[EDITO] A-t-on vu plus belle allégorie que ces poubelles ?

Paris poubelle

À Paris, les magnolias ont depuis quelques jours les feuilles plus brillantes. Les cognassiers du Japon et les cerisiers commencent à fleurir. Le printemps revient. En même temps que les touristes. Les agences de voyages ont dû leur vendre que c’était la saison idéale pour visiter la plus belle ville du monde. Devenue la poubelle ville du monde. Dans le VIe arrondissement, le quartier de la Monnaie, près du quai Conti, est très prisé. Ils sont nombreux à se promener autour de la rue Mazarine - celle de l’Institut de France, créé par Jules Mazarin - et de la rue Saint-André-des-Arts… devenues des déchetteries sauvages. Des bacs jaunes obèses débordent, des sacs gris béants, éventrés par les chiens, gisent un peu partout, entassés à la va-comme-je-te-pousse. Des cageots s’ajoutent aux vieux arbres de Noël pelés. Car les écolos si pointilleux avec le tri ont déserté et les bocaux en verre, les contenants en plastique les plus hétéroclites roulent dans le caniveau. Comme on joue au Mikado, un étudiant vient poser précautionneusement un sac tout en haut de la pyramide bancale, et puisque rien ne s’écroule, il s’en va, satisfait. Bien qu’il ne fasse pas si chaud, l’odeur est méphitique. Les mères de famille tentent de dessiner un cordon de sécurité avec leur poussette et les déambulateurs des vieux n’ont plus la place pour passer. À défaut d’un périmètre bien défini, des riverains astucieux ont rassemblé les immondices contre les chantiers de bric et de broc qui parcourent les trottoirs. Les uns masquent vaguement les autres, on ne sait ce qui est le plus moche. 

À la porte des commerce, il reste parfois l’épave d’un distributeur de gel hydroalcoolique, qui fait doucement rigoler (jaune). Et dire qu’il y a quelques mois, on nous bassinait avec l’hygiène ; le vigile nous renvoyait comme des enfants punis si, d’aventure, nous n’avions pas frotté nos mains avant de rentrer.

Mais le plus désolant, ce sont les touristes étrangers. Le soir, ils ont droit au son et lumière des Black Blocs, en journée, en fait de musée, à une exposition à ciel ouvert d’ordures ménagères. Un couple d’Américains tient bien serré un mouchoir sur le nez, avec peut-être de l’eau de Cologne, et les Asiatiques gardent leur masque vissé plus haut que jamais. Une Allemande prend des photos du désastre. Elle pourra dire qu’elle y était. Mon regard croise celui d’une passante d’âge mûr, de je ne sais quelle nationalité. Je voudrais lui dire que j’ai honte. Que la France, ce n’est pas ça, n’est-ce pas ! Qu’il faut qu’elle revienne à un autre moment. Quand on aura eu le temps de remettre un peu d’ordre dans les jolies façades du village Potemkine. Nous savons bien, nous autres Français, que notre pays est une ruine, mais comme les familles déclassées, nous voudrions donner le change et garder le secret. 

Car on peut y voir une allégorie, cruelle mais fidèle, de ce qu’est devenue Paris, aux mains d’une gauche dite progressiste, mais en fait régressiste : sous l’action combinée structurelle d'Anne Hidalgo et conjoncturelle d’Emmanuel Macron, c’est le retour en fanfare d’un Paris insalubre d’avant le baron Haussmann. Jusqu’aux rues sombres - économie oblige.

On dit qu’en décrivant la mort atroce et solitaire de Nana - défigurée par la variole : « Vénus se décomposait […] ce ferment dont elle avait empoisonné un peuple, venait de lui remonter au visage et l’avait pourri. » -, Zola avait voulu représenter la chute du Second Empire, avec les prémices de la guerre franco-prussienne. 

Les éboueurs en grève ne sont pas des écrivains, mais dans leurs œuvres, le résultat est parfois le même. 

Gabrielle Cluzel
Gabrielle Cluzel
Directrice de la rédaction de BV, éditorialiste

Vos commentaires

48 commentaires

  1. Bel article, merci.
    Foncièrement, ce qui arrive à Paris et à certaines grandes villes de France m’indiffère presque.
    Toutes les métropoles ont voté Macron et fortement écolo dès qu’il s’agit des élections locales.
    Les citadins mondialistes n’ont que le juste retour de leurs inconséquences.

  2. Bin quoi? On s’adapte! Il ne faut pas que les migrants qui arrivent en France soient trop dépaysés…..

  3. Aux dernières élections , Macron nous avait dit :  » c’est moi ou le chaos  » nous avons les deux . Un point positif , les migrants qui fuient les pays du tiers monde , quand ils arrivent en France , ils sont désormais beaucoup moins dépaysés.!

  4. Et si l’on détournait le cortège de Charles III en visite à Paris pour lui faire faire un petit tour dans ces rues envahies de clameurs et odeurs du nouveau parfum « Poubelles »….Mais le chemin de Versailles, où auront lieu les festivités, passe-il par Paris?

  5. Ma chère Gabrielle, à lire votre article, les larmes me montent aux yeux tellement je désespère de voir notre France tant maltraitées !!

  6. Paris n’est pas l’image de la France! J’invite les touristes étrangers à visiter le centre ville de Pont-Aven, pas de poubelles non vidées, pas de rats dans les rues. C’est ça la vrai France. Cette ville, il.y a des milliers comme elle, sur la terre de notre beau et cher Pays.

  7. La France ne se redresse qu’une fois touché le fond écrit Bainville. Nous plongeons et le printemps arrive. Excepté Macron, ses partisans et ses Ganelons, tout le monde a intérêt au chaos. Une révolution conservatrice serait la bienvenue, la France ne se réforme pas.

  8. Les étrangers viennent (venaient) en France et à Paris en premier pour son bon vivre, la Cuisine, les Toilettes Dior ou autres, les Vieilles Pierres : la Douce France disait-on. Et voilà, après 20 ans au moins de socialisme et de voyoucratie, tout cela a disparu au profit des Rats d’Égouts, Poubelles débordantes et l’insécurité. Bienvenue en France mais bonjour l’ambiance.

  9. Alors chers Ecolos j’espère que vous allez faire du tri sélectif lors du ramassage des poubelles !!!

  10. Oui, madame Cluzel, nous sommes nombreux à avoir honte de l’image que donne la France aujourd’hui et qu’en donne son Président. Mais cette honte ne fait que croître depuis six ans. Les mêmes qui ont appelé à réélire le responsable de cette vilénie, appellent maintenant à la révolte. Tout cela est indigne. Non, ce n’est pas, comme certains peuvent le dire, à l’Armée de ramasser les poubelles, mais à tous ceux qui ont mis un bulletin « Macron » dans l’urne l’an dernier. Au moins, ils expireraient en partie leur faute, car leur absence de réflexion est aussi coupable que le comportement de l’irresponsable qu’ils ont élu.

  11. Voilà ce qui arrive quand on ne sait pas voter … Il est vrai qu’ils n’étaient pas gâtés aux niveau des candidats, Hidalgo, Buzyn, Dati, Grivaux qui s’était heureusement éliminé tout seul … C’est fou que pour la première ville de France, la capitale!, les principaux partis n’aient présenté que cette liste de seconds couteaux. Je crois que j’aurais voté Rachida Dati, mais sans conviction. Quant au RN, il était trop loin dans les sondages, et sans reports possibles, helas.

  12. Ce n’est pas grave. Les éboueurs ne font que s’entrainer en vue des jeux Olympiques . Cela risque ne n’être pas triste au début des jeux .

  13. Paris est l’image symbolique de ce qu’on a fait du pays tout entier ! Et de la classe politique qui le gouverne !

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