Selon Pap Ndiaye, le bac deviendrait plus sélectif : vraiment ?

Pap Ndiaye

Invité d'Yves Calvi, ce mardi, sur « RTL Matin », le ministre Pap Ndiaye a annoncé « 84,9 % d'admis [au baccalauréat] », évoquant « un léger tassement » par rapport à 2022 et se réjouissant que « le bac retrouve une sélectivité qu'il avait pu perdre ces dernières années ». Le bac redeviendrait sélectif, vraiment ? Quand on y regarde de près, on s'aperçoit que ce « tassement » et cette « sélectivité » sont bien relatifs, avec une baisse de 1,1 % par rapport à l'an dernier, toutes séries confondues, et de 0,9 % pour le bac général.

Tous ceux qui connaissent un peu le système savent à quel point les propos du ministre travestissent la réalité et ne sont que de la langue de bois médiatique. Les sujets du bac sont parfois ambitieux mais, quel que soit leur niveau, tout est fait, lors des corrections et des harmonisations, pour que les résultats, après les épreuves de rattrapage, dépassent, comme d'habitude, les 90 % d'admis. S'il existe toujours de bons élèves, avec d'excellentes notes, les médiocres s'en tirent généralement avec une moyenne honorable. Il arrive même que certains élèves soient les premiers étonnés d'être reçus.

On ne transige pas avec les droits de l'homme 

De plus, le poids du contrôle continu altère l'objectivité de l'évaluation des candidats, les professeurs subissant des pressions des élèves et de leurs parents, voire de leur hiérarchie, pour rehausser les notes. Paradoxalement, seuls les élèves des établissements hors contrat, où l'enseignement est souvent plus exigeant, sont obligés de passer, comme autrefois, un examen dans toutes les matières. Le baccalauréat est devenu un droit de l'homme et, vous le savez bien, on ne transige pas avec les droits de l'homme, des enfants ou des élèves.

Ce qui est vrai du baccalauréat est encore plus vrai pour le DNB, le diplôme national du brevet. On peut ainsi lire, dans les consignes de correction de la dictée, qu'on enlèvera « 1 point pour les erreurs grammaticales » – on ne parle plus de « faute », terme trop culpabilisant – et « 0,5 point pour les erreurs lexicales ». Les plus anciens de nos lecteurs se souviennent peut-être qu'une faute d'accord leur coûtait, autrefois, 4 points et qu'avec cinq fautes de grammaire, on était assuré d'un zéro. Autres temps, autres mœurs !

Ce n'est pas tout. Pour les questions de « compréhension et compétences d'interprétation », il est précisé qu'« on ne retirera pas de point sur les erreurs d'orthographe ou pour la faible qualité de la langue ». Pour la rédaction, « on valorisera toute copie témoignant d'un effort manifeste de style, même maladroit », et « on n'hésitera pas à évaluer jusqu'à 40/40, y compris si la copie comporte quelques erreurs ». On ne peut pas dire que ces consignes aillent dans le sens d'une plus grande exigence.

Jeter de la poudre aux yeux, c'est la recette de Pap Ndiaye, qui l'a appris de son maître. Il faut donner le change, faire prendre des vessies pour des lanternes, faire croire qu'on agit quand on s'agite. Pap Ndiaye, à l'instar d'Emmanuel Macron et de la plupart des ministres, est un illusionniste. Les Français se laissent de moins en moins abuser par ces tours de passe-passe et, bientôt, viendra le jour où ils lanceront des tomates sur ces histrions de la politique.

Philippe Kerlouan
Philippe Kerlouan
Chroniqueur à BV, écrivain, professeur en retraite

Vos commentaires

28 commentaires

  1. J’ai des proches qui passent ou on passé le BAC international, on devrait s’en inspirer, seulement le BAC international est basé sur l’élitisme, alors que notre bac lui est basé sur l’égalité des chances, c’est une grande différence car l’égalité des chance veut dire tout le monde au même niveau, le plus bas de préférence.

  2. Encore une brillante idée de Macron (ou de sa femme) que d’être allé chercher cet oiseau-là. Revenons-en au Ministère de l’Instruction publique et des Beaux-arts, et puis il est grand que ce ne soit plus les syndicats d’enseignants qui dans les faits gèrent ce ministère. L’erreur remonte à 1989 avec la suppression du fameux Certif’ (comme d’avoir supprimer le DEUG). Le Baccalauréat ne devrait être qu’un simple diplôme de fin d’études secondaires et non un viatique pour entrer à l’université. L’accès à l’université doit nécessiter de passer un concours. Le Brevet des collèges doit-être revalorisé.

  3. J’ai des petits-enfant qui, victimes de l’E.N., sont parfaitement ignares et n’ont jamais lu que Harry Poter mais qui ont eu le Baccalauréat Général avec d’excellentes notes.

  4. Ce ministre a dit bac sélectif..bien sûr …maths et philo …possible encore peut être ..mais épreuves d’éducation sexuelle avec travaux à l’appui …c’est la mode et moins de travail pour les parties de jambes en l’air .misère de misère

  5. Bonjour Philippe Kerlouan, on croit rêver, ce pape de l’université devrait être en psychiatrie, comment en est-il arrivé là « lui »? Nous ne sommes pas strictement de la même génération (76 ans) mais il y a une transmission commune entre vous et moi. En tant que prof, ça doit vous défriser beaucoup. La question est: comment redresser la barre?

  6. Quand on sait que certains l’ont déjà sans avoir passé une seule épreuve. Mais rassurons nous bientôt l’IA qui remplacera l’humain dans beaucoup de métiers. Question que fera t’on de ces gens ?

  7. Le maxi devrait être de 50% de reçus au Bac. Sinon, comment alimenter correctement les « métiers en tension ».

    • Tout à fait d’accord Pipo56, les autres 50% au service militaire, ça coûterait moins cher.

      • Ah , je ris ( jaune ) ! Les cancres, à l’Armée (ou la police), pour les 20/20 en sport, comme déjà après 1970, quand le flot des « futurs étudiants » a commencé à déborder suite aux effets positifs de la « prime-braguette », à la dévastation mécanisée des champs de nos campagnes et au mépris/dégoût colporté pour les métiers d’ouvriers et artisans…

  8. Je me souviens qu’il y a déjà un certain nombre d’années il était régulièrement donné comme consigne aux correcteurs de valoriser dans les copies de maths « une tentative de résolution », formule vague à souhait qui permettait de donner des points même si la tentative n’était pas aboutie, se limitait à une demi-ligne ou partait manifestement dans une direction erronée.

  9. on peut résumer la doctrine de correction des examens ainsi : s’il y a de l’encre, il y a des points

  10. Le bac plus sélectif ? C’est à mourir de rire… Merci pour les détails, car c’est encore pire que ce que je pensais ! Donc il est donné, le bac, et c’est d’une injustice monumentale envers les élèves qui rendent un vrai travail. Et le nouveau Pap ne manque pas de souffle ! Au fait, le DNB se déroule sur combien de jours ? À mon époque — celle du BEPC ! — ça durait trois jours.

    • Exact Lily, j’ai connu ça également. Aujourd’hui il faudrait sermonner les prof(s) qui n’obtiendraient pas 95% (:-D

  11. Il me fait penser à F H…. Qui s’automotivait que le chômage baissait pendant 5 ans alors que le pédalo coulait …

  12. Papa N’diaye, assuré que ses enfants auront suivi une scolarité normale à l’Ecole Alsacienne, se moque de nous avec son « tassement » des résultats du Bac, qui sera bientôt corrigé par le rattrapage ! En bon franco-sénégalais, il parle avec talent de questions qui ne l’intéressent pas. Son seul souci est sa petite personne, sa gloire et sa grandeur ! Et si, en plus, il peut se payer notre tête, alors c’est la fête. Je crois pour ma part que la sélectivité devrait rapidement nous débarrasser d’un tel exemple de fatuité !

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