Jean-Paul Garraud : « Retour des djihadistes : des bombes à retardement, des centaines de fanatiques éparpillés sur le territoire ! »
Boulevard Voltaire a recueilli la réaction de Jean-Paul Garraud, magistrat honoraire et député au Parlement européen, au sujet du retour des djihadistes sur le sol français.
Nicole Belloubet a annoncé que 43 djihadistes seraient libérés de prison cette année, une soixante d’autres en 2021, et vous énoncez même d’autres chiffres : sur 726 terroristes emprisonnés en France en 2018, 406 seront libérés d'ici fin 2020. D’où viennent ces chiffres et que traduisent-ils ?
Ces chiffres proviennent d'une conférence donnée par Maître Thibault de Montbrial, éminent spécialiste de ces questions de terrorisme, lors d'un colloque en date du 25 novembre 2018 organisé par l'Institut pour la justice. De toute façon, nous ne disposons d'aucun chiffre officiel, l'écran de fumée est total.
Ainsi, le garde des Sceaux fait état de 43 djihadistes libérés d'ici la fin de l'année et d'« une soixantaine, l'année prochaine ». Sauf que, selon d'autres sources (celle du ministère de l'Intérieur), ce serait 45 cette année, 57 l'année prochaine et 46 en 2022 ; elle a oublié de parler de 2022. Ces chiffres ne concernent que des détenus libérés suite à des condamnations prononcées en France.
Mais qu'en est-il de tous ceux revenus ou qui vont revenir de Syrie, d'Irak ? Combien sont-ils, exactement ? Pour calmer les esprits, le ministre de l'Intérieur avait tenté de rassurer la population en précisant que ces individus seraient, selon sa formule, « judiciarisés », ce qui, en droit, ne correspond à rien.
Alors, où sont-ils ? Combien sont-ils ? Quelles mesures ont été prises ? Sur quel fondement juridique ? En réalité, il y a tout lieu de craindre que ces bombes à retardement soient libres de leurs mouvements et qu'au total, plusieurs centaines de fanatiques sont et seront éparpillés sur notre territoire.
Le juge d’application des peines du parquet national antiterroriste est en charge du suivi de ces détenus après leur libération mais, pour vulgariser le problème, peut-on vraiment mettre un policier derrière chacun, a-t-on les moyens de surveiller simultanément chaque détenu, que deviennent-ils, en réalité ? Sachant que la plupart des terroristes neutralisés après avoir commis une attaque étaient déjà sous surveillance.
Le juge d'application des peines ne s'occupera que des détenus libérés suite à une condamnation judiciaire française, avec des moyens matériels et légaux très limités. Pour les revenants du djihad et leurs familles, mystère total. Il est, de toute façon, insensé de faire bénéficier ces criminels des procédures d'application des peines de droit commun.
Comment voulez-vous réinsérer de tels individus dans une société qu'ils détestent au plus haut point ? Tout aménagement de peine devrait être interdit et toute sortie de fin de peine devrait être encadrée par des mesures de sûreté. J'ai tout un projet en la matière.
« Aucun de ces criminels n’est déradicalisé », écrivez-vous. Faut-il, justement, prendre des mesures pour déradicaliser ces personnes ? Lesquelles ?
La « déradicalisation » est, excusez-moi, une triste foutaise. Tous les professionnels de la Justice le savent. Le gouvernement engloutit des sommes conséquentes uniquement pour donner le change. Soit il ne mesure absolument pas le niveau d'endoctrinement de ces individus, soit il fait semblant de tenter d'apporter une réponse. Dans les deux cas, le risque est grand, même certain, de récidive. Encore une fois, l'islamiste ne peut être considéré comme un délinquant quelconque. Il ne recherche pas une satisfaction personnelle, il combat un système. Il n'est pas dans une logique individuelle mais dans une logique de masse, systémique. Il n'a que faire de sanctions personnalisées, de réinsertion sociale, d'amendement, de rédemption, d'analyse sur soi, des notions de bien et de mal. Il agit au nom d'un totalitarisme, d'un fanatisme en vue de l'anéantissement de cette société de mécréants qu'il abhorre. Il veut l'application de la loi islamique, la charia, la soumission de la femme et de tout non-musulman (les dhimmis), au besoin par la force, la terreur.
Le gouvernement se devait de réformer notre législation en vue de l'adapter à la guerre contre le terrorisme que nous devons gagner. Les mots sont forts, pas les actes. Tous ces terroristes en liberté sont des récidivistes en puissance. Si, par malheur, ils participent de près ou de loin à de nouveaux attentats, ceux qui ont laissé faire alors qu'ils sont « aux responsabilités » seront justement responsables et coupables !
Entretien réalisé par Maud Protat-Koffler
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