Julien Damon est chroniqueur au Point et aux Échos, et professeur associé à Sciences Po. Il dirige, également, une société de conseil et a appartenu, un temps, au cabinet de M. Fillon, alors Premier ministre.

Dans un article du Point, il propose une mesure révolutionnaire : taxer les pensions des retraités de 10 %. Bien sûr, M. Damon suggère que les titulaires du minimum vieillesse ou ceux qui perçoivent de petites retraites soient épargnés, mais que tous les autres soient assujettis à ce prélèvement confiscatoire. Selon M. Damon, l’économie marchant à 90 %, nombreux sont ceux qui connaissent des baisses importantes de revenus : les jeunes actifs, les salariés au chômage partiel, les nouveaux chômeurs, les restaurateurs ou les petits commerçants privés de tout revenu. Or, selon M. Damon, les retraités ne seraient pas impactés par la crise et vivraient, en moyenne, mieux que le reste des Français. Il conviendrait donc, par « justice sociale » et « solidarité », de les taxer au moins en 2021. Ce prélèvement pourrait diminuer les années suivantes à mesure que la France se redresserait. Le montant total des retraites s’élevant à 300 milliards d’euros, en taxant les plus « riches » de nos seniors (tout est relatif) on pourrait récupérer de 15 à 20 milliards d’euros, soit 1 % du PIB.

Or, il ne s’agirait ni plus ni moins que d’un vol. Les plus « fortunés » des retraités touchent un peu plus de 3.000 euros par mois, mais ils sont peu nombreux. La pension mensuelle moyenne est de 1.504 euros ! Nos aînés ne sont pas des nantis mais des Français on ne peut plus moyens. Les taxer constituerait une discrimination par l’âge dont on se demande si elle serait constitutionnelle.

Damon prévoit que sa proposition rencontrera beaucoup de réticences, mais prétend qu’il n’y a aucune alternative alors qu’en fait, on peut en trouver d’autres tout aussi injustes. Par exemple, on pourrait saisir 1 % de tous les comptes bancaires et assurances-vie. Cela rapporterait 40 milliards d’euros tout en étant aussi inadmissible que la suggestion de M. Damon. Une autre piste bien plus légitime et salutaire serait de traquer les fraudes à la CAF, ce qui permettrait, selon certains, de récupérer 20 milliards.

Retirer 20 milliards aux personnes âgées provoquerait un choc récessif important. Cet argent ne serait plus dépensé. Beaucoup de nos seniors qui sont dans des résidences services ou des EHPAD peinent à payer le loyer qui leur est demandé et doivent, pour compléter leur pension, puiser dans leurs économies. Comment feront-ils si on les prive de 200 euros par mois ? Nous connaîtrons de nombreux drames humains, d’aînés chassés de leur lieu de résidence.

Nous payons l’incurie des gouvernements successifs, qui ont été incapables de réduire la dette pendant les années où notre pays était en expansion. En 2019, avant le Covid-19, on prévoyait 100 milliards de déficit pour un budget de 300 milliards de recettes ! 25 % de dépenses étaient non couvertes. La crise n’a fait qu’aggraver notre situation, mais si, comme de nombreux pays européens, nous étions à l’équilibre, nous aurions supporté sans problème le choc économique de la pandémie et nous n’aurions pas été obligés d’envisager de faire les poches de nos retraités.

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24 novembre 2020 à 16:10

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