Sondages : Marine Le Pen s’installe en tête

© Geoffroy Antoine
© Geoffroy Antoine

Marine Le Pen, reine des sondages ?

Le sondage commandé par le magazine économique Challenges à Toluna et Harris Interactive est riche d’enseignements, quant au premier tour de l’élection présidentielle à venir. Il y a là trois configurations envisagées avec des candidats, tous plus ou moins issus de la présidence en cours, face à Marine Le Pen. Dans la première configuration, Marine Le Pen serait confrontée à Édouard Philippe : l'ancien Premier ministre obtiendrait 24 %, contre 30 % pour l'ancienne présidente du RN. La deuxième avec Bruno Le Maire donnerait seulement 16 %, contre 32 % pour Marine Le Pen. La troisième, avec Gérald Darmanin, afficherait 10 %, contre 33 %.

Et quel serait le résultat de Jean-Luc Mélenchon, l’autre candidat « populiste » ? 16 % face à Édouard Philippe, 18 % contre Bruno Le Maire et 19 % si Gérald Darmanin relevait le flambeau macronien. Bref, le second tour lui échapperait une fois encore.

Mais il y a d’autres indications à tirer de ces chiffres. L’effondrement des LR, avec un Laurent Wauquiez oscillant de 5 % à 7 % des suffrages. Et la bonne tenue d’Éric Zemmour, donné à 7 % ou 8 %, soit son score de 2022. Il avait voulu remplacer le Rassemblement national ? Ce sont les Républicains qu’il est en train de supplanter. Ce à quoi il convient encore d’ajouter le socle de 2 % d’un Nicolas Dupont-Aignan ayant, lui aussi, réussi à fédérer d’autres électeurs déçus par cette même droite de gouvernement.

Le même phénomène peut également s’observer chez la ci-devant gauche de gouvernement. Le Parti socialiste et son candidat non déclaré, Bernard Cazeneuve, évoluent en eaux électorales très basses : de 5 % à 8 %. Pis, le mouvement jadis fondé par François Mitterrand, écrasé par l’hégémonie de La France insoumise, se voit maintenant aussi concurrencé par un autre revenant, le Parti communiste, dont l’homme lige, Fabien Roussel, consolide le socle électoral, avec 5 %. Il fait désormais jeu égal avec EELV et son candidat putatif, Yannick Jadot. Une évidence s’impose : le monde politique d’avant n’est plus exactement celui d’aujourd’hui.

Mais quid du second tour ? Là, le duo Harris/Toluna est moins prolixe. Il nous dit malgré tout que 67 % des sondés estiment que Marine Le Pen a des chances de l'emporter.

Il est vrai que pour la première fois de sa carrière politique, elle peut compter sur de conséquentes réserves de voix. Les 7 % de Zemmour et les 2 % de Dupont-Aignan. Elle peut aussi miser sur certains électeurs mélenchonistes et communistes. Après le « tout sauf Le Pen », le « tout sauf Macron » ? Certes, ce dernier ne pourra se représenter, mais rien ne dit qu’Édouard Philippe, sorte d’Alain Juppé en pire, pourra se faire passer pour un Emmanuel Macron en mieux.

Il ne s’agit que de simples enquêtes d’opinion. Et nombre de nos lecteurs seront tentés de dire que les sondeurs se sont toujours trompés, ce qui est à la fois faux et vrai. On a pu croire qu’Édouard Balladur serait élu dès le premier tour en 1995 alors qu’il n’a même pas pu participer au second. Pareillement, aucun institut n’a su anticiper l’irruption de Jean-Marie Le Pen en 2002. Sauf que si : à quelques jours de ces deux scrutins, les sondeurs donnaient, à quelques décimales près, le résultat final.

Car le sondage est dans la vérité le jour où il a été effectué, mais peut se trouver dans l’erreur une semaine plus tard. Ainsi, les résultats du premier tour de la prochaine élection présidentielle de 2027, sont « vrais » aujourd’hui, mais seront peut-être « faux » dans trois ans. L’autre erreur à ne pas commettre est d’imaginer que ces instituts sont là pour formater l’opinion, obéissant à on ne sait quel chef d’orchestre clandestin. La vérité est autrement plus triviale. Les sondages coûtent cher et ceux qui les commandent, hommes politiques et journaux, en veulent malgré tout pour leur argent, à moins de perdre le peu de crédibilité qui leur reste.

Et ces fichus sondages, encore faut-il savoir les lire. Car un seul d’entre eux ne dit finalement rien. Mais quand, enquête après enquête, ils finissent par tous susurrer la même chose, voilà qui devient intéressant. Non point pour le résultat à venir, mais pour les dynamiques du moment et les tendances de fond.

Nicolas Gauthier
Nicolas Gauthier
Journaliste à BV, écrivain

Vos commentaires

33 commentaires

  1. Sincèrement MLP souhaite t-elle réellement arriver aux affaires ? Le FN/RN a été créé en 1972 et depuis, toujours dans l’opposition, pourquoi, comment cela est il ? Un parti politique a t-il vocation de ne point arriver au pouvoir ? Ce parti politique est-il de fait une machine à perdre, à faire gagner les autres ?

    • Je plains le prochain présidente (le ou la). Je ne voudrais pas être à sa place. Le pays est dans un tel état de délabrement. Il y a du pain sur la planche!

  2. Après avoir tout essayé et compte tenu des résultats , il ne faut pas s’étonner de vouloir s’accrocher à la dernière bouée avant de couler !!

  3. La création de Mitterrand fonctionne à plein, on monte le FN/RN pour le premier tour et entre les 2 tours on le diabolise. Qui parle de Philippe autour de nous ? Personne, pendant 3 ans Bardela vas faire le job et Marine muette travaillera sa respectabilité pour se retrouver face à Philippe le candidat main stream. Après un débat catastrophique Marine sera diabolisée et nous aurons Philippe, le scénario est bien rodé. C’est à se demander si Marine Le Pen désire vraiment prendre le pouvoir ou préfère continuer à exploiter sa rente dans l’entreprise familiale.

  4. Inquiétant ces résultats de sondage. Une manière de crier au loup pour mieux l’éliminer. Ce qui est sur c’est que le Rassemblement National est notre planche de salut. On a tout essayé et chaque essai nous envoient dans le mur, à ne pas s’y tromper.

  5. On va nous balancer ce genre de sondage tout au long des 4 années-ci à venir, et le jour J, patatras, comme d’habitude. D’ici la les cartes seront redistribuées et l’on verra bien. Mais MLP? non merci

  6. Balladur, Juppé…..Marine Le Pen. La malédiction des favoris des sondages épargnera-t-elle la grande muette sur les sujets qui fâchent ?

  7. Le chemin est encore long et semé d’embûches mais la stratégie est bonne. Attention toutefois, dans cette quête de normalisation et de respectabilité, à ne pas donner l’impression d’abandonner les fondamentaux…
    Mais elle est entourée désormais de gens jeunes, intelligents en compétents. Faisons leur confiance.
    Nos journalistes bien pensants restent arcboutés sur le vieux FN comme si rien n’avais changé. Erreur, la jeune génération n’a rien à voir avec les vieilles barbes.

  8. L’opiniâtreté et la constance de ses idées pour son peuple et pour la France est reconnue. Mais la versatilité des français est aussi une constante.

  9. Patience, patience. ça mont, çà monte…Et faisons confiance à Macron et Mélenchon pour continuer d’exaspérer les Français. En attendant, que toute la bien pensance médiatique en prenne bonne note et qu’elle commence à changer ses paramètres et ses logiciels. Sinon, il se pourrait qu’un certains nombre d’entre eux ne doivent d’ici quelque temps, aller pointer au chômage. Dans ce cas, pas d’inquiétude, ils leur suffira de traverser la rue…

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