L’avantage, avec les impostures, c’est qu’elles durent généralement moins longtemps que les impôts ; la preuve par la rocambolesque affaire de la désormais fameuse Ligue du LOL. Pour aller court, ça tangue au Moralistan, terre de contrastes, s’il en est.

Comme pour les ouragans, il y avait pourtant eu des prémices. Harvey Weinstein, par exemple, dont le studio Miramax, naguère indépassable Annapurna de la « hype » et de « l’arty », idole d’une sorte de "médiocratie" ; un peu comme ici avec un autre symbole de "coolitude" : Dominique Strauss-Kahn, sans oublier cet autre féministe de choc qu’est Denis Baupin. D’où l’éphémère mouvement #MeToo, monument de modernité triomphante, avant que le bel édifice ne s’effondre, la faute à Asia Argento, walkyrie un peu harpie, partie en guerre contre les harceleurs mâles alors qu’elle n’était qu’une harceleuse femelle.

Plus récemment, l’affaire Bilal Hassani, jeune futur (et ex ?) espoir de la France à l’Eurovision, bousculé sur les réseaux sociaux en raison d’un look et d’une homosexualité plus ou moins affichée, aurait dû mettre la puce à l’oreille du plus avisé des climatologues experts en vents mauvais. Ainsi, le 30 janvier dernier, dans l’émission "Touche pas à mon poste", Cyril Hanouna estimait qu’à l’occasion de cette polémique, la majeure partie des médias demeurait dans "le bon camp". Ensuite, ce "camp" était-il forcément le "bon", sachant que des tweets de jeunesse de Bilal Hassani le donnaient pour sévère avec la politique israélienne et d’une bienveillante neutralité vis-à-vis d’un autre personnage tout aussi controversé que lui : l’humoriste Dieudonné, qui en connaît plus qu’un rayon en matière de diabolisation médiatique.

Au risque du mauvais jeu de mots, on risquera donc à dire que le "bon camp" aurait un peu tendance à perdre les pédales. Ne riez pas, un tel calembour, à propos de la recherche sur le SIDA, a coûté, au siècle dernier, sa place à Martin Veyron, alors dessinateur vedette du défunt quotidien InfoMatin. Et le feuilleton "lolesque" de prendre toute sa saveur quand les principaux incriminés comptent parmi les plus zélés des actuels moralistes.

Ce sont, ainsi, six journalistes qui viennent de perdre leur boulot ; et quand on sait à quel point un CDI vaut, dans la profession, figure de Graal, l’information n’a rien d’anodin. Au rang des exclus, Alexandre Hervaud, numéro trois du site Web de Libération, Vincent Glad, de Brain Magazine, David Doucet, patron du site Web des Inrockuptibles, Stephen des Aulnois, celui du Tag parfait, Guilhem Malissen, des Nouvelles Écoutes, et Renaud Loubert-Aledo, de chez Publicis. Il y aurait donc du vent dans les voiles, chez les CSP+…

Car au-delà de la tourmente médiatique, il y a évidemment ce mépris de classe affiché par ces gommeux à l’égard d’autres moins bien nés qu’eux. Leurs victimes d’alors ? Des personnes isolées. La blogueuse féministe en surcharge pondérale. L’homosexuel tout seul dans son coin. Les deux ne bénéficiant pas plus d’appuis mondains que de carnet d’adresses. Et nos gandins de se retrouver, aujourd’hui, dans une situation des plus inconfortables, celle du maître en vertu poissé dans le pot de confiture ou les bras d’une prostipute. On remarquera qu’un Benjamin Griveaux, stigmatisant "ceux qui fument des clopes et roulent au diesel", ou un Bernard-Henri Lévy évoquant, à propos des gilets jaunes, "la montée en puissance des fachos" n’étaient pas en reste quant au harcèlement de plus faibles qu’eux.

Alors, bien sûr, américanisation de la société française oblige, les pénitents mettent désormais en scène leur repentance. Un Laurent Joffrin, "mogul" de Libération, quotidien qui, paradoxalement, a lancé le bidule dans sa rubrique "Checknews, assure aujourd’hui se "sentir meurtri". Pauvre petite chose. Il le sera sûrement plus encore à l’annonce de la plainte portée par SOS Racisme. Car plus fort que le fameux « arroseur arrosé », il y a encore le serpent qui se mord la queue et, surtout, les loups qui se bouffent entre eux.

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12 février 2019 à 17:53

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