Diplomatie américaine : ce que nous réserve la Maison-Blanche…

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Alors que le microcosme médiatique se focalise sur le style Donald Trump, fait de propos souvent tenus à l’emporte-pièce et d’initiatives parfois erratiques, l’État profond américain continue de pousser ses pions ; sachant que si la forme change, le fond, lui, a tendance à demeurer le même.

C’est donc à cette aune qu’il faut juger l’actuel redéploiement de sa diplomatie, laquelle n’est jamais que la concrétisation de ce qui avait déjà été initié sous les deux précédents mandats du président Barack Obama et même de ses prédécesseurs. Tout d’abord, le désengagement en Orient, sous-traité à Moscou, Ankara et Téhéran ; d’où les légitimes inquiétudes de Riyad et Tel Aviv. Puis la reprise en main de l’Amérique latine. Le Venezuela, économiquement étranglé n’est toujours pas à l’abri d’une intervention militaire. En Bolivie, le président Evo Morales, naguère pièce maîtresse de cet arc bolivarien et nationaliste, fondé par le défunt Hugo Chávez, le pétulant président vénézuélien qu’on sait, a été poussé à l’exil au Mexique.

On remarquera, d’ailleurs, que la première initiative prise après ce putsch fut de nommer un ambassadeur bolivien aux USA, rompant ainsi avec l’embargo diplomatique décrété depuis onze ans par un Evo Morales préférant privilégier des relations autrement plus cordiales avec des nations telles que la Chine, l’Iran ou la Russie. De quoi faire tousser à Washington…

Dans la foulée, c’est aussi en Uruguay que cette stratégie de reconquête de la chasse gardée américaine se poursuit, avec l’élection du nouveau président Luis Lacalle Pou, candidat de « centre droit », soit totalement inféodé à la puissance états-unienne, après quinze années de pouvoir nationaliste, fût-il de gauche ; c’est-à-dire plus préoccupé de justice sociale que des intérêts des multinationales tenant ce continent à la baguette et en coupe réglée.

Bref, les USA se recentrent sur leurs intérêts stratégiques les plus urgents : la lutte contre la Chine, première puissance économique mondiale en devenir. D’où cette loi d’urgence et à la va-vite votée pour soutenir les émeutiers de Hong Kong contre l’historique souveraineté chinoise. Rien de nouveau, une fois encore, cela ayant été théorisé depuis trente ans par la CIA dans un de ses rapports annuels qu’elle rend publics – naïveté charmante, mais immanquablement instructive – dans lequel il était prophétisé l’affrontement entre une Amérique faiblissante et une montée en force chinoise, prochaine et première force planétaire en devenir. À ce titre, Donald Trump ne fait jamais rien d’autre que de poursuivre, à sa manière, une feuille de route tracée par autres que lui.

Mais pour ce faire, encore a-t-il besoin d’avoir les mains libres sur le théâtre européen, même si ce dernier, toujours géant économique, n’est plus que nain politique. La preuve en est qu’à la moindre velléité d’indépendance française, celle d’un Emmanuel Macron, par exemple, évoquant « la mort cérébrale de l’OTAN », l’Allemagne vole illico au secours de son puissant sponsor sans lequel elle ne parviendrait plus à écouler ses machines-outils et ses berlines de luxe.

Angela Merkel, donc, qui poignarde une fois de plus l’Europe dans le dos en affirmant : « Il est dans notre intérêt de préserver l’OTAN, plus que pendant la guerre froide. » C’est dit sans rire et le reste demeure à l’avenant : « L’Europe ne peut pas se défendre seule pour le moment, nous dépendons de l’Alliance transatlantique, il est important que nous travaillions pour cette Alliance et que nous assumions davantage de responsabilité. » En d’autres mots, il faudrait donc que Berlin consente enfin à apporter son écot à une possible, future et hypothétique défense européenne. Nous en sommes loin.

Car en attendant, et ce, depuis le départ de l’Angleterre de l’Europe, façon tango, un pas en avant et deux en arrière, c’est la France qui finance, seule, la défense du continent et dont les enfants meurent, versant leur sang pour que l’essence puisse continuer de couler dans le réservoir des Mercedes.

Comme quoi une Europe germanisée n’a rien d’incompatible avec une mondialisation heureuse ; surtout pour nos chers amis d’outre-Rhin.

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Nicolas Gauthier
Journaliste à BV, écrivain

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