[Tribune] La chute de la démographie annonce la fin d’une civilisation

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L’INSEE vient de publier son « bilan démographique 2022 » (17/1/2023). On y apprend que la croissance démographique de notre pays a atteint « un point bas historique », que le solde naturel de 56.000 (différence entre les naissances et les décès) est le plus faible niveau depuis la fin de la Deuxième Guerre mondiale. Le taux de fécondité se situe à 1,80 enfant par femme, alors que le seuil de renouvellement des générations se situe à 2,05 enfants par femme. Il est intéressant de noter qu’en 2010, il se situait à 2,03 enfants par femme, c'est-à-dire qu’il frôlait ce seuil qui permet à une population de rester stable d’une génération à l’autre. L’INSEE relève aussi que le solde migratoire « est estimé à 161.000 » et qu’il contribuerait à près des trois quarts de la hausse de la population. En 2021, le même institut national indiquait que près de 67 % des immigrés étaient extra-européens (66,9 %), dont 47,5 % provenaient d’Afrique, 13,6 % et 5,8 % d’Amérique et d’Océanie.

Pendant de nombreuses années, la France fit figure de modèle en Europe pour sa politique familiale et sa démographie proche du seuil de renouvellement, alors que quinze États membres de l’Union européenne non seulement n’atteignaient pas ce seuil mais encore perdaient de la population. Le succès de cette politique française tenait à sa pérennité quels que soient les régimes. Lancée par le Front populaire, continuée par le gouvernement du maréchal Pétain, reprise par le Conseil national de la Résistance puis par la Quatrième République et la Cinquième à ses débuts. Elle mobilisait des aides directes attachées à l’enfant, les allocations familiales, un régime fiscal favorable, le quotient familial, des congés parentaux et des systèmes de garde des enfants permettant de concilier vie familiale et vie professionnelle. Certes, tout ceci avait un coût, mais il s’agissait d’assurer la pérennité de la France et, sur le long terme, l’équilibre de nos systèmes sociaux, et notamment les retraites. Hollande et la gauche se sont attelés à détruire cet édifice, d’une part en mettant les allocations familiales sous conditions de ressources, d’autre part en abaissant le plafond du quotient familial par deux fois.

L’effet fut désastreux parce que ces décisions indiquaient que la politique familiale n’était plus « sanctuarisée » et que sa pérennité n’était pas assurée. Or, un projet familial est par définition un projet de long terme, intergénérationnel, qui nécessite sécurité et durée. Le signal était donc calamiteux et l’effet ne se pas fit attendre car le nombre de naissance fléchit immédiatement. Mais il est d’autres raisons. L’incertitude des temps et une atmosphère idéologique généralement hostile à la famille présentée comme aliénante, mauvaise pour « la planète », empêchant les femmes de se réaliser dans le travail. Pour certaines féministes, l’idéal semble être que la femme soit « un mec comme les autres », ce qui est une étrange façon de prétendre défendre la moitié féminine de l’humanité ! Dans L’Origine de la famille, de la propriété privée et de l’État, Karl Marx écrivait : « Dans la famille, l’homme est le bourgeois ; la femme joue le rôle du prolétariat. » Ceci explique l’hostilité jamais démentie de la gauche à la famille et sa volonté d’ajouter la lutte des sexes à la lutte des classes.

La perte du désir d’enfant est le signe d’une société qui ne croit plus en elle-même, qui pense qu’elle ne sera pas capable d’apporter une vie meilleure à la génération suivante. C’est le symbole d’une société qui ne veut plus se projeter dans l’avenir. Elle dit aussi quelque chose de l’individualisme et du matérialisme triomphant. Notre société libérale-libertaire, empoisonnée d’idéologies de la déconstruction, ne s’intéresse qu’à l’individu productif et consommateur. L’enfant comme le vieillard sont des obstacles pour jouir des plaisirs de l’existence et l’on compte sur les enfants des autres, les enfants de l’immigration, pour subvenir à nos besoins présents ou futurs. Une forme de néocolonialisme qui se pare de la vertu de Tartuffe.

En ce moment, en Italie, un ouvrage de l’historien Alessandro Barbero, Il giorno dei barbari (« Le Jour des Barbares »), rencontre un grand succès. Il raconte comment le Bas-Empire romain, en crise démographique et peinant à assurer sa sécurité, fit entrer sur son territoire nombre de Barbares pour repeupler certaines régions ou servir dans les légions. Jusqu’au jour où les Goths se rebellèrent contre l’empereur Valente, le battirent et le tuèrent à Andrinople en 378, ce qui annonçait la fin de l’Empire romain d’Occident un siècle plus tard. Les discours « humanitaires » fleurissaient aussi dans les cercles du pouvoir impérial, cachant assez mal des intérêts plus terre à terre : le manque de bras. Le 4 septembre 476, l’Empire romain d’Occident disparaissait, démembré par les peuplades barbares dont beaucoup était déjà présentes dans l’Empire. L’Empire romain d’Orient perdura jusqu’au 29 mai 1453. Quand Constantinople tomba entre les mains des Turcs, les théologiens grecs discutaient, dit-on, du sexe des anges. Aujourd’hui, nous discutons du sexe des êtres humains qui, selon certains, ne serait que construction sociale. En général, les leçons de l’Histoire servent peu. Probablement moins, encore, dans notre époque d’inculture ! Nous risquons de nous en repentir.

Stéphane Buffetaut
Stéphane Buffetaut
Chroniqueur à BV, élu de Vendée, ancien député européen

Vos commentaires

30 commentaires

  1. Une société qui ne fait plus d’enfants est condamnée à mourir. Les excitations politiques attachées au grand remplacement n’évoquent jamais la problématique de la natalité et encore moins les projets économiques du grand capital apatride et de l’Europe des marchands. à savoir importer des masses sans culture ni connaissances acceptant un recul total et complet de la protection sociale pour les prochaines années et ne souhaitant obtenir qu’une carte de fidélité en grande distribution pour procréer, acheter des couches, et ensuite nous détruire totalement avec le concours de leurs progénitures. Selon l’expression philosophique c’est ce que l’on nomme : domination totale du capital et de la marchandise.

  2. Plus de 230 000 avortements par an rien qu’en France……Et si au lieu de financer l’immigration, l’Etat commençait par aider les mères….

  3. Comment voulez vous que le jeunes qui ont encore un peu de bon sens, acceptent de mettre au monde des enfants. Quel avenir leur réserve t-on ? Chômage, obligation vaccinale qui leur diminue drastiquement leur immunité naturelle, harcèlement à l’école, niveau de l’instruction catastrophique car tout est voulu, on veut faire de nos enfants des analphabètes afin qu’il ne gênent pas, qu’ils demeurent au niveau de la faune qui s’est abattue sur l’Europe, l’immigration qui n’en finit pas. Tôt ou tard, le monde entier sera sous le joug de l’islam. Alors soyons sérieux, faire des enfants dans ces conditions est une aberration.

  4. Yves Cochet — écolo — disait : « nous sommes trop nombreux sur Terre , il faut diminuer la démographie » , raisonnement tout ce qu ‘ il y a de plus rationnel , ensuite il continue :  » la France doit faire un effort particulier en ce sens afin d ‘ accueillir la misère qui frappe à nos portes » …… et là ça ne va plus , un véritable appel au suicide …..

  5. Les jeunes d ‘ aujourd ‘ hui pensent plus à jouir de la vie que d ‘ assumer leur avenir : qui paiera leur retraite ??

  6. On encourage les femmes à procréer , et en même temps on les encourage à avorter !! Cherchez l ‘ erreur …..

  7. Avec la robotisation en plein développement, pas sûr que le nombre soit une valeur sûre. Mais surtout avec l’abaissement des allocations familiales pour la Classe Moyenne, importante en nombre, c’était comme si nos chers Enarques l’avaient souhaité….
    Pas du tout sûr que si l’U.E. était en équilibre démographique, se suffisant à elle même, et de qualité de vie supérieure à celle de l’Afrique et du Moyen Orient, que les peuples de ces continents n’embarquent pour venir nous submerger…
    Donc il est évident que, comme pour la Rome Antique, l’Occident en presque décadence, avec le wokisme qui pointe sournoisement, des peuples au quotidien difficile et les tam tam « ont dits » d’aides sociales et d’écrasement de la Chrétienté en U.E., se bousculent dans les ports…

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