Bataille du perchoir : le MoDem se rebiffe et présente un candidat

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Le torchon brûle entre les députés du MoDem et la majorité LREM. Les élus centristes n'apprécient pas de n'avoir pas été consultés pour le choix d'un candidat au perchoir. Dans un communiqué amer, Jean-Louis Bourlanges déplore la « marginalisation » et la « mise à l'écart législative » de son parti, "aujourd'hui obligé de reconnaître sa pure et simple inexistence politique". Le MoDem s'apprête donc à manifester sa mauvaise humeur en présentant un candidat à la présidence de l'Assemblée nationale.

Le MoDem, après le soutien de François Bayrou à Emmanuel Macron, lors des présidentielles, espérait plus de reconnaissance. Le premier gouvernement comprenait bien deux poids lourds, François Bayrou à la Justice et Marielle de Sarnez aux Affaires européennes. Mais, contraints de quitter leur poste pour cause de soupçons d'emplois fictifs au Parlement européen, ils ont été remplacés par deux simples secrétaires d'État, Geneviève Darrieussecq et Jacqueline Gourault : Une participation totalement marginale", selon Jean-Louis Bourlanges, pas très courtois.

Il faut dire que le MoDem manque de personnalités marquantes. Le président du groupe lui-même, Marc Fesneau, candidat au perchoir, est pratiquement un inconnu : espère-t-il sortir de l'anonymat grâce à sa candidature ? Les élus LREM, qui disposent, à eux seuls, de la majorité, n'ont guère besoin de l'appoint de 46 centristes. Ils trouvent déjà des auxiliaires dans les rangs des Constructifs, le groupe UDI, Agir et Indépendants.

Sans doute la majorité méprise-t-elle un peu le MoDem, à moins qu'elle n'estime qu'il n'est pas un allié fiable. Quand on voit le parcours de son patron, François Bayrou, depuis des décennies, il y a de quoi se poser au moins la question. Il proclame son indépendance, mais il est probable qu'il ne serait jamais devenu maire de Pau sans le soutien de son ami Alain Juppé.

En présentant un candidat, le MoDem veut donc envoyer un signal et montrer qu'il existe. Jean-Noël Barrot, son porte-parole, affirme que son parti est attaché à la réforme des institutions, qu'il sera attentif à ce que les efforts demandés ne pèsent pas sur les épaules des plus faibles, qu'il continuera de porter sa proposition de banque de la démocratie, que le gouvernement semble avoir abandonnée. Sûr que la majorité LREM, à la botte d'Emmanuel Macron, va trembler de peur et tenir compte de ces avertissements !

D'autant plus que ledit député a pris des précautions oratoires pour annoncer cette candidature : "Il n'est pas illégitime que [le MoDem] puisse présenter un candidat", précise-t-il, ajoutant – terrible menace ! – que cette candidature n'est "absolument pas" contre Richard Ferrand. Il faut bien ménager l'avenir. Et Bayrou de prévenir : "Si les adhérents MoDem ont le sentiment d'être mis de côté comme mouvement, ça créera une très grande émotion." Richard Ferrand n'en a certainement pas dormi de la nuit !

Le MoDem tiendrait dans une cabine téléphonique si François Bayrou n'avait âprement négocié des circonscriptions en échange de son soutien. Ce parti, qui a la prétention d'être « l'un des deux piliers » de la majorité, ne sert à rien à un Président jupitérien qui s'entoure d'affidés pour tenir en main ses troupes, à commencer par Richard Ferrand. Le futur président de l'Assemblée nationale a déjà laissé entendre, dans un entretien à Libération, qu'il ne quitterait pas son poste s'il était mis en examen dans l'affaire des Mutuelles de Bretagne. Les vrais copains, fussent-ils des coquins, sont intouchables.

Philippe Kerlouan
Philippe Kerlouan
Chroniqueur à BV, écrivain, professeur en retraite

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