[Edito] Sans berceaux, tout cela n’est qu’une réformadoff des retraites

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64 ou 65 ans ? Élisabeth Borne chipote. On fait mine de croire la question d’importance. Il faut sauver le soldat retraite par répartition et tous les gens raisonnables vous le diront : au vu du ratio actifs/retraités et de sa projection dans l’avenir, il n’y a pas d’autre choix, il faut être réaliste, ma brave dame, rallongeons la date de départ à la retraite !

Mais le rabiot peut être progressivement tiré à l'infini, jusqu'à nous emmener tranquillement à l'âge de Jeanne Calment, en déambulateur… si l’on ne se préoccupe pas de démographie.

C’est l’impensé, le tabou, l’angle mort de cette réforme. Quand elle en devrait être l’indispensable corollaire. Sans cette pièce maîtresse, le dispositif n’est qu’une « réformadoff » des retraites, une pyramide de Ponzi intergénérationnelle, puisque les retraites des premiers arrivés (sur le marché du travail) sont servies par les derniers qui, eux, n’ont aucune assurance de rentrer un jour dans leurs fonds, voire, mécaniquement et arithmétiquement, ont l’assurance du contraire, puisque la cohorte qui les suit est clairsemée. Rappelons sans nous lasser la maxime d’Alfred Sauvy : nos retraites ne sont pas servies par nos propres cotisations mais par celles de nos descendants.

Sonia Mabrouk a bien posé, sur Europe 1, mardi matin, la question à Marc Ferracci, vice-président du groupe Renaissance à l'Assemblée nationale et rapporteur de la réforme assurance chômage : quid de la natalité, dans tout cela ? Réponse surréaliste de l’intéressé, que l'on peut résumer en ces termes : cette réforme bénéfique va aider les Français à penser printemps et, donc, leur donner envie de faire des bébés. Ce n’est pas beau, la vie ? Pas question de mettre en place des mesures natalistes comme ce réactionnaire de Viktor Orbán. Les enfants sont devenus un marqueur d’extrême droite au même titre que l’immigration ou la sécurité.

Puis, qu’à cela ne tienne, il en ira de ce problème-là, mutatis mutandis, comme du numérus clausus en matière médicale : après avoir découragé les Français de procréer comme, jadis, on les a dissuadés d’être médecins, on ira chercher la ressource à l'étranger, jurant ses grands dieux qu’elle seule peut nous sauver.

Sauf que même sans parler des autres implications, d’un point de vue purement économique, le compte n’y sera pas : la population étrangère que nous accueillons est essentiellement sous-qualifiée et presque deux fois plus au chômage (13 %, contre 7,5 %) que la population générale. Pour que les retraites soient servies, il faut que les cotisations leur soient proportionnées ; or, de petits salaires donnent lieu à de petites cotisations. C’est pour cela, du reste, qu’en « modulant », comme il disait, les allocations familiales en fonction des revenus, le gouvernement Hollande a fait une belle boulette. Ces allocations n’avaient pas une vocation sociale mais nataliste : compenser (un peu) les dépenses occasionnées par l’arrivée d’un bébé pour chaque Français.

Loin d’être une solution à la retraite par répartition, l’immigration finira au contraire d’achever un mécanisme de solidarité qui par essence repose sur une société homogène. Dominique Reynié, directeur de la Fondapol, l’a très finement expliqué, ces jours derniers, dans Le Figaro : il faut « choisir entre l’État-providence et l’ouverture des frontières ». Deux exemples à l’étranger : le Danemark, au modèle social cité en exemple, se montre drastique en politique migratoire. À l’inverse, les États-Unis, pays multiculturel s’il en est, ne proposent aucun filet social.

La question du consentement à la solidarité se pose d’ailleurs aussi bien pour les Français que les étrangers fraîchement arrivés : pourquoi se feraient-ils un devoir d’entretenir des vieux qui ne leur sont rien ? On me rétorquera qu’ils y sont forcés car, pour le moment, la retraite par répartition n’est pas une option. Mais d’une certaine façon, les transferts de fonds - la France est le pays d’Europe qui envoie le plus d’argent vers l’étranger, pas moins de 11,2 milliards d’euros, en 2020, à destination prioritairement de l’Afrique du Nord et subsaharienne - sont déjà une forme de retraite par capitalisation. En investissant dans leur pays d’origine, ils pensent à leurs vieux jours ou à ceux de leurs proches restés là-bas. Leur réflexe de solidarité est naturellement - comment le leur reprocher - tourné vers leur famille. Ce sont nos mécanismes, dans une société « archipel », qui sont désormais artificiels et donc voués à disparaître.

Bref, les français n’ont pas d’autre solution que d’avoir des enfants, de les élever à la sueur de leur front pour que ceux-ci, le moment venu, par reconnaissance et devoir filial, les entretiennent et les soignent à leur tour. La retraite par répartition n’est rien d’autre que le commandement d’honorer son père et sa mère, élargi collectivement à l’ensemble de la société.

Gabrielle Cluzel
Gabrielle Cluzel
Directrice de la rédaction de BV, éditorialiste

Vos commentaires

38 commentaires

  1. Enfin quelqu’un qui le dise ! Il faut que ce soit vous, trompette du bon sens . Nos contrats sociaux sont fondés sur l’idée de progrès perpétuel et de progression du nombre de cotisants . A vrai dire c’est bien mal ficelé lorsque la population régresse et devient rapidement ingérable à conditions similaires . Donc la réforme est indispensable mais commençant par la nécessité de faire des petits . C’est moral au fond car il est indécent que les couples sans enfants aient leur retraite assurée par ceux qui en ont fait . Ces derniers n’ont donc pas eu – et de loin- un niveau de vie ni les loisirs aussi somptueux que les célibataires ou les couples volontairement stériles . La stérilité est une malédiction antique/moderne

  2. Et si on commençait par supprimer le regroupement familiale mis en place par chirac en 1976 sans référendum, sans être passé par l’AN et le sénat, tout simplement par décret. Donc il serait aussi facile d’en finir avec une immigration automatique mais il faut en avoir dans le pantalon pour le faire. Ceux qui lui en succédé en sont dépourvus….
    Supprimer toutes les retraites de ces faux centenaires du magreb , les primes de Noël accordées uniquement aux chrétiens, les aides sociales supprimées aux familles de délinquants, etc…
    Lutter contre la fraude social et fiscal, plus de 100 milliards d’ après Charles Prats,
    Penaliser la polygamie, j’en passe et des meilleures

  3. Je pense qu’il y a confusion entre mode de calcul des retraites et la réalité économique de ces prélèvements pour les retraites.

    En réalité les retraites sont prélevées sur la création des richesses par les producteurs et eux seuls. En ne se concentrant que sur le mode de calcul on passe à coté de cette réalité.
    Si les richesses produites n’étaient pas suffisantes pour payer les retraites on ne pourrait que les réduire, ou d’augmenter la dette publique.

    La création de richesses dépend de la compétitivité de l’économie. Si elle ne l’est pas, on ne vend pas et donc pas de création de richesses et donc des mises en chômage. Ce ne pourra donc pas être la hausse de la natalité qui va résoudre ce problème, mais au contraire une baisse de celle-ci.

    Il ne suffira pas qu’il y ait beaucoup de monde en âge de travailler s’il n’y a pas assez de travail et d’emplois. Nos voisins européens qui sont parvenus à reculer l’âge de la retraite ne peuvent être que celles ayant conservées leur compétitivité.

    La production de richesses peut avantageusement aussi provenir de la machine, de la robotisation et cela surtout dans le cas de la France où les prélèvements obligatoires sont aussi élevés. On peut ainsi conserver avantages sociaux tout en améliorant la productivité.
    Et tout ceci ne sera possible qu’en diminuant la part humaine dans la production de richesses et donc par une réduction des naissances, avec cependant l’inconvénient qu’une telle réduction ne peut avoir lieu qu’à moyen, voire long terme, autrement dit, dans l’espace d’une génération.

    • Les cotisations sont individuelles et liées aux salaires . Les robots n’en paient pas alors que vos enfants permettront de sauver le système actuel s’ils sont assez nombreux et actifs.

  4. La retraite par répartition était un bon système de mon temps (76ans)Nous étions nombreux à cotiser pour nos anciens parce qu’il y avait du travail et moins de chômeurs. Mais depuis le gouvernement Raffarin les entreprises sont parties en Chine. Et les autre gouvernements ont poursuivi la destruction des entreprises métallurgiques et médicales. Augmentation des chômeurs et entrée massives des immigrés embauchés au noir et ne cotisant pas pour les retraites.
    Les milliards envoyés en Afrique du Nord pour des retraités morts. Cette fraude tous les présidents ont fermé les yeux.
    La classe politiques drauche a ruinée et détruit la France.
    Les Français d’origine arabe ou musulmane ont une forte natalité et dans 20 ans nous aurons comme Nation la Francarabia. Voila l’avenir toute tracée par tous les présidents et gouvernements. La faute aux électeurs qui n’ont jamais pris la peine d’étudier les programmes des candidats et d’écouter les bons médias défenseurs de notre République.

  5. Depuis que sous F. Hollande ils ont abaissé les Allocations familiales à partir d’un certain seuil, c’est à dire pour la Classe Moyenne, il était sûr que ce Pouvoir délétère, destructeur de Nation, voulait privilégier l’immigration plus que de raison et en désordre, sans vrai encadrement…Envoyer des dizaines de milliards à l’étranger, sans Politique familiale, c’est que le Pouvoir actuel n’a pas la tête en France…

  6.  “Le jour où l’on ouvrira la première maison de retraite au Maroc, notre société sera en voie de disparition.” Assan II
    Effectivement, en Afrique, on ne meurt pas à l’
    Ehpad mais à la maison de ses enfants. Actuellement, il arrive hélas, que les africains fassent plus d’enfants qu’ils ne peuvent en élever. Cette solidarité intergénérationnelle existait aussi en Europe mais elle se délite emportée par l’individualisme ambiant.

  7. Il faudrait déjà commencer par mettre ou remettre tout le monde au travail et ne pas donner de retraite à ceux qui n’ont jamais travaillé en France (oui il y en a) et supprimer toutes les aides à ceux qui n’ont rien à faire en France. Il y a tellement de ménage à faire dans la maison France, que l’on ne sait plus par quel bout commencer. Bon courage au successeur de notre Jupiter.

  8. Le déclin de la France n’est pas une fatalité mais bien une volonté de destruction , lu sur un médiat connu .

  9. A propos de cette réforme des retraites nous entendons de multiples âneries . Par exemple, sur nos ondes, par de distingués commentateurs : « les jeunes générations auraient à se sacrifier pour les retraités actuels lesquels, tout à leurs aises, ne seraient pas sollicités par cette réforme ?  » . Ces retraités pourraient proposer à ces jeunes générations la réponse suivante : « Nous souhaitons à ces jeunes générations qu’ils agissent au mieux afin qu’ils obtiennent en retraite le confort qu’ils nous envient. Par exemple, travailler 48 à 50 heures par semaine comme nous l’avons fait, voire plus compte-tenu de l’amélioration des conditions de travail et de la modernisation des outils faciliteurs ». Mais il ne faut pas espérer des réactions positives. Aujourd’hui, le salarié ou fonctionnaire commence à travailler et recherche immédiatement sa date de départ à la retraite. Fatigué avant d’avoir commencé. Dans le passé les salariés commençaient à y penser à 50/55 ans. Tout évolue.

    • Votre discours est une honte et une insulte à ceux qui vous rémunèrent. On ne crache pas impunément dans la main qui nous nourrit.
      Quant à vos élucubrations sur le temps de travail, j’ai au contraire vu beaucoup de « vieux » ne pas en faire beaucoup au travail, disant même aux jeunes de lever le pied pour que les chefs ne voient pas qu’eux ne foutaient rien. J’en connais une autre âgée maintenant de 62 ans, qui était encore au lit quand je partais au lycée à 8h du matin… mais aujourd’hui elle crache sur les jeunes qui « ne veulent pas travailler » et prétend qu’elle est de la « France qui se lève tôt ». On s’invente les histoires qu’on peut…

      Sachez qu’aujourd’hui on fait en 35 heures ce que vous faisiez en prétendument 50. Il n’y a pas de gloire pour vous là-dedans, n’est-ce pas. Et le salaire n’augmente pas chaque année comme vous l’avez connu, vieille génération trop gâtée.

      Faites attention, vieille génération, à ne pas paraître trop imbuvables envers les suivants, car la colère pourrait gronder et se retourner contre vous. Rien n’est jamais acquis, pas même la pérennité d’une pension de retraite. L’euthanasie est de toute manière dans les cartons, et le problème pourrait être réglé plus vite qu’on ne le croit.

  10. Plus j’y pense et plus je m’aperçois que le système par répartition est un système communiste et donc voué à l’échec, comme toutes les inventions communistes. Faisons notre retraite nous-même et chacun pourra choisir son âge et son montant. La solidarité est comme le reste : « le mieux est l’ennemi du bien et trop est pire que pas assez ! »

  11. Le simple bon sens, la morale, la justice, sont des qualités essentielles à la vie mais totalement étrangères à la politique de la macronie qui soumet la France au projet mondialiste destructeur des valeurs traditionnelles et fiables que les USA imposent à l’UE .

  12. Le problème de fond est qu’il faut piller les fonds de retraite privées (majoritairement excédentaires) pour financer celle des régimes spéciaux, notamment publics. Qui croit encore vivre dans une économie libérale ? Avez-vous conscience que nous sommes dans un système étatique et communiste où l’Etat met son grain de sel dans toute activité jusqu’à étouffer le peu de français qui travaillent encore réellement pour financer une masse de fonctionnaires et d’emplois fictifs. Le pire est à venir… une vie complète de labeur qui poussera les françaises et français à toucher une pension minable les obligeant de facto à continuer d’assurer une activité salariée. Je ne parle pas des indépendants qui auront peut-être totalement disparus

  13. C’est logique et de bon sens, aucune réforme qui laissera de côté le sujet de la natalité ne pourra durer et nous remettrons l’ouvrage sur la table rapidement. Par ailleurs, rallonger la durée de vie professionnelle nécessite de repenser l’organisation du travail dans les entreprises, ceci est également mis de côté.

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