Affaire Benalla : lorsque Benjamin Griveaux évoque l’honneur des oppositions…

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Faute de s'expliquer en toute transparence sur l'affaire Benalla, le porte-parole du gouvernement, Benjamin Griveaux, s'est défoulé en dénonçant, sur Europe 1, une "convergence des oppositions" destinée à "bloquer le fonctionnement des institutions", ajoutant que "ça n'est pas à leur honneur". Il fustige la connivence entre Danièle Obono, députée de La France insoumise, et Marine Le Pen qui ont étrillé, pendant une conférence de presse, la présidente LREM de la commission d'enquête (sans en préciser la raison : le refus d'auditionner d'autres membres du cabinet du président de la République et du ministre de l'Intérieur).

Il n'est pas certain que Benjamin Griveaux soit le mieux placé pour donner des cours de comportement et se référer à l'honneur. Cet ancien militant socialiste, qui a travaillé dans des cabinets ministériels, n'a pas hésité à suivre Emmanuel Macron dans sa quête du pouvoir. Il ne trouve pas incongru de siéger auprès de collègues issus des Républicains ni de faire partie d'un gouvernement dirigé par un ancien juppéiste. À l'Assemblée, bien que la majorité soit plus que confortable, il ne dédaigne pas de gagner des voix issues d'autres groupes politiques pour adopter les différents projets de loi.

Que les partis d'opposition profitent de cette affaire pour affaiblir Emmanuel Macron ne fait pas de doute. On ne voit pas pourquoi, même s'ils ont des objectifs différents, ils ne s'allieraient pas pour la circonstance, voire pour voter la motion de censure des Républicains. C'est sans doute, en ce moment, le seul moyen de s'attaquer à la conception jupitérienne de l'exercice du pouvoir, qui se manifeste chaque jour davantage. La réaction du porte-parole du gouvernement montre qu'il considère comme un crime de lèse-majesté qu'on ose contester la politique et l'arrogance de son patron.

Ce jeudi matin, devant la commission d'enquête du Sénat, qui l’interrogeait sur le fait que l’arrêté de délivrance de port d’armes à Alexandre Benalla invoquait sa « mission de police » – ce qui contredit les propos jusqu'ici entendus sur ses fonctions –, Alexis Kohler n'a pas opposé de démenti. On a appris également qu'il existait des conseillers communs à l'Élysée et à Matignon, ce qui semble prouver la mainmise du Président sur les décisions, même techniques, du gouvernement. C'est dire à quel point cette affaire pose des questions.

De son côté, Alexandre Benalla, dans un entretien au Monde, déclare ne pas avoir le sentiment "d'avoir trahi le président de la République" : il reconnaît seulement avoir commis "une grosse bêtise". Il dénonce, par ailleurs, "un règlement de comptes de la part de la police". Pourtant, des autorités de la présidence ont assuré qu'aucun problème de ce type ne leur avait été signalé. Personne n'a émis l'hypothèse que des plaintes sur les agissements de Benalla étaient impossibles sans risque de représailles.

En couvrant tout cela, en dénonçant l'obstination des élus de l'opposition à connaître toute la vérité, Benjamin Griveaux semble se comporter en larbin prétentieux, plus au service de son maître qu'au service de l'État. Avant de donner des leçons d'honneur aux autres, il devrait balayer devant sa porte.

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Philippe Kerlouan
Chroniqueur à BV, écrivain, professeur en retraite

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