Plus que tout, Emmanuel Macron aime parler. Être écouté et s'écouter lui-même. Être au centre de l'attention, sous le feu des projecteurs. Sa parole présidentielle se déploie alors, logorrhéique. Un flot qui finit par noyer son auditoire et les analystes politiques débordés par la « pensée complexe » macronienne constellée de mots à double sens, d’informations contradictoires et de figures de style obscures. Macron est multiple, indéfini, l’un et l’autre en même temps. Il serait donc vain de chercher un fil rouge, une cohérence dissimulée, qui relierait ses déclarations successives.

Macron est « en marche » et nul ne sait dans quel but ni pour quelle destination. Pas plus lui que ses interlocuteurs. À la tête du bateau « France », qu’il s’agisse de politique intérieure ou de politique internationale, il poursuit sa navigation hasardeuse et finit par agacer ceux qui voudraient lui voir fixer un cap et s’y tenir.

En Ukraine, le néologisme « macroner » a été inventé pour décrire l’attitude du Président français. Au printemps dernier, il s’agissait de fustiger le décalage entre ses déclarations grandiloquentes et des actes de soutien jugés insuffisants. Son appel à « ne pas humilier la Russie », afin de laisser la porte ouverte à la voie diplomatique, avait déclenché l’ire de Kiev. Un Macron repentant s’était alors rendu auprès de Zelensky, en juin dernier, afin d’obtenir son pardon et de redorer au plus vite l’image présidentielle écornée.

La presse française avait applaudi des deux mains, célébrant le « virage ukrainien d’Emmanuel Macron ». Dans Le Figaro, Isabelle Lasserre se félicitait de cette indispensable clarification et de la fin du « en même temps ». Juré, craché, le Président français avait choisi son camp et il n’était plus question de « cessez-le-feu ». « Aujourd’hui, il faut gagner cette guerre », déclarait un Macron désormais droit dans ses bottes. C’était pourtant bien mal le connaître que de s’imaginer que ses bottes ne le conduiraient pas vers de nouvelles échappées à contresens.

Affaibli sur le front intérieur, le Président rêve d’un succès à l’international. Sa récente tournée américaine, au cours de laquelle il n’a pourtant obtenu aucune concession de Joe Biden concernant l’Inflation Reduction Act, l’a gonflé à bloc. Il est désormais bien décidé à reprendre l’initiative sur le front ukrainien, comme l’analysait le journal Le Monde à son retour : « Dans son rôle de leader international, le chef de l’État tente de se faire l’artisan de la paix en Europe. » Trouver une issue au conflit ukrainien, voilà un rôle à sa démesure.

Sur TF1, le 3 décembre dernier, le Président déclarait avoir longuement échangé avec Joe Biden à propos de « l'architecture de sécurité dans laquelle nous voulons vivre demain ». Les commentateurs s’étaient bien gardés de souligner l’énormité de la suite des déclarations du Président français qui admettait indirectement quel avait été le véritable déclencheur de la guerre en Ukraine : la peur de Vladimir Poutine « que l'OTAN vienne jusqu'à ses portes » et le problème consécutif du « déploiement d'armes » qui pourrait alors « menacer la Russie ». Emmanuel Macron reconnaissait alors qu’il faudrait songer, à l’avenir, à donner « des garanties pour sa propre sécurité à la Russie ».

Il y avait de quoi être effaré. Le monde vit sous la menace d’une confrontation nucléaire et, chaque jour, le nombre de morts et de blessés augmente en Ukraine. Pourquoi, diantre, ne pas avoir agi en ce sens avant le 24 février ?

Un tel aveu venait contredire le récit qui nous est imposé depuis des mois et d’après lequel Vladimir Poutine est un dictateur sanguinaire dont la seule motivation est, depuis toujours, de récréer l’empire des Soviets. Revirement, il faudrait maintenant prendre au sérieux le « dilemme de sécurité » russe ? C’est-à-dire le fait que l’extension de l’OTAN à ses frontières a été perçu par la Russie comme une menace croissante pour sa sécurité.

Depuis le début du conflit, Emmanuel Macron oscille entre une approche réaliste, prenant en compte les préoccupations de la Russie, et un manichéisme belliciste qui transforme ce conflit en une croisade morale du bien contre le mal. Incapable de définir une ligne claire, il se décrédibilise à Kiev comme à Moscou. Macron parle et s'agite dans le vide mais, à la fin, il finit toujours par suivre le vent dominant qui vient d’outre-Atlantique. Ses incohérences et son alignement de facto ont fait perdre à la France la seule chose qui lui restait : une voix singulière dans le concert des nations.

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07 décembre 2022 à 13:06

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35 commentaires

  1. Cet arriviste de président prétentieux n’a même pas conscience qu’il est la risée du monde entier.
    Après lui, la France aura beaucoup de mal à redresser son image.
    Pour toutes leurs innombrables trahisons, les dirigeants actuels devront rendre des comptes.

  2. Quand je vois qu’un comédien est devenu un Président EN MEME TEMPS je vois un Président devenu comédien !

  3. Il est de notoriété publique que le président américain n’a plus toute se tête. Le président français l’a rencontré et a avoué avoir discuté avec lui d’égal à égal. Chacun comprendra ce qu’il veut.

  4. bon à rien et nul en tout , ne soyez pas étonné c’est comme ça que fonctionne les manipulateurs narcissiques !!

  5. Nous sommes maintenant la risée du monde. Et en plus bientôt privés peut-être d énergie pour cause incompétence et de soumission un cauchemar ! A virer urgemment

    1. Le coq bat des ailes et va bientôt tomber de son perchoir, tas de fumier.
      Destitution. Qu’est-ce qu’on attend?

  6. En écoutant les médias français , on est bien informés, Poutine prend le matin un thé (même samovar que Staline), et mange trois nouveaux nés braisés . Ha ,la bonne information droits de l’homme et tout le fourbi !

    1. Bravo ..c’est ce que j’ai répondu à un voisin qui m’ennuyait en me parlant de la Russie …tous les jours je bois le thé avec le grand président russe ,vous ne le saviez pas ? Du coup je suis tranquille .

  7. une girouette a une utilité, elle donne le sens du vent, macron s’agite tel une girouette mais ne sert à rien puisqu’il tourne dans tous les sens sans jamais s’arrêter. Son comportement irrationnel et ses incohérences font qu’il est invisible sur le plan international et exécrable sur la politique intérieure.

  8. Parfaitement inconséquent ! J’aimerai voir ce gouvernement de guignols se préoccuper davantage de la situation des Français en souffrance dans tous les domaines avant que de l’Ukraine ou de la démocratie en Iran; n’oublions pas que les Bataillons Azof ont massacré durant 6 – 7 ans des Russophones au Donbass et le clown triste belliqueux qui n’a de cesse de vouloir nous entrainer dans un conflit mondial pourrait bien se calmer, de même les Macron et Von der Layen revenir à leurs fonctions premières. S’ils veulent tant aider l’Ukraine, qu’ils prennent leur baluchon , un AK 47 et aillent faire la guéguerre sur place. Marre de ces donneurs de leçons à la terre entière, qui ne sont pas foutu de régler les problèmes de leur propre Pays !

    1. « … n’oublions pas que les Bataillons Azof ont massacré durant 6 – 7 ans des Russophones au Donbass … » … et ailleurs en Ukraine.
      Souvenez-vous du massacre des russophones à Odessa en 2014. L’Ukraine russophone est à l’est du Dniepr et au Sud bordant la mer noire.

      Maintenant ces « bandéristes » s’attaque à la religion orthodoxe … celle justement des russophones.

      Comme quoi l’effacement d’une religion (Chrétienne) séculaire est possible en « démocratie ». Il y a beaucoup d’enseignement à tirer de la situation « Ukrainienne » en tant que soi-disante Nation.

  9. Un brasseur de vent ,voilà ce qu’est Macron,un type totalement dépourvu de charisme ,heureusement les médias sont là pour l’encenser,mais que reste-t-il à encenser?
    Un dessinateur pourrait créer une série du style Bécassine ou Martine:Emmanuel à Washington,Emmanuel à Rome, Emmanuel à Bruxelles .
    A chaque retour de voyage Macron s’invite sur TF1 ou La 2,face à un journaliste « passe plat » il parle,et parle encore et toujours pour ne rien dire , toujours satisfait de sa propre personne ,s’il s’engage sur un sujet de politique intérieure nous savons que dans les semaines suivantes il se contredira sans s’excuser !

    1. Le parfait pervers narcissique dénoncé depuis longtemps gentiment réélu par nos concitoyens. Merci encore.

      1. Vous avez dit « narcissique »? et vous avez raison. Jupiter a été réélu par des gueux qui ne comprennent rien et encore moins en psychiatrie…et se comportent comme atteints du syndrome de Stockholm.

  10. Tous les commentateurs s’évertuent à trouver un sens à ce que Macron fait selon une croyance que s’il a été élu président de la République, s’il a eu l’onction suprême, c’est qu’il ne peut être que supérieurement intelligent comme il nous est répété jusqu’à la nausée.
    Et si tout simplement, il ne comprenait juste rien à rien et n’était pas assez malin pour s’en rendre compte ?

  11. Vivant aux USA depuis 30 ans j’ai ressenti une honte effroyable quand j’ai vu macron et sa compagne jouer au roi et reine d’un royaume qui n’existe pas ou plus. Le petit directeur est venu prendre ses ordres au siège social de la part d’un vieux croûton qui ne fait que de la figuration. De plus son attitude à avoir son bras et sa main sans cesse peloter le patron l’a rendu tellement ridicule que les précieuses en rient encore .

    1. Oui. Cette manie de « passer la main dans le dos » à tout le monde devient gênant à voir. Aucune tenue. Aucune prestance. À l’image de ce qu’il a fait de la France.

  12. « Le Président déclarait avoir longuement échangé avec Joe Biden … » dixit Frédéric Lassez. Vu que le dit Biden est complètement aux fraises – infirmité que nos médias mainstream s’efforcent de camoufler – j’aurais aimé être petite souris pour assister à l’entretien.

  13. « son alignement de facto ont fait perdre à la France la seule chose qui lui restait : une voix singulière dans le concert des nations. » Ouf, que cette voix singulière qui reviendrait à mettre sur le même plan l’agresseur, le tortionnaire, le coupable de crimes de guerre, l’allié des islamistes tchetchènes, et l’agressé ukrainien, se taise ! Pas de voie de sortie pour le faux-rouge-vrai-brun Poutine : David une fois encore pourrait abattre Goliath, et le b… jusque dans ses ch… dorées du Kremlin.

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