Encore un épisode de créchophobie dont notre pays, écartelé entre laïcards sectaires et chrétien-compatibles, a le secret. Voici les faits, rapportés par La Dépêche, et rien qu’elle à l’heure où sont rédigées ces lignes : le 14 décembre, sur la place Saint-Georges, à Toulouse, devait se tenir une crèche vivante animée par des enfants, avec quelques concerts de circonstance. Une bande d’une cinquantaine de trublions se sont invités. Se présentant comme des anticapitalistes, ils ont crié « Stop aux fachos » et ont insulté participants et policiers. Ils cherchaient la confrontation. Ils ont gagné : les représentations ont été annulées.

La Dépêche, détenue par le radical de gauche Jean-Michel Baylet, risque les adjectifs « crétin » et « affligeant ». C’est sans doute la peine maximale qui puisse être infligée par un journal de gauche à un groupe de personnes de gauche.

Oui, c’est affligeant et crétin de se présenter comme anticapitaliste et de s’attaquer à des chrétiens, de ne pas comprendre que l’Église catholique est sans doute la seule école de pensée encore vivante à avoir depuis toujours condamné le capitalisme pour ses excès. Le Christ, les chrétiens en sont persuadés, s’est incarné dans un enfant né au hasard d’un voyage dans une crèche, confié à un père simple artisan : ce n’est pas un nanti, un puissant, un riche, mais un humble qui n’avait « pas de pierre où poser sa tête » (Mt 8, 20). Le catholicisme social est né au XIXe siècle en réaction aux excès du capitalisme naissant et n’a pas, comme le marxisme, le sang de cent millions de personnes sur les mains. La doctrine sociale de l’Église, qui a été élaborée dans son sillage, est l’outil métapolitique le plus puissant pour servir le bien commun[ref]Catéchisme de l’Église catholique, § 2425[/ref]. Lire ou relire l’encyclique Laudato si' du pape François convainc aisément de l’incompatibilité viscérale entre la logique sans frein de maximisation de l’intérêt individuel chère à Adam Smith et les enseignements donnés par Jésus-Christ il y a vingt siècles.

Mais se borner à dire que c’est crétin et affligeant n’est pas suffisant. Il convient d’oser le terme « totalitaire ». Les anticapitalistes, antifascistes et autres ultra-gauchistes veulent imposer à tous, si besoin par la force, une « pensée » unique : la leur. Si La Dépêche critique bien cet accroc à la liberté de pensée, elle se révèle incapable d’oser ce mot tabou. La gauche de gouvernement (tout comme la droite molle) témoigne depuis longtemps d’une indulgence coupable vis-à-vis de cette frange radicale de sa mouvance idéologique[ref]Peut-être à la seule exception (discutable) de Jean-Pierre Chevènement[/ref]. Les Black Blocs se gaussent à raison et jouissent d’une impunité plus que suspecte qui les conforte dans leurs actions.

Les chrétiens peuvent tendre l’autre joue, en se rappelant la huitième des Béatitudes[ref]« Heureux êtes-vous si l’on vous insulte, si l’on vous persécute et si l’on vous calomnie de toutes manières à cause de moi. Soyez dans la joie et l’allégresse, car votre récompense sera grande dans les cieux » (Mt 5, 11-12)[/ref]. Mais ils peuvent (et parfois doivent) aussi, sans commettre de faute, user de violence dans les cas de légitime défense[ref]Catéchisme de l’Église catholique, § 2263 et suivants[/ref]. C’est aussi le devoir de l’État de prévenir, quand il le peut, et de punir de tels comportements. L’article de La Dépêche ne fait pas mention d’interpellation ou de garde à vue, sans doute parce qu’il n’y en a pas eu. Quitte à passer pour un vieux con, est-il permis, encore une fois, de déplorer cette faillite absolue du pouvoir régalien dans ses obligations les plus élémentaires ?

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15 décembre 2019 à 17:41

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