Crise de confiance : un peu de modestie et beaucoup de courage !

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« Chaque génération se croit vouée à refaire le monde. [La nôtre] sait pourtant qu’elle ne le refera pas. Mais sa tâche est peut-être plus grande. Elle consiste à empêcher que le monde ne se défasse. » Camus nous invitait ainsi à la modestie et au courage.

En effet, pourquoi prétendre faire mieux que les autres qui ont pu réussir. Depuis les sages de l’Antiquité gréco-romaine qui ont posé les bases de la démocratie, depuis les philosophes des Lumières, depuis ceux qui ont été capables de faire entrer la France dans la société moderne, tout a été dit et nous venons trop tard pour prétendre découvrir de nouvelles règles de la société politique. On ne peut pas réinventer ce qui l’a déjà été.

Il n’est pas nécessaire de se croire plus intelligent que les autres pour se soumettre aux fondamentaux de la vie en société. Il est seulement indispensable de savoir respecter quelques priorités de sagesse politique. Certes, gouverner est affaire de programme annoncé lors de l’élection. Mais si l’ego n’étouffe pas la raison, l’essentiel, conformément au bon sens, c’est la capacité à répondre à l’événement qui surgit sans prévenir, en prenant appui sur le peuple des citoyens. Se crisper sur le programme électoral pour faire croire qu’on a toujours raison sur la réalité des faits est une grave erreur. Il faut se tenir prêt à réagir opportunément à l’événement en prenant les bonnes mesures correspondant aux exigences et aux possibilités du peuple, car on ne se sauve pas seul. L’essentiel, c’est d’avoir raison par les solutions réalistes et non par la communication manipulatrice de l’opinion.

Toute réforme repose sur le socle de la confiance populaire, différente de la popularité partisane, idéologique ou personnelle.

C’est pourquoi une stratégie de redressement appelle la promotion d’une nouvelle majorité d’élus, dans lesquels les citoyens peuvent se reconnaître. Il est ainsi possible de mettre en place un gouvernement cohérent en convergence avec cette majorité du pays qui attend les décisions indispensables. À défaut d’union nationale qui risque d’être utopique ou tactique, il importe de mériter l’adhésion de la majorité des citoyens mobilisés pour participer à l’effort collectif, au besoin en faisant appel à la parole définitive du peuple par la dissolution ou par le référendum. Ce sont les termes mêmes de la Constitution qui proclame que « la souveraineté nationale appartient au peuple qui l’exerce par ses représentants et par la voie du référendum. Aucune section du peuple ni aucun individu ne peut s’en attribuer l’exercice. »

Le courant de l’irremplaçable confiance circule dans les deux sens, aussi bien du peuple vers le sommet que du centre vers le territoire, afin de réduire la dérive des continents entre le gouvernement et la nation. Les exemples de notre Histoire soulignent la nécessité d’un souffle civique majoritaire. Napoléon a tenu à réconcilier préalablement les composantes d’un peuple divisé. Les grandes lois de la IIIe République ont été votées par des parlementaires de tous bords. Le programme du Conseil national de la Résistance a été conçu par toutes les tendances pourtant opposées. En 1958, 85 % des votants français ont adopté la Constitution de la Ve République. Confronté à la violence des événements, de Gaulle a ressenti la nécessité de faire appel aux « Françaises, Français » en leur disant « Aidez-moi ! », et non « Faites ce que je vous dis de faire ».

Seul le souffle patriotique peut réveiller un peuple confiné, car « tout ce qui monte converge » (Teilhard de Chardin).

Paul Bernard
Paul Bernard
Docteur en droit, préfet de région honoraire, ancien préfet de la région Corse, président d'honneur de l’Association du Corps préfectoral

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