Élections canadiennes, un coup pour rien

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Les Canadiens se sont rendus aux urnes, ce lundi, à l’occasion des élections fédérales anticipées, après la dissolution du Parlement par Justin Trudeau. Ce dernier, porté par sa gestion de la pandémie et de la vaccination, entendait profiter des sondages favorables pour mettre un terme à deux années de gouvernement minoritaire. Pari réussi pour le Premier ministre sortant ?

Cette campagne éclair a, d’emblée, pris un tour confus. Accusés d’avoir provoqué les élections alors que le Canada traverse une quatrième vague épidémique, Trudeau et le Parti libéral se sont vus acculés à la défensive. À chacun de ses déplacements, le Premier ministre a été en butte à des opposants à la vaccination. Pour couronner le tout, les libéraux ont connu une chute rapide dans les sondages au profit de leurs rivaux conservateurs.

De fait, ces derniers ont rapidement pris la tête dans les intentions de vote. Sous l’égide de son nouveau chef, Erin O’Toole, le Parti conservateur a adopté une posture résolument centriste en mettant l’accent sur l’écologie et le social. Mais le peu charismatique leader conservateur a peiné à défendre ses idées, souvent en contradictions avec les cadres et la base de sa formation politique. Ces ambiguïtés ont offert au Parti libéral l’occasion d’attaquer les conservateurs en pointant leurs flottements quant à l’avortement, le port d’armes et l’environnement.

Au-delà de la lutte entre les deux partis dominants, les thématiques de la campagne électorale n’ont guère tranché avec le précédent scrutin. En sus du système de santé et des mesures sanitaires se sont imposés les thèmes de l’écologie, de l’aide aux entreprises, du logement. Autant de sujets dont a bénéficié le troisième homme de l’élection, Jagmeet Singh. À gauche toute, son parti néo-démocrate a opté pour une campagne résolument moderne. L’orientation des thématiques a également profité au Bloc québécois, qui a défendu un renforcement des prérogatives locales tout en vantant le particularisme de la Belle Province.

Mais aucun des grands partis n’est parvenu à incarner la rupture. Et pour cause : la carte des résultats électoraux présente une fascinante similitude avec celle de 2019. Quoique légèrement devancé dans les urnes par les conservateurs, le Parti libéral s’impose une nouvelle fois au Parlement, favorisé par le scrutin uninominal à un tour, mais sans emporter de majorité. Néo-démocrates et Bloc québécois enregistrent une légère hausse des suffrages qui ne se traduit guère par un accroissement de leur représentation parlementaire.

En réalité, le frémissement s’observe à la marge. C’est d’abord la débâcle du Parti vert. Emmené par Annamie Paul, ce dernier s’est présenté aux élections en ordre dispersé. Minée par les luttes intestines du printemps, dépourvue de fonds comme de candidats, Paul a fait le choix d’une campagne aussi radicale que maladroite, centrée sur Toronto afin d’assurer sa propre élection.

Au contraire, le Parti populaire de Maxime Bernier a su tirer son épingle du jeu. Climato-sceptique, hostile aux restrictions sanitaires, aux subventions publiques et à l’immigration, la jeune formation populiste s’est posée en défenseuse de toutes les libertés. Une approche radicale qui a permis à Bernier de remporter plus de 5 % des suffrages, récoltant ses gros bataillons parmi les conservateurs déçus, les adversaires de la vaccination et la population d’un Ouest canadien s’estimant lésé par l’État fédéral. Reste à savoir si ces gains populistes se confirmeront dans les années à venir. En attendant, voici Justin Trudeau maintenu aux manettes d’un nouveau gouvernement minoritaire. Un coup pour rien, en somme.

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Florent Valet
Diplômé de master d’histoire

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