Retraites : entre enfumage et bricolage…

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À l’ouverture de la traditionnelle université d’été du MEDEF, rebaptisée « Rencontre des entrepreneurs de France », Geoffroy Roux de Bézieux a mis les pieds patronaux dans le plat des retraites gouvernementales en affirmant que « préférer la durée de cotisation plutôt que de repousser l’âge de la retraite à travers un âge pivot, tout en affirmant l’objectif d’équilibrer les régimes en 2025, ce sont deux injonctions contradictoires ».

Le patron des patrons n’a pas tort de dénoncer la tentative d’enfumage sur ce dossier complexe.

Une retraite à taux plein avec décote, ce n’est plus du taux plein, quoi qu’on en dise du côté du Château. Le verre à moitié vide n’a jamais été considéré comme complètement rempli.

Dussé-je passer pour un social-traître, je donne encore raison au président du MEDEF quand il s’inquiète de l’éventuel détournement des réserves des salariés du privé pour financer les retraites des salariés de l’État.

Si, pendant des années, patronat et syndicats ont géré de façon responsable les caisses de retraite du privé, ce n’est pas pour qu’un État champion des prélèvements fiscaux, incapable de réduire les déficits, mette la main sur nos réserves.

Par contre, quand Roux de Bézieux affirme : « La seule solution, c’est de combiner l’âge et la durée de cotisation car sinon nous serons dans une impasse financière »», il fait du libéralisme hors-sol !

La solution à notre problème réel de financement des retraites est multiple.

D’abord, quel sens y a-t-il à décréter l’allongement de l’âge et de la durée de cotisation quand, à partir de 50 ans, les entreprises mettent les salariés sur un siège éjectable ?

D’après les chiffres du ministère du Travail, de 2008 à 2018, le nombre de chômeurs de 55 ans et plus a augmenté de 179 %.

En 2018, le taux de chômage des seniors a encore augmenté de 0,5 %.

Le taux d’activité des plus de 55 ans, en France, est de 6 points inférieur à la moyenne européenne. Pire : 60,2 % des seniors au chômage sont en longue durée, c’est-à-dire depuis plus d’un an.

Pour eux, partir plus tard en retraite, c’est être plus longtemps au chômage.

Ou alors, que les adhérents du MEDEF cessent de faire la chasse aux quinquagénaires ! Mais, surtout, ignorer ou vouloir ignorer que financement des retraites rime avec natalité dynamique et donc politique familiale énergique, c’est fuir la réalité.

J’aurais aimé que le patron des patrons, s’adressant aux pouvoirs publics, ait la lucidité de poser en vérité le problème économique et social français dont dépend notamment l’avenir de nos pensions. Pas de marché unique et de mondialisation bénéfiques sans mettre fin à la véritable concurrence déloyale que nous subissons en matière fiscale, environnementale et sociale. Quand on veut jouer la même partie, il faut que les règles soient les mêmes. Le reste ressort plus du bricolage que de la reconstruction d’une France puissante et souveraine.

Quant à la conviction de Geoffroy Roux de Bézieux « que les solutions sont dans les mains et dans les cerveaux des entrepreneurs », qu’il se rappelle la devise des commandos marine où il eut l’honneur de servir : « Unis, nous conquérons. »/em>

Cette union doit largement dépasser le cercle des patrons du MEDEF, faute de quoi, point de conquête !

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Joseph Thouvenel
Secrétaire confédéral de la CFTC, président de l'Union départementale de Paris.

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