sa province, il a refusé qu’on applique à sa région les « directives de Paris » sur le chômage et a pratiqué la politique de la chaise vide sous le quinquennat d'un François Hollande pour lequel il n'avait aucune considération. C'était, sans doute, son seul point d'accord avec Macron. Pour le reste, tout les différencie. Wauquiez veut sortir de Schengen, facilite le refus par les maires de sa région d’accueillir des « migrants », désire qu’un étranger réside cinq ans avant de recevoir des aides sociales, refuse de marier les couples de même sexe et s’oppose à la PMA pour femmes seules ou couples de femmes.

Au grand oral de "L’Émission politique", il a certes mis de l’eau dans son vin. Trois ans au lieu de cinq pour le temps de résidence des étrangers, et l’acceptation de la loi Taubira « votée par le peuple".

Pas de doute, la campagne des présidentielles de 2022 est bien ouverte. Face au gloubi-boulga des "en même temps", la droite est de retour. Et, avec elle, le clivage droite/gauche va pouvoir reprendre du service.

C’est une bonne nouvelle. La démocratie est un système de libre concurrence des idées. L’abolition du clivage droite/gauche amène inéluctablement à la dictature de la pensée unique. Si c’est ce qu’on veut, inutile de passer par la case « démocratie ». Que Macron, comme Napoléon, proclame l’Empire et qu’on ne parle plus d’assemblées délibérantes ! Mais il y a fort à parier que, même dans ce cas, et faute d’aiglon, Laurent Wauquiez briguera la succession.

Catherine Rouvier
Catherine Rouvier
Docteur d'Etat en droit public, avocat, maitre de conférences des Universités

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