Prostitution : loin de les protéger, les lois conduisent les “travailleuses” du sexe à l’abattoir !

Dans la nuit du 16 au 17 août, Vanesa Campos, une trans d’origine péruvienne, était assassinée dans le bois de Boulogne. Salement. Intervenue pour défendre un client dépouillé par une bande de racailles, ils se sont retournés contre elle, l’ont poignardée, frappée avec une arme de poing avant de lui tirer une balle dans la poitrine.

Des manifestations ont été organisées, certes à sa mémoire, mais surtout pour dénoncer les effets pervers de lois prises essentiellement pour satisfaire des groupes de pression – féministes, abolitionnistes, etc. – mais certainement pas, à les entendre, au profit des personnes exerçant ce qu’elles revendiquent comme un métier ordinaire : « travailleuses du sexe ».

France Culture leur consacrait le reportage des "Pieds sur terre". Le micro était ouvert aux manifestantes et ce qu’elles racontent mérite attention.

Vanesa Campos était connue des bandes de voyous qui rackettent en toute impunité les prostituées et leurs clients dans le bois de Boulogne.

« Ce meurtre fait resurgir le débat autour de la pénalisation des prostituées qui, depuis la loi du 16 mars 2016, risquent désormais jusqu’à 1.500 euros d’amende et 3.500 euros en cas de récidive »,

dit le commentateur. Une loi bien loin de déclencher l’enthousiasme chez les premières concernées puisqu’une enquête menée auprès d’elles par douze associations montre que "88 % des personnes interrogées se disent opposées à cette loi, 78 % font état d’une baisse de leur revenu et d’une précarisation cause de stress pour les 30 à 40.000 personnes prostituées en France".

Il faut en finir avec les clichés qui les font passer pour de pauvres victimes faibles d’esprit, disent-elles. Celles qui s’expriment revendiquent en effet l’exercice d’un métier, librement choisi et assumé de façon indépendante. L’une d’elles, française, explique avoir fait ce choix après vingt ans comme cadre en entreprise. Elle a "testé l’escorting par curiosité", dit-elle, puis a opté pour "cette activité professionnelle comme une autre, très éloignée des clichés qu’on véhicule". Elle en vit exclusivement depuis six ans, est autonome, et convaincue de rendre un service social. Mais, récemment agressée, elle n’a pu porter plainte de peur de voir son bailleur, ignorant de ses activités, tomber pour proxénétisme… et elle finir à la rue :

« Je ne peux pas porter plainte parce que je sais que la police, plutôt que de s’occuper de mon agresseur, commencera par poursuivre les personnes de mon entourage en les accusant de proxénétisme. »

Leur revendication est majoritairement sécuritaire. "Ces violences sont nourries et permises par tout un système de pensée, de lois et de politiques publiques qui répètent en permanence que la vie d’une pute, a fortiori trans et migrante, ne compte pas", dit une certaine Anaïs. La police leur dresse des PV pour « stationnement » ou « promenade en sous-bois », interpelle les clients qui risquent désormais jusqu’à 1.500 euros d’amende et 3.500 euros en cas de récidive, mais n’assure absolument pas leur protection contre les bandes, ces groupes de racailles qui arpentent le bois pour racketter les prostituées et casser du pédé.

"Tout le monde est obligé de s’enfoncer dans la forêt pour échapper à la police", dit un autre qui, lui aussi, a abandonné "le cadre sécuritaire" de son appartement. À cause de la Loi de pénalisation des clients et le harcèlement des abolitionnistes sur les sites de petites annonces, les clients se font rares, dit-il.

D’aucuns diront peut-être que la morale est sauve et que c’est là l’essentiel. Mais quelle morale ? Pour le confort de qui ? Marthe Richard a fait fermer les maisons closes en 1946, la prostitution a-t-elle disparu ? Non. Elle est devenue plus sordide et plus dangereuse encore.

Marie Delarue
Marie Delarue
Journaliste à BV, artiste

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