Claude Chollet : « Chacun peut mettre ce qu’il veut pour définir ce qu’est un discours de haine ou extrémiste »
Le site de l'Observatoire du journalisme (OJIM) a subi, la semaine dernière, une attaque informatique le rendant indisponible pendant presque 24 heures. Auparavant, sans que puisse être établi un lien, l'OJIM a été l'objet d'une censure de la part d'un réseau social.
Réaction de Claude Chollet, président de l'OJIM, qui en profite pour revenir sur la loi Avia et ses conséquences pour la liberté d'expression.
Votre site a été mis hors service pendant près de 24 heures. Que s’est-il passé ?
Il faut revenir en arrière pour replacer tout cela dans le contexte de la loi Avia.
Avia est une députée d’origine congolaise. Ce projet de loi n’est pas encore mis en application, mais est en train d’être voté. Il prévoit de sanctionner les réseaux sociaux, en particulier Facebook, s’ils ne censurent pas ce que la loi appelle « les discours de haine et extrémistes ». Dans le cadre de cette loi, les internautes sont encouragés à dénoncer ce type de discours auprès des dirigeants des réseaux sociaux pour qu’ils les suppriment.
Le problème est que chacun peut entendre ce qu’il veut dans cette définition. L’objet de la loi est en fait de marginaliser un certain nombre d’opinions. Le 6 juillet, nous avons publié une lettre de lecteur assez critique sur le journaliste français, Alain Duhamel. Cette lettre n’était ni insultante ni diffamatoire. Elle rappelait son parcours universitaire, pas extrêmement brillant, et son parcours professionnel qu’il doit beaucoup à ses relations familiales et amicales. On peut avoir l’opinion contraire et avoir beaucoup d’estime pour monsieur Duhamel. Le 22 juillet, 16 jours plus tard, Facebook supprimait tous les liens URL vers l’article. L’article n’était plus disponible sur Facebook.
Une semaine plus tard, nous subissons une attaque qui a rendu le site indisponible pour un peu moins de 24 heures. Nous ne pouvons affirmer à 100 % qu’il y ait un lien entre l’article sur Alain Duhamel, la censure de Facebook et l’attaque. La coïncidence nous paraît néanmoins pour le moins curieuse. Je dirais même inquiétante...
C’est assez fascinant qu’un article parlant de la censure sur Facebook ait été censuré par Facebook…
Depuis une douzaine d’années, nous avions bénéficié d’une assez franche liberté sur les réseaux sociaux. Je pourrais l’appeler la réponse du faible au fort puisque les forces économiques dominent très largement les grands médias. Mais jusqu’à quand ? Ce moyen d’expression commence à être de plus en plus usé. Nous ne sommes qu’un petit exemple, mais il y en a d’autres.
Pour des raisons professionnelles, je suis en train de relire Le Meilleur des mondes d'Aldous Huxley, qui a été publié en 1931. Contrairement à 1984, de George Orwell, où il y a rétention, dans Le Meilleur des mondes, il y a conditionnement. C’est l’abolition du libre arbitre par le conditionnement méthodique. Il ne peut y avoir qu’une seule opinion autorisée. Les opinions des autres n’existent plus et ne peuvent plus exister.
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