Le vote des militaires et le « parti des putschistes »…

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« Le RN est un parti de putschistes ». Phrase définitive à graver dans le marbre. Elle est de Marlène Schiappa, qui fait dans la dentelle quand d’autres font dans leur pantalon. Le RN, un parti de putschistes, bien évidemment, parce que Marine Le Pen a appelé les signataires de la désormais fameuse lettre dite « des généraux » à la rejoindre. En démocratie, c’est par les urnes que l’on tranche les problèmes : c’était, nous semble-t-il, le sens de cette main tendue de la candidate à la présidence de la République. Rien d’autre. Mais c’est tellement bon d’avoir des fantasmes.

Et Marlène Schiappa, en bonne politique ou pourvoyeuse de fantasmes, comprend les choses comme elle veut bien les comprendre, c’est-à-dire de travers. Donc, le RN est un parti de putschistes. Ce qui est assez drôle quand on fait un peu de généalogie politique et qu’on regarde l’Histoire. En effet, Jean-Marie Le Pen, fondateur du Front national - au cas où cela aurait échappé à certains -, se tint à l’écart du putsch des généraux de 1961, putsch qu’il aurait du reste, à l’époque, qualifié d’« incohérent et débile », si l'on en croit le livre du journaliste Alain Rollat, paru en 1985, Les Hommes de l'extrême droite. Quant à l’OAS, le Menhir n’en fut jamais : « J’étais un parlementaire, pas un desperado », écrit-il dans ses Mémoires (Fils de la nation), ajoutant : « Il me semblait utile, pour maintenir l’unité d’une France au bord de la guerre civile, d’agir dans la légalité. » On a vu des promoteurs de pronunciamiento plus virulents ! Mais bon, encore une fois, retenons que le Rassemblement national est un parti de putschistes, les temps n’étant pas à la nuance.

Alors, quand on découvre, si l’on en croit Le Monde du 30 avril, que « quatre militaires sur dix votent pour l’extrême droite » (traduire 40 %), on se dit qu’il n’est plus temps de jouer à se faire peur mais d’avoir franchement la trouille. « Les militaires et, globalement, les forces de l’ordre votent davantage à l’extrême droite [selon l’expression consacrée] que la moyenne de la société française », explique le journal de référence. Et de citer quelques bureaux de vote emblématiques comme celui de Mailly-le-Camp, dans l’Aube, qui a voté à 50,4 % pour la liste de Jordan Bardella aux élections européennes de 2019, ou encore le fameux bureau n° 10 de Satory, à Versailles, constitué en très grande partie de gendarmes mobiles et de leurs familles, qui avait voté, lui, à plus de 60 %, en 2015, pour le Front national, après les attentats. Toujours à Satory, en 2012, l’ensemble de la droite avait obtenu plus de 82 % des voix.

L’armée est plus à droite qu’à gauche ? Rien d’étonnant et de nouveau, les valeurs de patriotisme, d’ordre, de verticalité, de sécurité sont, à l’évidence, plus marquées à droite qu’à gauche.

Mais alors, faut-il s’effrayer d’un tel état de fait ? Bien évidemment non. Et le pouvoir le sait très bien. Rien de plus légalistes que l’armée française et les militaires qui la composent. Et tant pis pour les fantasmes ! Les militaires et, plus particulièrement les gendarmes, sont en première ligne pour défendre les institutions républicaines. Mais ils n’en pensent pas moins, à 40 %, voire plus... C’est, du reste, la grande différence avec certains individus de certaines autres institutions de notre République. La Justice, par exemple. Pensons au mur des cons et transposons. Que n’aurions-nous entendu si l’on avait découvert, dans une caserne de gardes républicains, chargés d’assurer la sécurité et les services d'honneur de la présidence de la République, du Sénat et de l’Assemblée nationale, un mur des cons où auraient été épinglés nos têtes de gondole de la politique française ? Imaginons un instant...

40 % des militaires votent peut-être à « l’extrême droite » mais le pouvoir peut dormir sur ses deux oreilles : il ne devrait pas avoir à faire appel aux banlieues pour le sauver des factieux !

Georges Michel
Georges Michel
Editorialiste à BV, colonel (ER)

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