Jérôme Salomon a fait sa rentrée : il ne vous donne plus le nombre de morts mais de cas

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Vendredi 14 août 2020. Monde d'après. France Inter : la voix de Jérôme Salomon, en pleine forme, vient heurter mes oreilles. Le monde d'avant. Jérôme Salomon est toujours directeur de la Santé en France. Toujours le même poste. Il a simplement un peu évolué dans la chaîne de l'information et de l'épidémie : plus affecté à la morgue, mais désormais vigie du moindre « cas », du moindre « signal ». C'est moins violent et cela a exactement le même effet sur la population : angoisse, obéissance, attente anxieuse du bulletin Salomon quotidien. Le déconfinement et les vacances n'ont permis aucune cure de désintoxication : le peuple français est fidèle à son maître.

Donc, « les signaux sont là », et Jérôme Salomon aussi. « Les indicateurs sont mauvais » et Jérôme Salomon est bon, très bon dans son rôle. Pire : « Les signaux sont très préoccupants et la situation se dégrade semaine après semaine. » Le gourou est au maximum de sa forme.

« Mais il n’y a pas de fatalité. Le sort de l’épidémie est entre nos mains. » Les auditeurs ont l'oreille collée au poste, et le regard rivé sur « leurs » mains. « On ne peut qu’être inquiet quand on voit qu’une centaine de personnes sont admises chaque jour à l’hôpital, quand on voit que 120 personnes sont en réanimation. Nous pouvons décider ensemble de freiner l’épidémie. » La formule vire au slogan électoral, comme Chirac en 1988 : « Nous irons plus loin ensemble. »

Enfin, après les paroles, les chiffres tombent, la dose quotidienne tant attendue par le peuple français : « Deux départements à risque sont particulièrement surveillés : il s’agit de Paris et des Bouches-du-Rhône, et particulièrement de la ville de Marseille. Ce sont des zones de densité urbaine, où il y a beaucoup de flux de population, de transports. » Mais le DGS précise qu'il faut ajouter à ces deux zones une vingtaine de départements qui sont au-dessus d’un certain seuil de vigilance. Le propos n'est plus scientifique ni numérique mais efficace.

M. Salomon arrive même à faire passer de vraies bonnes nouvelles sans rompre le lien d'angoisse auquel les Français se raccrochent comme à leur cordon ombilical : il reconnaît que la situation en France est « très hétérogène ». Et même dans ces territoires que l'on croyait livrés à une apocalypse sans nom : « À Mayotte comme en Guyane, la situation s’améliore. Actuellement, il n’y a pas d’alerte sur les outre-mer. » Les Français doutent.

M. Salomon lâche les chiffres, terribles : après 2.524 nouveau « cas » détectés mercredi, ce sont 2.669 identifiés jeudi et 2846 vendredi. L'augmentation est loin d'être exponentielle alors que les tests se multiplient. Le nombre de décès est de 18. Et le nombre de patients hospitalisés en réanimation continue de baisser, avec 367 malades, soit 7 de moins en 24 heures... Nous sommes très très loin des 500 morts quotidiens (sans compter les EHPAD oubliés qui faisaient désordre) du printemps dernier.

Pourtant, Jérôme Salomon continue à remplir les salles. Jauge illimitée.

Frédéric Sirgant
Frédéric Sirgant
Chroniqueur à BV, professeur d'Histoire

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