C’est quoi, au fait, les « principes de la République » ?

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Dans un premier temps, on peut s’offusquer de la décision du Conseil constitutionnel qui a retoqué, la semaine dernière, un article de cette fameuse loi supposée lutter « contre le séparatisme » mais que l’on s’est empressé de requalifier en lui donnant pour objectif de conforter « le respect des principes de la République », histoire, sans doute, d'être plus positif. En effet, les « sages » ont censuré un article qui prévoyait la possibilité de refuser à un étranger la délivrance d’un titre de séjour ou de le retirer pour « rejet des principes de la République ».

Ils ont estimé les critères trop imprécis pour déterminer quels comportements pourraient caractériser un rejet. Ainsi, on peut lire dans leur décision du 13 août : « Les députés auteurs de la deuxième saisine considèrent que, au regard de l’imprécision de l’expression "principes de la République" et de l’absence de critères permettant de caractériser la manifestation d’un rejet de ces principes, ces dispositions méconnaîtraient le principe de clarté de la loi et l’objectif de valeurs constitutionnelle d’accessibilité et d’intelligibilité de la loi. » Les auteurs de cette saisine ? Valérie Rabault, présidente du groupe socialiste à l’Assemblée nationale, Jean-Luc Mélenchon, qu’on ne présente plus, et le communiste André Chassaigne, président du groupe de la Gauche démocrate et républicaine de cette même assemblée.

En effet, d'abord, qu’est-ce qu’on appelle les principes de la République ? Ces principes se limitent-ils à la devise « Liberté, Égalité, Fraternité » ? Stricto sensu, ces trois mots réunis sont qualifiés de « devise » et non de « principes » dans notre Constitution. En revanche, dans le préambule de notre texte fondamental, on lit : « Le peuple français proclame solennellement son attachement aux Droits de l'homme et aux principes de la souveraineté nationale tels qu'ils ont été définis par la Déclaration de 1789, confirmée et complétée par le préambule de la Constitution de 1946, ainsi qu'aux droits et devoirs définis dans la Charte de l'environnement de 2004. » Dans l’article 2 traitant de la souveraineté, il est écrit que « son principe [celui de la République] est : gouvernement du peuple, par le peuple et pour le peuple ».

Ensuite, effectivement, comment peut-on mesurer concrètement le rejet par une personne des principes de la République tels que définis dans notre Constitution ? Du reste, ne peut-on pas se demander si le premier séparatiste de France et, donc, le premier contrevenant à cette loi ne serait pas Emmanuel Macron lui-même qui, au mépris des principes de la souveraineté nationale, nous chante régulièrement son refrain sur la « souveraineté européenne » ?

Alors, si l’on peut s’offusquer, dans un premier temps, de cette censure (le sénateur Retailleau l’a qualifiée de « politique ». Quelle découverte !), ce n’est au fond qu’un retour de boomerang bien normal face à un texte qui n’a cessé de tourner autour du pot en ne voulant pas nommer les choses. On se souvient de l’évolution sémantique très macronienne qui a évacué du vocabulaire politique le terme « communautarisme » pour le remplacer par celui de « séparatisme », comme si, d'ailleurs, on avait acté le fait que le communautarisme avait toute sa place en France, à l'instar du monde anglo-saxon.

L’ironie de l’histoire veut que cette censure trouve son origine à gauche. Or, si l’expression « principes de la République » est marquée du sceau de « l’imprécision » (on reprend leur argument), on imagine ce qu’il en est, alors, de ces fameuses « valeurs de la République » dont ils se gargarisent matin, midi et soir.

Georges Michel
Georges Michel
Editorialiste à BV, colonel (ER)

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