« Dimension prométhéenne » de l’Europe : V. Hayer ou la mythologie à contretemps !

Invitée sur France 5, cette semaine, Valérie Hayer, qui fut tête de la liste macroniste aux dernières élections européennes, a essayé d’élever le débat avec une comparaison mythologique. Citons-la pour commencer : « Il faut que l'Europe assume sa dimension prométhéenne. C'est le moment pour l'Europe d'assumer sa pleine puissance, d'un point de vue militaire, stratégique, économique, démocratique et politique. » Qu’est-ce que tout cela peut bien vouloir dire ?
Il faut que l'Europe assume sa dimension Prométhéenne.
C'est le moment pour l'Europe d'assumer sa pleine puissance, d'un point de vue militaire, stratégique, économique, démocratique et politique. pic.twitter.com/xTSKK88B5U
— Valérie Hayer (@ValerieHayer) May 18, 2025
Dans la mythologie grecque, Prométhée était un Titan, qui fut chargé par les dieux de l’Olympe de transmettre le souffle vital aux créatures de la Terre, tandis que son frère Épiméthée leur donnerait à chacune un moyen de se défendre. Épiméthée n’était pas très malin : il distribua les griffes, les crocs, la fourrure contre le froid, la rapidité et la force aux bêtes. Il ne restait rien pour les humains, les plus faibles de toutes les créatures face à l’adversité de la vie. Alors, pour corriger cette injustice, Prométhée déroba le feu au char du Soleil et l’offrit aux hommes. Pour sa peine, il fut enchaîné dans le Caucase. Un aigle venait chaque jour lui dévorer le foie (qui repoussait toujours) et il ne dut son salut qu’à l’intervention d’Héraclès.
Métaphore à contretemps
Voilà pour la légende. L’Europe, si elle était prométhéenne, serait ainsi une voleuse de feu qui apporterait à sa population trop faible les trouvailles du génie des autres. Valérie Hayer dormait donc en cours de civilisation antique, si elle en a jamais suivi, d’ailleurs. L’Histoire longue nous prouve au contraire que le sol européen a offert à ses habitants les conditions de l’aventure : explorations, inventions, textes magnifiques, mythes immémoriaux viennent d’Europe. 95 % des grandes découvertes et des prix Nobel aussi. Désolé pour les partisans du wokisme ou du décolonialisme. Mais alors, que voulait donc dire Valérie Hayer, avec cette métaphore à contretemps ?
« Assumer sa pleine puissance » à tous les points de vue, on en conviendra à la lecture de ce qui précède, n’a rien de prométhéen, puisque l’Europe n’a rien volé, bien au contraire, et que l’esprit prométhéen n’a rien à voir avec la volonté de puissance. Voulait-elle parler de dimension « faustienne », plutôt, par analogie avec le personnage de Goethe qui pousse l’hubris de la connaissance jusqu’à pactiser avec le diable ? Ce serait une piste, quoique pas très rassurante. Voulait-elle parler de la « honte prométhéenne » théorisée par Günther Anders – cette honte qui saisit l’humanité face à sa propre imperfection, en regard de la puissance parfaite de la machine ? Le lien entre ces deux possibilités est fait par Oswald Spengler dans Le Déclin de l’Occident (déjà !) : « La civilisation faustienne commence à ressentir la nausée des machines. » À force de volonté de puissance, l’homme est dépassé par ses créations techniques. Mais tout cela n’a rien à voir avec l’inculture de Valérie Hayer, qui transparaît dans son intervention à contretemps.
Ce que voulait dire la députée européenne est compréhensible : sortir de la dépendance pour retrouver notre esprit d’initiative et notre volonté d’aller de l’avant en repoussant nos propres limites. Cela, pour le coup, est un invariant de l’esprit européen. Mais pour aller au bout de son raisonnement, il faudrait que Valérie Hayer accepte de définir ce qu’est l’Europe…et surtout quel peuple sont les Européens. Cela l’emmènerait plus loin qu’elle n’est sans doute capable de l’imaginer, au-delà des fameuses « valeurs européennes », expression-valise qui lui sert de vadémécum. Alors, forcément, il est plus confortable d’utiliser à contre-emploi les mythes fondateurs de notre civilisation, surtout quand on œuvre « en même temps » au remplacement de son peuple.

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41 commentaires
vademecum est du latin et il n’y a pas d’accent en latin même si certains dictionnaires d’analphabètes mettent un accent. A priori, a posteriori, a minima ….etc sont du latin et s’écrivent sans accent sur le a. Mot à mot vade-mecum cela veut dire « viens avec moi. »
C’ est parfaitement exact et ça me surprend de la part de ‘ Arnaud Florac dont les papiers sont toujours passionnants et d’ une parfaite érudition; errare humanum est! A ce propos il y avait cette semaine dans BV un excellent article sur l’ enseignement du latin!
Oui, et alors?
À propos d’Europe, vous ne faites pas grand cas, dans vos colonnes, du rapprochement du Royaume-Uni, visant à atténuer les effets négatifs du Brexit. Parti pris ?
Je ne sais pas si l’Europe doit assumer des dimensions « Prométhéennes », mais à mon avis, l’Union Européenne ressemble plus à une « pierre de Sisyphe » que les peuples sont obligés de pousser et qui les écrase régulièrement sous ses réglementations et normes, du fait des cyclopes, gorgones et autres êtres malfaisants et bien rémunérés, imbus de leur bonne conscience, (les petits êtres gris n’existaient pas encore dans la mythologie), qui se jouent de leurs souffrances,
Bonjour,
c’est bien cette dame qui a voulu faire de …l’ingérence » dans les élections roumaines » ? ça vole vraiment bas …
Cordialement
Pour moi c’est sur elle est d’ailleurs…mais bien moins envoutante que la chanson de Bachelet!
Les amis de Macron instaurent la secte de la « raison supra universelle et constellaire irradiant l’Europe », une sorte de « raéliens aveugles ».
Une manière aussi de s’édifier une statue par eux mêmes car c’est plus sur, seuls dignitaires de leur grandeur!
Le rat et l’éléphant: « Se croire un personnage est fort commun en France: On y fait l’homme d’importance Et l’on n’est souvent qu’un bourgeois « . LA FONTAINE
Commentaire très sévère mais JUSTIFIE,…qui invite à réfléchir à la crédibilité de nos porte parole au sein de l’Administration bruxelloise…
on commence ou on continue a se désarmer on donne gracieusement nos armes et munition nous n’avons plus une usine qui produis quelque chose pour l’armée a part les avions