Vincent Verschuere, condamné pour le bruit et l’odeur de ses vaches : « Aujourd’hui, le juge dit qu’il ne faut plus d’éleveurs à la campagne »

270198219_100132942556772_2719200920854328038_n

Le verdict vient de tomber. Vincent Verschuere est abasourdi. Au terme d’une éprouvante bataille judiciaire qui dure depuis dix ans, l’éleveur à Saint-Aubin-en-Bray (Oise) est condamné par la cour d’appel d’Amiens à payer 102.000 euros de dommages et intérêts à des voisins, et remédier dans un délai de trois mois « aux troubles anormaux du voisinage ». La décision de la cour d’appel n’a pas ordonné la démolition des bâtiments mais impose à l’éleveur de « trouver des solutions techniques » pour réduire les nuisances olfactives et sonores dont se sont plaints les riverains.

L’éleveur se désole : « Personne ne comprend cette décision. On nous a refusé un expert judiciaire. Nous l’avons donc fait venir à nos frais. Il a relevé qu’il n’y avait rien d’anormal, ni bruit, ni odeur, ni mouches. Mais cela n’a pas été entendu. Les services de la DDPP [Direction départementale de la protection de la population, NDLR] sont venues maintes et maintes fois sur plaintes des riverains et ont toujours constaté que l’exploitation était tenue correctement, qu’il n’y avait pas la moindre anomalie, mais toutes ces choses-là ont été écartées. On a l’impression d’être jugé d'office à charge. Les nuisances ne sont pas dues à notre fonctionnement mais du fait d’être là simplement. »

Vincent Verschuere compte bien se battre, mais ses marges de manœuvre se réduisent. Il se dit « au pied du mur », ne voyant pas ce qu’il peut proposer comme solution si ce n’est vendre son cheptel et fermer une exploitation qui vit depuis quatre générations. Cette construction litigieuse avait pourtant vu le jour pour répondre aux normes imposées. Inextricable paradoxe. Avec un investissement de 600.000 euros en 2010 et 50 % des travaux réalisés par lui-même, il installe à seulement dix mètres de ses anciens hangars un bâtiment moderne, soucieux de l’environnement et du bien-être animal : salle de traite équipée d’un régulateur électronique pour réduire le bruit, sol en total paillé pour réduire les odeurs, fosse de stockage des eaux de salle de traite sous le bâtiment, bardage bois plus écologique et plus esthétique, et ajourné pour une meilleure ventilation de l’air et confort des animaux…

Dix ans de procédure judiciaire

Mais cette construction se trouve à moins de 100 mètres des premières habitations, par une dérogation préfectorale qu'il obtient à l'époque. Les riverains portent l'affaire en Justice et obtiennent l'annulation du permis de construire en 2013. Mais le chantier était à 70 % terminé, il l'a continué, sûr que le conflit se désamorcerait de lui-même. S'ensuit une bataille judiciaire de dix ans que relate Terres et territoires : « En 2014, la mairie se pourvoit en appel mais le jugement est confirmé. L’affaire va jusqu’en cassation, où le dossier est refusé. Le jugement devient définitif en 2014. » Les riverains demandent ensuite la démolition ainsi que des dommages et intérêts, qu'ils obtiennent en 2018, mais l'éleveur fait appel. Mardi, les juges rendaient cet avis : « Le bâtiment accueillant les bovins [...] dispose d'une façade complète ouverte sur l'extérieur, ce qui ne permet aucune isolation véritable contre la diffusion des odeurs et du bruit », donnant gain de cause aux voisins.

« On a le sang de la terre qui coule dans nos veines »

Une désolation pour celui qui travaille sept jours sur sept, 365 jours par an. « Je n’ai que 33 ans, j'ai toujours grandi avec cette passion, je suis né dans cette exploitation, on a le sang de la terre qui coule dans nos veines, et forcément on s’inquiète pour l’avenir. » Il redoute, par ailleurs, une décision qui fasse jurisprudence pour tout riverain qui vit à proximité d’une ferme désormais. Et de relever cette « incohérence totale : d’un côté, on prône la souveraineté alimentaire, et de l’autre, on vous enlève votre outil de travail. Soit on fait le choix et on assume totalement qu’on ne veut plus d’élevages en France et qu’on préfère simplement des villages dortoirs, qu’il n’y ait pas le moindre bruit, la moindre odeur, et on fait venir de l’étranger, soit on accepte qu’il y ait de l’activité dans nos campagnes. »

La proximité oui, mais loin de chez moi, en somme. Ironie du sort : cette décision judiciaire tombe au lendemain du Salon de l'agriculture, tandis que tous, politiques et citadins, vantaient la qualité des produits locaux et se pressaient pour prendre sa photo devant une vache... Valorisés un jour et dénigrés un autre pour leurs bruits ou leurs odeurs, curieuse façon de soutenir nos éleveurs. L'agriculture, mais pas dans mon salon !

Iris Bridier
Iris Bridier
Journaliste à BV

Vos commentaires

67 commentaires

  1. Soutien total à cet éleveur , les autres n’ont pas leur place dans cette France rurale qui se bat pour tenter de nous préserver et de nous sauver de ce mondialisme mortifère.

  2. Je parie qu’il y a aussi des gens qui vont vivre au bord de la mer et qui voudraient qu’on fasse taire les goélands et qu’on arrête le vent… Enfant je vivais à côté d’une ferme et j’aimais entendre les animaux, vaches, coqs, moutons, canards, et les odeurs ne me dérangeaient pas. La campagne c’est un tout, à prendre ou à laisser. Cette condamnation est immonde.

    • Il y a bien des touristes qui se plaignent auprès des offices de tourisme que les cigales font trop de bruit …

      • J’habite en Provence et j’ai hâte d’entendre les premières cigales… Il y a aussi les petits oiseaux, les grillons et les crapauds, j’adore ça ! Parallèlement il y a des gens qui laissent pleurer leur bébé pendant des heures…

  3. Une question et une seule que je voudrais poser à ce petit juge : Qui des riverains et de l’éleveur est arrivé le premier sur les lieux de l’exploitation ? Question qui hélas restera sans réponse.

  4. On oublie que Drucker a construit sa villa sans permis dans une zone protégée et qu’il y habite toujours .Quand on va vivre à la campagne on sait ce qui nous attend mais nous savons tous que certains veulent tout y changer .De nombreux exemples l’ont déjà prouvé .Ce qui est sidérant c’est que la loi puisse leur donner raison .Si de ma campagne je pars en ville et j’exige l’arrêt de la circulation pour cause de pollution et de bruit , un petit juge me donnera t’il raison .J’en doute .

  5. Je suis attristé par cette condamnation , tous ces bobos écolos des villes qui veulent vivre à la campagne sans bruit, sans odeur , sont hors sol
    Vu déjà les difficultés des paysans , de leurs conditions de vie , ils n’avaient vraiment pas besoin de cela
    Quand nos paysans auront disparu , ils « boufferont «  de la merde industrielle , chinoise , américaine
    Au secours, ils sont devenus fous !

  6. Il est scandaleux de donner raison à des riverains qui sont, d’eux-même, venus s’installer à coté de cette ferme et qui refusent maintenant d’en supporter les nuisances. Comme pour le chant du coq ou les cloches, celui qui décide de s’installer quelque part doit, de lui-même, vérifier s’il n’y a rien qui puisse ultérieurement le gêner.
    Les bobos-écolos de la ville commencent, comme disait Ventura (Audiard) à « nous les hacher menu ».

  7. Ces riverains qui sont arrivés après, souvent bien après l’existence de l’exploitation, sont responsables de leur irresponsabilité !
    Les juges sont tout aussi irresponsables, mais ça, ça fait trop longtemps que nous le savons que !

  8. La puissance des lobbies destructeurs gangréne la soit disant justice… j’imagine que c’est beaux costards ne se sont même pas déplacés pour constater…
    Reste à espérer que nous ne soyons pas en face d’un futur suicidé…
    Quelle indécence !

  9. A « antisystème 59 » : Vous n’appréciez pas tellement les exploitants agricoles, dites-vous. Je suppose que vous ne vous nourrissez pas que de l’air du temps ! Alors, ayez un peu plus de considération pour ces forçats de la terre qui nous nourrissent, et pour les paysans français, de manière très correcte. J’observe que vous avez le bon sens de vous demander qui sont les voisins. Ceci compensant celà. Cordialement.

  10. Il est fou ce JUGE ! de quoi se nourrit-il ? C’est aux plus gênés de dégager du lieu qui les incommode et s’installer en VILLE ainsi, ils auront ainsi de nouvelles sensations, d’autres odeurs : fumées d’usines, bruits divers, fumées et poussières générées par la circulation intense de toutes sortes de véhicules, les rodéos sauvages qui animent les quartiers soirs et nuits, les prières hurlées dans les ampli. des mosquées etc.. Ils comprendront et regretteront la douceur de vivre à la campagne.

    • Il y avait trois  »juges » (et pas un) à qui l’ENM, pépinière islamo-bobo-gauchiste a confié la mission non plus d’appliquer le droit mais des consignes politico-syndicales . Il faudra dissoudre tout le corps judiciaire et le recréer sans les juges rouges ou incompétents dont les dossier sont accablants ( heureusement quelques centaines seulement)

    • Une solution : faire le blocus du juge et des plaignants, les empêchant formellement de consommer tout produit de la terre, végétaux, animaux, vin, eau de source, etc.
      Il est grand temps d’éradiquer la c….rie !

    • Tout à fait d’accord, mais il y a un point qu’il faudrait revoir. Le permis de « re »construire l’étable aurait dû être donné pour une construction AU MÊME ENDROIT ce qui aurait évité tout conflit postérieur, une faute, à mon avis, a été commise au moment de la délivrance du permis de construire. J’aimerais avoir l’avis d’un juriste sur ce point. MERCI.

  11. Il faudrait aussi savoir qui est arrivé le premier entre l’agriculteur et le voisinage. En effet si l’agriculteur possède une exploitation familiale sur plusieurs générations, alors ce sont les voisins qui sont arrivé âpres, et donc ont construit en toute connaissance de cause de la « gêne » occasionnée par l’élevage, et ce, même si l’affaire porte sur l’agrandissement de l’exploitation.
    Enfin si la permis a été accordé, alors c’est l’État qui est responsable

    • Oui.
      Chez nous, il y avait une « usine à gaz » (en fait d’énormes citernes de gaz pour ravitailler la ville et les environs) depuis des dizaines d’années;
      Est arrivé un maire qui a octroyé des permis de construire à tout va au ras de cette usine/dépot, classé Soveso .
      Résultat, ces nouveaux habitants sont arrivés à faire démolir ce lieu, pourtant situé à l’origine à un endroit non dangereux pour le vulgum pecus!

      • Tout comme certains de nos édiles incompétents donnent des permis de construire là où ils savent qu’un jour il y aura un drame.

      • J’habitais une région où l’on a donné des permis de construire dans une zone inondée tous les ans. Le nom donné par les promoteurs?
        « Les Castors »…

  12. Dans un futur probable, lorsque nous aurons des muezzins qui lanceront l’appel à la prière à 4h du matin, bizarrement, nous n’entendrons nullement parler de de trouble de voisinage.

    Nous ne sommes pas dans une fiction populiste dystopique catastrophiste.

    Déjà, les rodéos nocturnes valent aux plaignants agressions et représailles, sans même émouvoir les pouvoirs publics.

    Donc…..

    Deux poids, deux mesures.

  13. Je n’apprécie pas tellement les « exploitants agricoles », mais là, qui sont les voisins ? L’explication est peut-être là !

    • Vous êtes alors comme le JUGE, vous n’aimez pas les exploitants agricoles mais alors quelle nourriture prenez-vous au quotidien pour vivre ? sans blé, sans lait, sans fruits sans légumes, sans diverses viandes, sans diverses volailles, sans oeufs, sans lapins etc… et comment les peuples pourraient-ils se nourrir sans exploitants agricoles ???

    • ANTISYSTEME59, vous êtes alors comme le JUGE pour ne pas aimer les exploitants agricoles mais alors quelle nourriture prenez-vous au quotidien pour vivre ? d’amour et d’eau fraîche peut-être ? car sans blé, sans lait, sans fruits sans légumes, sans diverses viandes, sans diverses volailles, sans oeufs, sans lapins etc…personne ne peut vivre. Au début de notre HISTOIRE, il y a eu les chasseurs-cueilleurs et c’est grâce à eux si vous et l’HOMME en général existent encore sur cette planète.

    • Vous n’appréciez pas tellement vous dites mais alors que mangez-vous ??? Ce sont bien des exploitants agricoles qui travaillent 7 /7 pour pas grand chose qui vous nourrisse à moins que aimiez mieux manger des ogm et autres saloperies venant des états-unis

    • que tu n apprécies pas on s en tape mais les voisins de l exploitants sont ignobles s ils ne sont pas à leur aise qu ils ailles ds une cité après ils pourront emmer… le monde mais qui sait peut etre le juge est un parent ou un ami des plaignants

    • Vous êtes donc comme le JUGE puisque vous dites ne pas apprécier les exploitants agricoles mais de quoi vous nourrissez-vous au quotidien pour ne pas mourir de faim ? car sans blé, sans lait, sans fruits, sans légumes, sans diverses viandes, sans diverses volailles, sans oeufs, sans lapins etc…personne ne peut vivre. Au début de notre HISTOIRE, il y a eu les chasseurs-cueilleurs et c’est grâce à eux que l’HOMME existe encore sur cette planète.

  14. Je suis allé voir sur google Maps. On ne peut pas reprocher à ce fermier d’avoir voulu s’agrandir et d’avoir investi dans des bâtiments supplémentaires pour développer sa ferme et nous nourrir. Il est évident qu’il ne fallait pas donner de permis de construire des maisons aux abords même de son établissement. En plus ça se passe dans un « trou perdu » pardon pour St Aubin en Braye j’adore la campagne.

    • C’est ce que je disais plus haut. Cette sentence est d’autant plus injuste si des maisons ont été construites après la nouvelle étable.

Commentaires fermés.

Pour ne rien rater

Les plus lus du jour

L'intervention média

Les plus lus de la semaine

Les plus lus du mois