Après les voleurs de nains de jardin, les voleurs de portraits présidentiels

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On est rassuré, tout d’un coup. L’ordre règne en France. Enfin ! La preuve ? Ça correctionne sévère, actuellement, après une « augmentation de la recrudescence », comme disait Coluche, des vols de portraits présidentiels dans les mairies.

Naguère, on eut à déplorer dans notre pays des épidémies de vols de nains de jardin. On se souvient des agissements délictueux du Front de libération des nains de jardin (FLNJ) qui sévissait cruellement à la fin des années 90 et au début des années 2000. Il s’agissait de rendre la liberté à ces petits personnages qui, au fond, n’ont rien demandé à personne et vivent, été comme hiver, dans leur petit coin de jardin, souvent de banlieue. Les nains de jardin avaient droit aux grands espaces. D’où ce mouvement. En clair, dans le texte du Code de procédure pénal, peu enclin au sens de l’humour, des vols caractérisés. En 2006, le FLNJ, à travers son site Internet, comptabilisait l’enlèvement de plus 14.000 nains. Difficile à vérifier. Mais un phénomène autrement plus grave que les incendies de voitures à la Saint-Sylvestre, qui relèvent désormais de la coutume festive. Mais nous nous éloignons du sujet. Quoique...

Car ces enlèvements de portraits officiels du Président dans les maisons communes ont une dimension revendicative. Depuis le mois de février, soixante-neuf mairies, nous dit Le Figaro, ont été victimes de « décrochages » du portrait d’Emmanuel Macron de la part de militants écologistes qui ont lancé l’opération « Décrochons Macron ». À l'époque, Bruno Le Maire, qui, souvenons-nous, faillit être président de la République dans ses rêves les plus torrides (2,4 % à la primaire des Républicains en 2016), avait twitté : « Les décrochages du portrait du président de la République sont inacceptables. On ne porte pas atteinte aux symboles de la République. Soutien aux maires. » La République était en danger. Sans doute une première dans l’histoire de la République depuis que M. Thiers se fit tirer le portrait photographique. Depuis, une coutume, une tradition républicaine, comme on dit. Mais pas d’obligation légale. Chaparder la bobine encadrée du Président ne relève donc pas du sacrilège, enfin pas encore, mais du simple vol, même si, relate Le Figaro, la gendarmerie estime qu’il s’agirait d’« atteintes répétées à l’autorité de l’État ». Gendarmerie qui a passé les consignes à ses unités par l’intermédiaire de son bureau de la lutte antiterroriste…

Il faut savoir qu'il n’y a pas que dans les hôtels de ville que cette « tradition républicaine » du portrait présidentiel existe. Dans les préfectures, dans les bureaux des autorités militaires, par exemple. Je me souviens d’un chef de corps qui n’aimait pas le Président du moment. Il ne se serait pas permis de décrocher le portrait mais avait disposé devant une immense plante verte. La main verte, en quelque sorte, comme ces écolos.

Dans la Marine nationale, on appelle ce portrait un Loubet, car c’est sous le règne de ce Président que s’imposa l’usage, sur les bâtiments de la Royale, de placer le portrait présidentiel dans la salle à manger du commandant. On raconte cette anecdote qui se serait déroulée sous de Gaulle : son fils, l’amiral, rendant visite à l’un de ses camarades, commandant de bateau, découvre qu'à la place du Loubet trônait un illustre inconnu. Étonné, le fils du général demande alors qui est cet homme. « Mon père ! Vous avez bien le portrait du vôtre sur votre bateau ! » On dira que cette histoire est vraie. Cela dit, la chose ne risque pas d’arriver à notre Président.

Pour revenir à nos vols de portraits présidentiels, un petit bilan de cette affaire, en guise de conclusion : 99 auditions, 61 gardes à vue, 50 perquisitions, une dizaine de procès en mai. Certes, pas de prison pour l’instant mais des amendes. Une répression à porter au bilan positif de Christophe Castaner. En espérant que les nains de jardin ne vont pas s'y mettre.

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Georges Michel
Editorialiste à BV, colonel (ER)

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