[Cinéma] Avatar, le retour sur grand écran de la saga woke de James Cameron…

Capture d’écran 2022-12-23 à 10.21.48

Lorsqu’il sortit en salles en 2009, Avatar fut considéré par beaucoup comme une véritable révolution de par ses prouesses techniques. Tourné intégralement en performance capture [« capture de mouvement », NDLR] sur fonds verts et bleus, le film de James Cameron nous projetait en plein XXIIe siècle sur la planète Pandora où l’ancien marine Jake Sully se voyait recruté par une puissante compagnie afin d’infiltrer le peuple Na’vi et de faire main basse sur ses ressources énergétiques. En liant son esprit à celui d’un avatar, un corps biologique à l’apparence de Na’vi capable de survivre dans cette atmosphère irrespirable pour un humain, Jake Sully se familiarisait peu à peu aux autochtones et finissait par embrasser leur cause contre l’envahisseur venu du Ciel…

Treize ans après cette relecture postmoderne de Danse avec les loups, la suite débarque sur nos écrans. Avatar, la voie de l’eau a tenu compte des années écoulées. Jake Sully, sous le surnom de Toruk Makto, est devenu une figure héroïque de la résistance contre les humains et a fondé une famille. Ce qu’il ignore, c’est que le colonel Quaritch, son ennemi de jadis, est de retour. Tué dix ans plus tôt, son esprit et sa mémoire ont été transplantés dans un avatar. Motivé plus que jamais à traquer Jake Sully, Quaritch va mettre le feu à Pandora et pousser notre héros à trouver refuge avec sa famille auprès des peuples de la mer. Une fausse bonne idée qui risque bien de mettre en danger ces populations, jusque-là épargnées…

Si Avatar 2 nous abreuve d’effets spéciaux époustouflants et vidéoludiques ad nauseam, force est d’admettre que cette suite n’apporte pas grand-chose au premier film, si ce n’est que l’on apprend comment toute cette opération militaire est financée par les humains. Une pauvreté scénaristique que mettent en exergue les autocitations du cinéaste : Abyss, mais surtout Titanic, auquel nous renvoie le naufrage final.

Sur le fond, les discours idéologiques n’ont pas changé : on a droit à cette espèce de fausse mauvaise conscience narcissique de l'homme blanc occidental qui jouit de se représenter à la fois comme la plus grande pourriture de la création et comme le sauveur des opprimés (néocolonialisme ?), Cameron ne voyant pas que cette posture salvatrice est justement ce qui rend possibles les abus qu'il prétend dénoncer… Pour lui, le salut de l'homme occidental ne peut passer que par le posthumanisme (le fait de prendre un avatar), par la condamnation de sa propre civilisation et par le métissage inéluctable. Ce qui, paradoxalement, ne l’empêche pas de célébrer le tribalisme, les traditions ancestrales et les cultures autochtones : en l’occurrence, un gloubi-boulga souvent risible (paroxystique chez le personnage de Spider) entre les civilisations amérindiennes, africaines, voire vikings (!). Un pot-pourri de stéréotypes qui en dit long sur la considération réelle de Cameron pour chacun de ces peuples – certains spectateurs ne manqueront pas de crier au nivellement et à « l’appropriation culturelle ». Mais tout cela, on s’en doute, n’est pas intellectualisé par le cinéaste. Lequel idéalise sans nuance l'homme primitif, forcément uniforme. Soit le mythe du « bon sauvage » en harmonie avec Gaïa… La spiritualité des Na’vi est traitée de façon identique : une sorte de panthéisme new age qui puise autant dans le taoïsme (« la voie n'a pas de commencement ni de fin ») que dans le christianisme (« tu retournes à la terre »).

Enfin, Cameron faisait mine au départ de défendre un modèle de société quasi matriarcale et pacifique alors que c'est le chef guerrier qu’il valorise en dernier lieu. Des valeurs verticales et viriles qu'il ne manquerait sans doute pas de réprouver concernant sa propre civilisation…

Récemment, le réalisateur s’est montré très virulent envers les films de super-héros standardisés, mais contrairement à lui, ceux-là proposent des archétypes positifs à la jeunesse et s’abstiennent de distiller chez cette dernière les poisons de la haine de soi…

2 étoiles sur 5

Pierre Marcellesi
Pierre Marcellesi
Chroniqueur cinéma à BV, diplômé de l'Ecole supérieure de réalisation audiovisuelle (ESRA) et maîtrise de cinéma à l'Université de Paris Nanterre

Vos commentaires

8 commentaires

  1. Comme souvent on est déçu du 2eme volet d’une production qui a tout dit dans son 1er. Il n’y a plus de surprise tant dans l’originalité de l’histoire (les terriens sont les envahisseurs) que dans les effets spéciaux époustouflants. Une étrange ressemblance avec l’histoire coloniale des blancs en Afrique bleue finit de nous décevoir pendant 3 trop longues heures… Décevant.

  2. Excellent divertissement, cet univers vous laisse collé au siège, 3 heures passent en un éclair. Une ode à notre chère Gaïa gâchée par 1% de cons, qui sont mieux que vrai.

  3. Cameron a un petit problème d’inertie. L’époque a changé trop vite pour qu’il puisse adapter son film car, c’est maintenant connu, le wokisme ne fait pas recette.
    À l’image des dernières productions Disney+, les films wokes continuent à sortir alors même que les actionnaires (et le public) n’en veulent plus, comme en témoignent les licenciements des directeurs surfant trop sur cette idéologie.
    Dans le dernier film d’animation Disney, le bourrage de crâne destiné à fanatiser les enfants est bien visible. Je suis certain que les parents consciencieux ne laisseront pas leurs enfants regarder ce genre de programmes politiques.

  4. C’est tellement trop que ça m’empêche même de rêver. Impossible, comme dans un bon roman, de pouvoir s’identifier a minima avec un des personnages. Et quant aux habitants, tous des clones, standardisés, le monde idéal de demain quoi ! Film avant-gardiste au demeurant qui nous annonce la zoophilie et la fécondité inter-espèces puisque le héros de l’affaire a réussi à fonder une famille avec une créature à queue d’une autre galaxie, quand nous ne saurions pas le faire ici sur terre avec un chimpanzé. Alors, sur leur carte d’identité ils vont cocher quel chiffre pour catégoriser leur genre ?

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